Distr.

GENERALE

CERD/C/SR.1119
21 août 1995


Original: FRANCAIS
Compte rendu analytique de la 1119ème seance : Chad. 21/08/95.
CERD/C/SR.1119. (Summary Record)

Convention Abbreviation: CERD
COMITE POUR L'ELIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE


Quarante-septième session


COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1119ème SEANCE


tenue au Palais des Nations, à Genève,
le 15 août 1995, à 15 heures.


Président : M. AHMADU


Puis : M. GARVALOV


SOMMAIRE

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les Etats parties conformément à l'article 9 de la Convention (suite)

Questions d'organisation et questions diverses (suite)


La séance est ouverte à 15 h 15.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES CONFORMEMENT A L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (point 4 de l'ordre du jour) (Suite)

Cinquième, sixième, septième, huitième et neuvième rapports périodiques du Tchad (CERD/C/259/Add.1)

1. Sur l'invitation du Président, la délégation tchadienne prend place à la table du Comité

2. Le PRESIDENT souhaite la bienvenue à la délégation tchadienne et l'invite à présenter le neuvième rapport périodique du Tchad.

3. M. DOUMESIRINMBAYE (Tchad) remercie le Comité d'avoir accepté de reporter l'examen du rapport périodique du Tchad et lui exprime sa vive reconnaissance pour sa bienveillance.

4. M. Doumesirinmbaye explique que le Tchad n'a pas tenu son engagement de présenter régulièrement des rapports périodiques au Comité car il a connu pendant plusieurs décennies une série de crises caractérisées par l'étouffement des libertés, l'instabilité politique et un cycle infernal de violence, qui a entraîné la dislocation totale de l'appareil d'Etat. Toutefois, la Conférence nationale souveraine tenue du 15 janvier au 6 avril 1993, a élaboré une Charte nationale de transition (Constitution) dont les principes fondamentaux sont la défense des droits de l'homme et des libertés publiques, l'instauration d'une démocratie véritable fondée sur la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, le multipartisme politique, le pluralisme syndical et la liberté de la presse. Le Tchad s'est donc ainsi fermement engagé dans la voie de la démocratisation et compte s'attacher désormais à assurer le respect des droits de l'homme.

5. En ce qui concerne le contexte politique, il y a lieu de noter que les Tchadiens prennent de plus en plus conscience de l'importance des droits et des libertés fondamentales de l'individu et de ses devoirs envers la société ainsi que des relations qui existent entre la démocratie, les droits de l'homme et le développement. Pour sa part, le Gouvernement tchadien est résolu à prendre les mesures et les décisions voulues pour faire respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales du peuple tchadien. Dans ce but a été promulguée la loi 031/PR/94 du 9 septembre 1994 portant création de la Commission nationale des droits de l'homme qui a les fonctions suivantes : donner des avis au gouvernement en ce qui concerne les libertés et les droits de l'homme, y compris la condition de la femme, les droits de l'enfant et des handicapés; aider le gouvernement à traiter toutes les questions concernant les droits de l'homme au Tchad; participer à la révision de la législation et à l'élaboration de nouvelles normes en conformité avec la Charte des droits de l'homme et des libertés adoptées par la Conférence nationale souveraine et avec les instruments régionaux et internationaux pertinents; donner des avis sur des cas de violation des droits de l'homme dans divers domaines : police politique, torture, détentions secrètes, disparitions forcées. Par ailleurs, en vertu de la loi 012/PR/94 du 9 avril 1994, il a été institué le Haut Conseil de la communication qui est chargé entre autres de veiller au respect de la liberté d'opinion et d'expression dans les organes de presse publics et privés et l'enfance et l'adolescence. Le Gouvernement tchadien accorde un rang de priorité élevé aux droits de l'enfant de même qu'à ceux de la femme et des groupes vulnérables. Ainsi, il a créé le Ministère de la condition féminine et des droits de l'enfant et s'est efforcé de nommer davantage de femmes à des postes jusque-là réservés aux hommes.

6. Dans le domaine électoral, la Commission nationale de recensement électoral a été mise en place le 27 février 1995 mais elle n'a pas encore commencé ses opérations de recensement qui auraient dû s'achever au plus tard le 15 juillet 1995. Le processus électoral étant bloqué, il est à craindre également que les élections qui devaient mettre fin au régime transitoire ne puissent avoir lieu à la date prévue. Le représentant du Tchad signale enfin que les organisations nationales de défense des droits de l'homme sont reconnues légalement et exercent librement leurs activités.

7. Sur le plan international, le Tchad a ratifié plusieurs instruments internationaux ayant pour objet d'éliminer la discrimination entre les êtres humains, notamment la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, la Convention No 111 de l'OIT concernant la discrimination en matière d'emploi et de profession, la Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l'enseignement, la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid, la Convention de l'OUA sur les réfugiés, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, la Convention relative aux droits de l'enfant, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Protocole facultatif qui s'y rapporte. L'incorporation de ces instruments internationaux dans le droit interne est régie par l'article 103 de la Charte nationale de transition qui leur donne une autorité supérieure à celle des lois nationales.

8. En ce qui concerne la mise en oeuvre au Tchad des articles 2 à 7 de la Convention, M. Doumesirinmbaye indique que conformément à l'article 2, la République du Tchad condamne la discrimination raciale sous toutes ses formes. Selon l'article 8 de la Charte nationale de transition, les Tchadiens des deux sexes ont les mêmes droits et les mêmes devoirs et sont égaux devant la loi sans distinction de race, d'origine ou de religion. L'article 26 dispose que la République du Tchad accorde le droit d'asile aux étrangers dans les conditions prévues par la loi. D'autre part, en application de l'article 3, le Gouvernement tchadien continue de condamner la ségrégation raciale et l'apartheid et défend l'idée d'une société multiraciale basée sur le principe du gouvernement de la majorité. S'agissant de l'article 4, M. Doumesirinmbaye dit qu'il n'existe au Tchad aucune organisation propageant des idées fondées sur la supériorité d'une race ou d'une ethnie. Le Gouvernement tchadien s'efforce de favoriser la coopération dans la paix et l'amitié entre les citoyens et avec tous les peuples épris de justice, de liberté, d'égalité, de fraternité et de solidarité.

9. En ce qui concerne l'article 5, M. Doumesirinmbaye dit que la primauté du droit est le fondement de la politique nationale et de l'Etat. Ainsi, l'article 8 2) de la Charte nationale de transition dispose que "tous les Tchadiens sont égaux devant la loi sans distinction de race, d'origine ou de religion". Selon les articles premier et 6 du Code de procédure pénale la victime d'un délit peut engager une procédure devant une juridiction de première instance et, le cas échéant, saisir la Cour d'appel, conformément aux dispositions de la loi sur l'organisation judiciaire. Le droit à la sûreté de la personne et à la protection contre les voies de fait et les sévices infligés par des agents publics est garanti par l'article 143 du Code pénal qui prévoit des peines à l'encontre des fonctionnaires ayant ordonné ou commis un acte arbitraire ou attentatoire à la liberté individuelle ou à la Constitution. Quant aux droits politiques, ils sont reconnus par l'article 8 3) de la Charte nationale de transition qui dispose que tous les Tchadiens sont électeurs et éligibles et la loi électorale de 1994 qui stipule que tous les Tchadiens - hommes et femmes - en âge de voter et jouissant de leurs droits civiques sont électeurs. L'article 22 de la Charte internationale prévoit en outre le droit de tout citoyen d'accéder aux emplois publics dans les conditions fixées par la loi. Les droits civils énoncés à l'article 5 e) de la Convention sont garantis à tous les Tchadiens sans distinction par divers articles de la Charte nationale de transition et textes législatifs. Il en est de même des droits économiques, sociaux et culturels, notamment du droit au travail et du droit de fonder des syndicats et de s'affilier à un syndicat. Le droit au logement n'existe pas au Tchad compte tenu de la conjoncture socio-économique, et pour apprécier les efforts des pouvoirs publics pour assurer la mise en oeuvre du droit à la santé, aux soins médicaux, à la sécurité sociale et aux services sociaux, il faut connaître la situation démographique, économique et sociale actuelle du Tchad.

10. D'après le premier recensement général de la population et de l'habitat effectué en avril 1993, le Tchad compte quelque 6 200 000 habitants, dont 51,72 % de femmes, soit environ cinq habitants au kilomètre carré. Le taux d'accroissement démographique, qui est d'environ 2,4 pour mille, est particulièrement élevé dans les zones urbaines et notamment à N'Djamera, la capitale. La population est d'une grande diversité ethnique puisque le pays compte quelque 200 ethnies formant 12 grands groupes, dont les plus importants sont les Saras (27,7 %), les Arabes (12,3 %), les Mayo-Kebbis (11,5 %), les Kanem-Bornous (9 %), les Ouaddafs (8,7 %), les Tandjilés (6,5 %) et les Goranes (6,3 %). Ces groupes sont inégalement répartis entre les zones rurales et urbaines. A cet égard, les Baguirmiens (1,5 %) de la population, représentent 37,5 % de la population urbaine dans laquelle dominent les Goranes (27,9 %), les Fitri-Bathas (29,3 %), les Hadjarefs (23,7 %) et les Saras (23 %). Le taux de fécondité est mal connu. Selon certaines estimations, le taux de natalité serait d'environ 42 pour mille avec un indice de fécondité de 5,2 enfants par femme. Le taux brut de mortalité serait d'environ 19 pour mille et le taux de mortalité infantile de 108 pour mille, soit l'un des plus élevés du continent. Le taux de mortalité maternelle à la maternité est d'environ 800 à 1 000 pour 100 000 naissances vivantes. Dans le domaine de la santé, le gouvernement a mis en oeuvre un certain nombre de programmes et de projets visant à améliorer la santé maternelle et à réduire le taux de morbidité et de mortalité materno-infantile, notamment un programme élargi de vaccination, un programme national de lutte contre les maladies diarrhéiques et un programme de lutte contre les carences nutritionnelles. L'action du gouvernement est relayée par les organisations non gouvernementales, toutefois, les services de santé, les médecins et les équipements sanitaires restent insuffisants ou sont inexistants.

11. En outre, le Tchad traverse depuis longtemps une crise économique profonde et souffre d'une instabilité politico-militaire qui a grandement perturbé la planification, l'élaboration et la mise en oeuvre des politiques économiques. Actuellement, l'Etat s'attache en priorité à redresser les finances publiques pour amorcer le développement économique et compte réduire à cette fin les dépenses militaires qui sont plus élevées que les dépenses consacrées à l'éducation, à la santé et aux autres secteurs sociaux. Le Tchad, dont le produit intérieur brut est d'environ 245 dollars des Etats-Unis par habitant, fait partie des pays les moins avancés de la planète, son économie reposant principalement sur le secteur primaire (45,8 % du PIB en 1993).

12. Pour assurer la mise en oeuvre du droit à l'éducation et à la formation professionnelle, l'Etat tchadien a défini une stratégie spécifique : "Education-Formation-Emploi" dans laquelle l'accent est mis sur l'enseignement technique et la formation professionnelle. Toutefois, en dépit de quelques progrès grâce notamment à la création de plusieurs centres de formation, le nombre des demandeurs d'emploi continue d'augmenter. Quant au droit de prendre part à la vie culturelle du pays, il est reconnu à tout Tchadien, de même que celui d'avoir accès à tous les lieux et services publics.

13. Au sujet de l'application de l'article 6 de la Convention, M. Doumesirinmbaye précise que tant le code commercial que les codes de procédure civile et de procédure pénale garantissent à toute personne qui se sent lésée dans ses droits l'accès aux tribunaux et que la juridiction saisie se prononce toujours si le plaignant demande réparation. Si celui-ci n'est pas satisfait, il a à sa disposition l'appel, le pourvoi en cassation, la révision, l'opposition et la tierce opposition.

14. En ce qui concerne plus précisément la lutte contre toutes les formes de discrimination, l'orateur admet qu'il n'existe pas de procédure judiciaire ou administrative spéciale protégeant contre les actes de discrimination raciale, mais signale que les textes en vigueur assurent à toute personne une protection égale et efficace de ses droits individuels et de ses libertés fondamentales, sans considération de sexe, de race, d'origine ou de religion. De plus, l'article 6 du Code de procédure pénale dispose que "l'action civile appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction" et l'article 20 du Code de procédure civile dispose qu'"il y a déni de justice lorsque les juges refusent de répondre aux requêtes ou négligent de juger les affaires en état d'être jugées". Bref, aucun texte ne permet à qui que ce soit d'exercer une discrimination à l'encontre des personnes auxquelles ces dispositions sont applicables.

15. M. Doumesirinmbaye termine en disant qu'il ne prétend pas avoir brossé de son pays un tableau dans lequel il ne subsiste aucune zone d'ombre et remercie le Comité de l'avoir écouté jusqu'au bout.

16. M. Garvalov reprend la présidence.

17. M. de GOUTTES (Rapporteur pour le Tchad) adresse ses plus vifs remerciements à la délégation tchadienne, d'une part parce que sa simple présence, étant donné les difficultés qu'elle a rencontrées pour venir, est un signe de bonne volonté, d'autre part parce que sa communication orale est vraiment très approfondie. Cet exposé, qui donne des renseignements si complets sur les institutions, la démographie, les indicateurs macro-économiques du pays et la mise en oeuvre des articles 2 à 7 de la Convention, équivaut à un rapport complémentaire.

18. Pour fouillé qu'il soit, cet exposé oral ne répond cependant ni à tout ce qu'avait demandé le Comité à sa quarante-cinquième session lorsqu'il avait examiné la situation du Tchad sans rapport écrit et hors la présence de représentants de ce pays, ni à l'engagement pris à la quarante-deuxième session du Comité par le Ministre tchadien des affaires humanitaires de présenter un rapport périodique conforme aux principes directeurs du Comité. Certes, la délégation vient de répondre aux questions qui avaient été posées dans le cadre de la partie générale du rapport sur la composition de la population, mais pas aux autres questions, ni à toutes celles qui avaient été posées dans le cadre de la partie spéciale du rapport qui devait concerner l'application des articles 4, 6 et 7 de la Convention. Il conviendrait donc de combler ces lacunes dans le prochain rapport en tenant compte, en particulier, des aspects qui ont suscité les plus grandes inquiétudes des autres organes internationaux de protection des droits de l'homme et des ONG. Ces inquiétudes sont exprimées dans les documents suivants : rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires à la Commission des droits de l'homme (E/CN.4/1995/61); rapport du Groupe de travail de la Commission des droits de l'homme sur les disparitions forcées ou involontaires (E/CN.4/1995/36); rapport du Secrétaire général à la Commission des droits de l'homme sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques (E/CN.4/1995/84); rapport de 1995 du Comité d'experts de la Conférence internationale du Travail sur l'application des conventions du travail; résolution de la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, qui a condamné énergiquement les violations massives et persistantes des droits de l'homme au Tchad commises par les forces armées et de sécurité, y compris par la "Garde républicaine", et a demandé aux autorités tchadiennes de prendre les mesures nécessaires pour protéger ces droits; dernier rapport du Département d'Etat américain sur les droits de l'homme dans le monde; rapports d'Amnesty international sur le Tchad, et enfin informations fournies par la Fédération internationale des droits de l'homme à la Commission des droits de l'homme, à l'occasion de l'examen de la situation du Tchad.

19. Dans sa partie générale, le prochain rapport devrait donner certaines précisions sur le régime de transition : textes et réformes définitivement adoptés à la suite des projets élaborés par le Comité mis en place en décembre 1993 par le "Conseil supérieur de transition", projet de nouvelle constitution, projet de code électoral, texte de la loi d'amnistie, texte relatif à l'indemnisation des victimes de violations des droits de l'homme, réorganisation des services de sécurité de la gendarmerie nationale, renforcement de l'appareil judiciaire et du statut des magistrats, et protection de l'indépendance de la justice. M. de Gouttes aimerait également savoir à quelle date auront lieu effectivement les élections présidentielles, libres et transparentes, annoncées d'abord pour avril 1994, puis reportées àavril 1995 par le Président. Selon le Département d'Etat américain, il n'a pas été prévu de prolonger encore la période transitoire et il y a donc lieu de s'inquiéter devant l'absence de recensement, confirmée oralement par la délégation, qui est indispensable à l'organisation d'élections.

20. L'information concernant la création, en octobre 1994, de la Commission nationale des droits de l'homme est de la plus haute importance pour le Comité, qui avait justement formulé une recommandation sur la promotion et le développement des institutions nationales de protection des droits de l'homme. Le Comité aimerait savoir maintenant quels sont les moyens d'action dont dispose cette Commission dont on ne connaît encore que les objectifs, quel est le bilan de son action, à défaut, quelles ont été ses premières activités. Selon les rapports de la Commission des droits de l'homme déjà cités et d'Amnesty International, cette commission nationale a en effet fort à faire : des membres de la "Garde républicaine" appartenant au même groupe ethnique que le Président seraient à l'origine de disparitions forcées de civils; certains membres d'ONG de défense des droits de l'homme, notamment de la "Campagne civique nationale" - mouvement qui se propose d'éduquer la population dans l'optique des prochaines élections - seraient victimes de harcèlement; des soldats de l'armée tchadienne se livreraient à des exécutions arbitraires et sommaires de civils, comme en témoignent les informations concernant l'exécution de plus de 25 habitants de villages situés dans la zone de Kaga à titre de représailles après la mort de soldats lors d'affrontements armés entre les forces de sécurité et les rebelles des Forces armées pour la République fédérale. Ces informations ont conduit le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur les exécutions extrajudiciaires a adressé un appel urgent au Gouvernement tchadien. Selon Amnesty International, plus de 200 civils auraient été exécutés arbitrairement par les forces gouvernementales et les divers groupes d'opposition politico-militaires commettraient de leur côté des exactions et des violations des droits de l'homme; les arrestations arbitraires, mauvais traitements et tortures se poursuivraient; les responsables des disparitions, exécutions et autres violations graves des droits de l'homme resteraient impunis soit par la volonté des autorités gouvernementales, soit du fait de la carence des autorités judiciaires. Sur tous ces points, le Comité aimerait recevoir des informations et, si possible, des éléments d'apaisement.

21. Il faut certes reconnaître que, bien que le Tchad soit l'un des pays africains les plus durement touchés par la guérilla et la guerre civile, la démocratie y a quelque peu progressé, ce qui est encourageant. Ainsi, de nombreuses ONG de défense des droits de l'homme sont dorénavant reconnues et peuvent intervenir et s'exprimer librement. D'autre part, la liberté d'opinion et d'expression deviennent peu à peu une réalité, par le biais, par exemple, de partis politiques et d'organes de presse indépendants. Il reste maintenant à conforter cette situation en mettant en oeuvre tous les moyens voulus pour faire cesser les violations graves et persistantes dénoncées par les nombreuses sources précitées. S'agissant de la situation économique, chacun sait qu'elle est alarmante et marquée par la corruption, la fraude douanière, le marché noir et la lourdeur des dépenses militaires, et que, si les catégories les plus défavorisées sont les premières à en souffrir, même des fonctionnaires en pâtissent.

22. Quant à la composition de la population et la structure ethnique du Tchad, il suffira, dans le prochain rapport, d'actualiser l'information apportée oralement par la délégation et de la compléter par un exposé précis des situations engendrées par le clivage Nord-Sud. Il conviendra à cet égard d'éclairer le Comité sur les renseignements selon lesquels le Sud serait surtout administré par des fonctionnaires du Nord avec les conséquences que cela peut entraîner; les habitants originaires du Nord et les habitants originaires du Sud habiteraient des quartiers séparés à N'Djamena, et ce clivage serait aggravé par des dissensions entre cultivateurs sédentaires et éleveurs nomades descendus du Nord en raison de la sécheresse. Un autre point mériterait d'être éclairci : l'influence, prédominante selon le rapport du Département d'Etat américain sur les droits de l'homme, des minorités ethniques proches du Président sur le Gouvernement, l'armée et l'administration civile, car ce favoritisme risque d'exaspérer les tensions entre les ethnies. Ce même rapport du Département d'Etat conclut que la plupart des conflits sont dus à des différences ethniques; il est donc primordial pour notre comité de disposer d'informations précises et actualisées sur la composition ethnique de la population et le pourcentage de la présence des grandes ethnies au sein de l'administration et de la fonction publique.

23. S'agissant des renseignements demandés dans la partie spéciale du rapport périodique, M. de Gouttes demande que la communication orale de la délégation soit complétée par trois types d'information. Les premières porteront sur les textes qui incriminent et sanctionnent les actes de discrimination raciale sous toutes leurs formes, conformément aux exigences de l'article 4 de la Convention. En effet, l'article 6 du Code de procédure pénale indique que l'action civile est ouverte aux victimes de toutes les infractions et l'article 143 du Code pénal vise tous les actes des fonctionnaires et agents de l'Etat, mais aucun texte ne vise spécifiquement les actes de discrimination raciale. M. de Gouttes fait observer à cet égard que la partie de l'exposé oral portant sur l'application de l'article 5 de la Convention aurait été plus à sa place dans un exposé sur l'application des Pactes et que celle qui porte sur les femmes et les enfants ne concerne pas directement le Comité.

24. Le deuxième type d'information à donner dans le prochain rapport devrait porter sur les mesures garantissant l'exercice effectif des voies de recours devant les tribunaux et autres organismes d'Etat auxquels, conformément à l'article 6 de la Convention, les victimes d'actes de discrimination doivent pouvoir s'adresser pour obtenir la sanction et la réparation effectives de ces agissements. La délégation a reconnu avec franchise qu'il n'existait pas de procédure ou de système assurant une protection contre la discrimination raciale. Il y a là une lacune à combler. Aux renseignements sur les textes eux-mêmes, il conviendra d'ajouter des données sur le nombre de plaintes, de poursuites et de condamnations prononcées par les tribunaux et sur les mesures prises pour permettre aux autorités judiciaires d'exercer leur mission en toute indépendance et en toute sécurité. A cet égard, en dépit des indications données au paragraphe 8 du neuvième rapport, on est fondé à penser d'après les informations provenant des ONG que persistent une certaine paralysie de la justice, des ingérences ou pressions du Gouvernement et de l'armée, des menaces contre les magistrats, des cas de corruption judiciaire et enfin une pénurie de moyens et un manque de formation du personnel judiciaire, tous facteurs qui expliqueraient le phénomène de l'impunité.

25. Le troisième type d'information à fournir concerne les mesures prises conformément à l'article 7 de la Convention pour aider les communautés ethniques aux plans culturel, éducatif et social et pour promouvoir l'éducation en matière de lutte contre la discrimination raciale. Le Comité souhaiterait notamment obtenir des apaisements au sujet du harcèlement et même de l'interdiction dont les membres de la "Campagne civique nationale" seraient victimes.

26. Pour conclure, M. de Gouttes conseille aux autorités tchadiennes chargées de rédiger le prochain rapport de faire appel à l'assistance technique offerte au titre du programme de services consultatifs et d'assistance technique du Centre pour les droits de l'homme. En outre, étant donné l'excellence de l'exposé oral qui a été fait devant le Comité, il demande si la délégation ne pourrait pas faire reproduire et distribuer son texte.

27. M. AHMADU félicite la délégation tchadienne pour l'excellence de son exposé oral très riche en informations sur la situation générale du pays, sa situation démographique et la répartition ethnique de la population, et qui témoigne de la volonté du Tchad de mettre en oeuvre les dispositions de la Convention. Il serait très utile que le texte de cet exposé soit reproduit, traduit et distribué. Par ailleurs, M. Ahmadu souscrit à la proposition formulée par M. De Gouttes au sujet de la fourniture d'une assistance technique au Tchad. Il rappelle que son pays, le Nigéria, est voisin du Tchad, et que les chefs d'Etat des deux pays se rencontrent et aspirent à des idéaux communs. Il serait bon que ces deux pays tentent de coordonner leurs politiques pour résoudre des problèmes humains et économiques.

28. Mme SADIQ ALI remercie également le représentant du Tchad pour son exposé oral bien documenté. Elle aimerait toutefois avoir des précisions sur trois points. Elle souhaiterait savoir tout d'abord si le débat national sur le projet de constitution a abouti et, deuxièmement, si des mesures ont été prises suite aux préoccupations exprimées par la Ligue tchadienne des droits de l'homme (LTDH) et l'Association tchadienne de promotion et de défense des droits de l'homme (ATPDDH) au sujet du retard pris dans l'application de la mesure d'amnistie générale récemment décrétée, des nombreuses violations des droits de l'homme et des arrestations arbitraires qui se poursuivent dans le pays, ainsi que des actes de violence commis à l'encontre de civils dans le sud par l'armée. Enfin, Mme Sadiq Ali demande des informations sur les menaces proférées dans un tract par des fondamentalistes islamiques à l'encontre de la communauté sara de la ville d'Abeche.

29. M. VALENCIA RODRIGUEZ remercie la délégation tchadienne pour son exposé oral dont le texte devrait être incorporé dans le prochain rapport périodique du Tchad. Il remercie également M. De Gouttes pour son analyse exhaustive de la situation au Tchad. La présence de la délégation tchadienne témoigne de la volonté du pays de renouer le dialogue avec le Comité et de mettre en oeuvre les dispositions de la Convention. Le Tchad a traversé une période très difficile et sanglante marquée par de nombreuses violations des droits de l'homme et il convient donc de se féliciter de le voir s'engager dans la voie de la démocratisation; il faut espérer à cet égard que les mesures mentionnées au paragraphe 8 du rapport seront maintenues et poursuivies. M. Valencia Rodriguez note également avec intérêt que le Tchad a ratifié plusieurs conventions, chartes et instruments relatifs à la protection des droits de l'homme. La ratification de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale est d'autant plus importante que le Tchad compte une population de 6 millions d'habitants composée de nombreux groupes humains de diverses religions. En conclusion, M. Valencia Rodriguez exprime l'espoir qu'une fois rétablie la stabilité institutionnelle, le Tchad sera en mesure de s'acquitter de toutes les obligations qui lui incombent en vertu de la Convention.

30. M. FERRERO COSTA remercie la délégation tchadienne d'avoir renoué le dialogue avec le Comité en lui présentant un rapport oral. Il importe toutefois que le prochain rapport périodique du Tchad soit établi conformément aux principes directeurs concernant la forme et la teneur des rapports adoptés par le Comité. Il serait également utile que le Tchad élabore un document de base qui présente des renseignements de nature générale sur le pays, sa population, la structure politique générale et le cadre juridique général dans lequel les droits de l'homme sont protégés.

31. M. Ferrero Costa souhaiterait avoir des explications sur trois points précis. Il demande tout d'abord si la Charte nationale de transition mentionnée au paragraphe 8 du rapport est toujours en vigueur et si le cadre juridique actuel du Tchad est toujours transitoire. Il serait bon que le prochain rapport contienne des informations détaillées sur le cadre juridique du pays et l'organisation et le fonctionnement des trois pouvoirs de l'Etat. M. Valencia Rodriguez demande également quel est le statut en droit interne des conventions internationales ratifiées par le Tchad. Enfin, il aimerait avoir de plus amples renseignements sur la Commission nationale des droits de l'homme mentionnée au paragraphe 10 du rapport et des précisions sur l'application par le Tchad des articles 4, 5, 6 et 7 de la Convention. Le Comité est conscient de la situation difficile que connaît l'Etat partie et est prêt, au même titre que le Centre pour les droits de l'homme, à collaborer avec lui pour l'aider à mettre en oeuvre les dispositions de la Convention.

32. M. SONG SHUHUA note avec satisfaction que la situation au Tchad s'est progressivement stabilisée depuis 1990. Qu'en est-il de la situation économique ? Y a-t-il eu progrès ou stagnation ? Par ailleurs, il aimerait savoir si le problème de l'emploi a été influencé par l'instabilité politique. Il souhaiterait également avoir des informations sur le partage des pouvoirs de l'Etat et sur l'enseignement dispensé aux divers groupes ethniques.

33. M. DOUMESIRINMBAYE (Tchad) remercie tout d'abord les membres du Comité de la compréhension et de la bienveillance dont ils ont fait preuve à son égard. Faute de temps, il n'a pu aborder dans son exposé oral tous les aspects des problèmes qui préoccupent son pays. M. Doumesirinmbaye fait siennes les observations du Rapporteur et assure le Comité que les réponses à toutes les questions posées ainsi que le texte de l'exposé oral feront l'objet d'un rapport supplémentaire écrit qui lui sera communiqué.

34. Répondant aux questions de Mme Sadiq Ali, M. Doumesirinmbaye dit qu'a été organisée en mars 1993 une Conférence nationale pour recenser pendant plus de deux mois les principaux problèmes du pays. Le Tchad s'est ensuite engagé sur la voie de la démocratie et a décidé d'organiser des élections présidentielles, législatives et parlementaires qui auraient dû se tenir en novembre 1994, mais qui n'ont malheureusement toujours pas eu lieu, du fait des troubles survenus entre-temps. Néanmoins, le gouvernement reste déterminé à organiser ces élections et vient de mettre en place des commissions dites électorales. A l'heure actuelle, certains partis politiques et des organisations basées à l'étranger demandent la réunion d'une table ronde. Quoique réticent, le gouvernement va réunir une nouvelle conférence nationale, et M. Doumesirinmbaye espère que celle-ci ne reviendra pas sur les décisions prises au cours de la première conférence. Il est clair que tous les hommes politiques et tous les citoyens aspirent à la mise en place d'institutions démocratiques définitives dans le pays.

35. Concernant la situation des droits de l'homme et l'amnistie générale, M. Doumesirinmbaye rappelle que, comme indiqué dans le rapport écrit, le Tchad a pris des dispositions pour assurer la protection de tous les droits de l'homme, notamment en ratifiant diverses conventions et en instaurant le multipartisme. En vertu de l'amnistie générale récemment décrétée, toutes les personnes détenues pour délit d'opinion ont été libérées deux mois auparavant. M. Doumesirinmbaye admet qu'il existe des mouvements politico-militaires dans certaines provinces et que les rebelles commettent des exactions, mais il ne pense pas que des militaires aient tiré à vue sur la population. Il espère que la prochaine conférence nationale permettra de mettre un terme aux guérillas qui empêchent le Tchad de se développer. Enfin, à propos de l'incident survenu dans la localité d'Abeche, M. Doumesirinmbaye dit qu'un tract menaçant les Saras, qui sont originaires du sud, de représailles s'ils ne regagnaient pas leur région d'origine, a été effectivement découvert dans le bureau du président du tribunal local. L'affaire a été traitée par le préfet de la localité et n'a pas eu de suite.

36. M. FERRERO COSTA a demandé des précisions sur la charte nationale de transition. La Conférence nationale souveraine organisée en 1993 a mis en place des institutions transitoires pour la période devant précéder la tenue des élections générales, dont on prévoyait alors qu'elles auraient lieu en avril 1994 mais qu'il a fallu, en raison des événements, reporter par deux fois. Ces institutions transitoires consistent, d'une part, en la présidence de la République et, d'autre part, en un Conseil supérieur de transition qui est une sorte d'assemblée nationale provisoire. Ces institutions sont appelées à disparaître lorsque les élections générales (élections présidentielles, élections des membres du Parlement et du Sénat, élections municipales) auront eu lieu; la Charte de transition deviendra alors caduque. En réponse à une autre question de M. Ferrero Costa, M. Doumesirinmbaye indique que les dispositions des instruments internationaux ratifiés par le Tchad l'emportent le cas échéant sur le droit interne.

37. M. NDARANDI (Tchad) précise à ce sujet que la Charte nationale de transition donne aux instruments internationaux la préséance sur la législation tchadienne et qu'en cas d'incompatibilité, c'est la loi interne qui est abrogée.

38. M. DOUMESIRINMBAYE (Tchad) rappelle que M. Ferrero Costa s'est également intéressé à la Commission nationale tchadienne des droits de l'homme : celle-ci a effectivement vu le jour récemment et son président est d'ailleurs actuellement présent à Genève, où il est en rapport avec d'autres organes de protection des droits de l'homme de l'ONU. Enfin, la délégation tchadienne a pris bonne note de la demande de M. Ferrero Costa tendant à ce que l'application des dispositions de l'article 4 de la Convention soit traitée de manière plus approfondie dans le prochain rapport périodique.

39. M. SONG SHUHUA s'est enquis des progrès réalisés par le Tchad : M. Doumesirinmbaye a le sentiment qu'en dépit des vicissitudes et des accidents de l'histoire, son pays est engagé sur le chemin du progrès, ainsi que l'atteste son adhésion à différentes conventions internationales, la création de la Commission nationale des droits de l'homme et la tenue de la Conférence nationale souveraine. Il y a certes parfois des reculs, mais on ne peut parler de stagnation.

40. La situation de l'emploi est certes très préoccupante, ce qui n'est pas étonnant dans un pays extrêmement pauvre qui vient de connaître 30 années de guerre. Pour les jeunes ayant bénéficié d'une formation, la fonction publique semble le seul débouché véritable, car il n'existe pas de secteur privé susceptible de leur offrir des emplois. Dès lors, ce n'est pas seulement dans les zones rurales que l'on trouve beaucoup de jeunes chômeurs, mais aussi dans les villes, et cette situation ne laisse pas d'inquiéter le gouvernement.

41. Il existe au Tchad une séparation des pouvoirs entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Il est vrai que le pouvoir exécutif n'est pas encore issu des élections et que les dirigeants actuels ont accédé au pouvoir par les armes. L'objectif n'en reste pas moins à terme que le pouvoir exécutif sorte des urnes. Le pouvoir législatif est actuellement exercé par le Conseil supérieur de transition, dont les membres ont été élus par les participants à la Conférence nationale souveraine. A la fin de la période de transition, ce conseil sera remplacé par un parlement élu. Enfin, le système judiciaire est calqué sur le système français. Les juges sont nommés par l'exécutif; dès lors, on peut dire qu'il y a séparation mais non indépendance du pouvoir judiciaire, dans la mesure où c'est l'exécutif qui nomme les magistrats.

42. M. NDARANDI (Tchad) précise que le pouvoir exécutif est bicéphale, puisqu'il est exercé par le chef de l'Etat, venu au pouvoir par les armes, mais aussi par le chef du gouvernement, élu par le Conseil supérieur de transition.

43. M. DOUMESIRINMBAYE (Tchad) ajoute que le chef du Gouvernement, s'il est élu par le Conseil supérieur de transition, n'en doit pas moins être nommé premier ministre par le chef de l'Etat. C'est ce dernier qui préside le Conseil des ministres, cependant que le Premier Ministre préside le Conseil de cabinet.

44. Enfin, une dernière question portait sur l'enseignement, eu égard à la diversité des groupes ethniques. M. Doumesirinmbaye précise qu'en vertu de la Charte nationale de transition, les deux langues officielles du Tchad sont le français et l'arabe. Dans les écoles publiques, l'enseignement n'est donc assuré que dans ces deux langues.

45. M. de GOUTTES (rapporteur pour le Tchad) constate que tous les membres du Comité ont rendu hommage à la qualité de la communication orale de la délégation tchadienne, qui a apporté de précieux renseignements concernant les institutions tchadiennes et la composition ethnique du pays, fourni quelques indicateurs économiques et présenté une analyse succincte de l'application des articles 2 à 7 de la Convention. De l'avis général, cet exposé oral constitue un important complément au rapport périodique, et il conviendrait de le faire transcrire et de le distribuer.

46. Certaines questions sont cependant demeurées sans réponse et le Comité espère qu'elles seront traitées dans le prochain rapport périodique du Tchad. En particulier, le Comité aimerait avoir davantage d'informations sur les violations des droits de l'homme persistantes dénoncées par divers organismes des Nations Unies et par des organisations non gouvernementales. Il serait aussi utile d'avoir des renseignements sur ce qu'il en est de l'impunité des auteurs d'exactions et sur les efforts faits pour améliorer le fonctionnement de la justice. Dans le même ordre d'idée, il serait souhaitable d'en apprendre davantage sur la Commission nationale des droits de l'homme ainsi que sur l'application de l'article 4 de la Convention relatif à l'incrimination des actes de discrimination raciale, et sur l'application de l'article 6 de la Convention relatif aux voies de recours offertes aux victimes d'actes racistes. Pour établir un rapport répondant à ces attentes, les autorités tchadiennes pourraient faire appel à l'assistance des services consultatifs du Centre pour les droits de l'homme.

47. Le PRESIDENT remercie la délégation tchadienne pour la qualité de son exposé oral, dont le texte sera reproduit et distribué ainsi que l'ont souhaité les membres du Comité.

48. M. DOUMESIRINMBAYE (Tchad) a été très sensible aux paroles encourageantes que lui ont adressées les membres du Comité. La délégation tchadienne repartira réconfortée et résolue à apporter au Comité tous les éléments d'information qu'il a réclamés. Il compte sur le soutien actif du Comité à son pays.

49. La délégation tchadienne se retire.

QUESTIONS D'ORGANISATION ET QUESTIONS DIVERSES (point 2 de l'ordre du jour) (suite)

50. Le PRESIDENT tient, alors que l'examen de la situation dans les différents pays touche à sa fin, à remercier vivement les rapporteurs pour les pays qui ont fait un travail d'analyse très approfondi, contribuant ainsi considérablement à l'efficacité du travail du Comité.

51. A une prochaine séance, le Comité commencera à examiner des projets de conclusions qui ont été élaborés en groupe de travail et ont déjà fait l'objet de consultations. D'autres projets de textes ont aussi été distribués aux membres du Comité à propos de l'échange de vues qui a eu lieu lors de la réunion commune du Comité et de la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités. Ces projets ne seront pas adoptés selon la procédure habituelle, mais seront officieusement soumis à l'approbation des membres du Comité.

52. En ce qui concerne le Burundi, on se souviendra qu'il avait été convenu que, lorsque le Comité adopterait une décision, et quel qu'en soit le contenu, celle-ci serait immédiatement communiquée au Secrétaire général et au Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, sous couvert d'une lettre rédigée par le Président du Comité. Cette lettre, après avoir été soumise aux membres du Comité, sera envoyée, avec le texte de la décision, avant la fin de la présente session. Si des membres du Comité souhaitent que la même procédure soit adoptée pour d'autres questions, il serait souhaitable qu'ils le fassent savoir au Président.

53. M. WOLFRUM pense que cette procédure pourrait être appliquée au projet de décision qui a été rédigé par un groupe de travail et qui est actuellement soumis à l'approbation des membres du Comité.

54. Le PRESIDENT dit qu'il songeait effectivement à ce texte.

55. M. RECHETOV demande de quel groupe de travail il s'agit.

56. Le PRESIDENT précise qu'il s'agit du groupe de travail composé de MM. Ahmadu, Rechetov et Wolfrum, qui a été chargé à la demande du Bureau de rédiger un projet de décision au sujet de la Bosnie-Herzégovine.

57. M. van BOVEN pensait qu'il s'agissait du groupe de travail présidé par M. Valencia Rodriguez et chargé d'examiner une question confidentielle. La lettre rédigée par ce second groupe de travail va-t-elle faire l'objet d'une discussion ou a-t-elle déjà reçu l'assentiment du Comité ?

58. Le PRESIDENT rappelle qu'au début de la session, et sur proposition de M. Shahi, il avait été décidé de confier la rédaction de ladite lettre à un groupe de travail présidé par M. Valencia Rodriguez et qu'ensuite, le Président s'occuperait de l'acheminer. Le texte rédigé par ce groupe de travail a été communiqué à tous les membres du Comité mais, loin de faire l'unanimité, il a suscité des réactions très diverses. De plus, il semble qu'il ait été diffusé en dehors du Comité en dépit de son caractère confidentiel. C'est pourquoi le Bureau a décidé de prier le Président de rédiger lui-même une lettre et de l'envoyer avec l'assentiment du Comité. Cette lettre a donc été préparée et va prochainement être présentée au Bureau; elle sera officieusement soumise à l'approbation du Comité mais ne fera pas l'objet d'une nouvelle discussion.

59. M. FERRERO COSTA fait entièrement confiance au Président pour ce qui est du contenu de la lettre. Tout ce qu'il souhaite, c'est qu'elle soit envoyée dans les meilleurs délais.

60. Le PRESIDENT dit que c'est bien ainsi qu'il l'entend lui-même.

61. M. de GOUTTES souhaite aborder la question de la déclaration commune du Comité et de la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités. En effet, dans le projet de décision préparé par le groupe de travail composé de MM. Ahmadu, Rechetov et Wolfrum, il y a beaucoup d'éléments qui pourraient être repris dans cette déclaration commune. Par ailleurs, le Comité est saisi, dans une note informelle du Secrétariat, d'une proposition d'action commune avec la Sous-Commission qui a donné lieu à quelques commentaires et observations. M. de Gouttes voudrait savoir où en est la future déclaration commune de ces deux organes.

62. Le PRESIDENT indique que les présidents de ces deux organes travaillent activement à la rédaction de cette déclaration commune et qu'un projet devrait bientôt être soumis au Comité. La note informelle du Secrétariat est à cet égard un document important, qui devrait retenir l'attention des membres du Comité et de la Sous-Commission.

63. M. BANTON rappelle qu'à la session précédente, le Comité l'avait chargé de préparer, avec M. van Boven, un mémorandum destiné à être soumis aux membres du Comité et aux membres de la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités à l'occasion de leur réunion commune; le Comité avait même arrêté l'intitulé de ce mémorandum. MM. van Boven et Banton s'étant acquittés de cette tâche, le mémorandum a été distribué et a fait l'objet d'un amendement pour tenir compte des observations de l'un des membres du Comité. Par la suite, quelques éléments de ce texte ayant apparemment rencontré une certaine hostilité, le Président du Comité a décidé de ne pas distribuer ce document en vue de la réunion commune. Or il semble qu'aux termes de l'article 17 du règlement intérieur du Comité, il n'était pas habilité à prendre une telle décision. Cet incident est inquiétant pour l'avenir du Comité car, à l'avenir, il se trouvera pratiquement dans l'impossibilité de prier l'un de ses membres de préparer un mémorandum de ce genre, nul n'étant sans doute disposé à être traité de la sorte.

64. Le PRESIDENT avait l'intention, avant la fin de la session, de remercier vivement MM. Banton et van Boven des efforts qu'ils avaient déployés au nom du Comité. Il est regrettable que le mémorandum en question n'ait pu être distribué à la réunion commune. Mais loin de bénéficier d'un consensus, ce texte a fait l'objet de propositions d'amendement; certains voulaient en supprimer des passages, cependant que d'autres étaient totalement hostiles à sa diffusion. Quoique bien conscient du contenu de l'article 17 du règlement intérieur, le Président a jugé impossible de faire distribuer un texte aussi important sans le consentement de tous.

65. Le Comité sera très prochainement saisi de projets de conclusions, traduits dans toutes les langues, concernant la Papouasie-Nouvelle-Guinée, la Bosnie-Herzégovine, le Burundi et le Nigéria.

66. M. RECHETOV dit qu'il avait cru comprendre qu'il n'y aurait pas de projet de conclusions en ce qui concerne la Bosnie-Herzégovine, mais que le Comité serait seulement saisi du texte élaboré par le groupe de travail.

67. Le PRESIDENT dit qu'en effet, il s'est mal exprimé; les textes qui seront soumis au Comité ne seront pas tous nécessairement des conclusions; il pourra aussi s'agir de projets de décision.


La séance est levée à 18 h 10.


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