COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME
Soixante-dixième session
COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA PREMIÈRE PARTIE (PUBLIQUE)*
DE LA 1877ème SÉANCE
tenue au Palais Wilson, à Genève,
le vendredi 20 octobre 2000, à 15 heures
Présidente : Mme Medina Quiroga
SOMMAIRE
* Le compte rendu analytique de la première partie (privée) de la séance est publié sous la cote CCPR/C/SR.1877/Add.1.
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 40 DU PACTE (suite)
Quatrième rapport périodique du Danemark (suite)
La séance est ouverte à 15 h 5.
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 40 DU PACTE (suite)
Quatrième rapport périodique du Danemark (suite) (CCPR/C/DNK/99/4; HRI/CORE/1/Add.58; CCPR/C/70/L/DNK)
1. Sur l'invitation de la Présidente, la délégation danoise reprend place à la table du Comité.
2. La PRÉSIDENTE invite les membres du Comité à continuer de poser leurs questions à la délégation danoise.
3. Lord COLVILLE exprime tout d'abord sa satisfaction au Gouvernement danois, par l'intermédiaire de sa délégation, pour la coopération dont il fait preuve à l'égard du Comité en présentant un rapport aussi riche d'informations. Des questions demeurent toutefois à propos de l'application de l'article 9 du Pacte et de l'article 14. Le paragraphe 3 de l'article 9 est rédigé de telle manière qu'il y a une réelle présomption en faveur de l'octroi de la liberté sous caution, alors que la législation danoise ne semble pas aller dans ce sens. En effet, le paragraphe 3 dispose que la mise en liberté peut être subordonnée "à des garanties assurant la comparution de l'intéressé à l'audience, à tous les autres actes de la procédure et, le cas échéant, pour l'exécution du jugement". Le juge qui est appelé à se prononcer sur la liberté sous caution dispose de plusieurs moyens pour faire en sorte que le prévenu se présente bien à l'audience de jugement, qu'il ne commette pas d'autres infractions en attendant d'être jugé et qu'il n'essaye pas d'influencer les témoins ou de faire disparaître des preuves; il peut obliger l'intéressé à résider à une adresse précise, connue de la police, l'astreindre à se présenter régulièrement au poste de police, lui interdire de s'approcher de tel endroit où vivent par exemple des témoins, et ensuite envisager un mécanisme d'ordre financier qui ne prend pas la forme d'un réel dépôt d'argent mais d'une disposition selon laquelle l'intéressé qui ne remplit pas les obligations énoncées risque de devoir acquitter une somme qui est fonction, non pas des moyens financiers, mais de la gravité de l'infraction. Or au Danemark, le juge ne dispose que de deux possibilités : la consignation du passeport, mesure totalement inutile dans un pays de l'Union européenne, et l'obligation de verser une caution, ce qui peut entraîner des discriminations à l'égard de personnes à faible revenu. L'État partie devrait réfléchir à la possibilité de recourir aux autres moyens qui permettent de laisser un prévenu en liberté tout en ayant les garanties voulues.
4. Le deuxième aspect de la législation relative à l'administration de la justice qui, de l'avis de Lord Colville, nécessiterait une actualisation est l'octroi de l'aide juridictionnelle. En effet, les frais de justice sont d'autant plus élevés que le montant de la demande est élevé d'une part, et d'autre part l'aide juridictionnelle doit couvrir les frais de justice, pour satisfaire aux prescriptions du paragraphe 3 d) de l'article 14 du Pacte. La législation danoise ne tient pas compte de la situation relativement nouvelle créée par les actions collectives. En effet, dans le cas d'une action collective, le montant de la demande peut être considérablement plus important que s'il s'agit d'un simple particulier qui engage une action à titre individuel. Il est alors impératif que l'aide juridictionnelle soit disponible pour couvrir des frais très élevés, faute de quoi l'accès à la justice est impossible. Il importe donc de reconsidérer le système d'octroi de l'aide judiciaire pour l'adapter à des modes modernes d'action en justice. Lord Colville espère que la délégation danoise verra dans ses remarques des propositions constructives.
5. M. WIERUSZEWSKI remercie la délégation danoise d'avoir répondu en détail aux questions écrites du Comité et, par son intermédiaire, remercie le Gouvernement de s'acquitter ponctuellement de l'obligation de soumettre des rapports au titre de l'article 40 du Pacte.
6. Quasiment toutes les questions qui se posent pour le Danemark ont déjà été évoquées et il reste pour M. Wieruszewski à demander pourquoi il a fallu tant de temps pour régler les réclamations des Inuits du Groenland qui avaient été déplacés et quel facteur a empêché de parvenir à une solution plus tôt. La lenteur de cette procédure peut avoir une incidence pour d'autres domaines, par exemple dans le contexte de l'avancement des recherches sur le droit groenlandais.
7. En ce qui concerne l'égalité entre hommes et femmes, la délégation a reconnu qu'il y avait encore des progrès à faire pour obtenir une plus grande participation des femmes aux postes de responsabilité dans l'administration et la gestion et aux charges universitaires les plus élevées. Il serait utile de connaître les mesures concrètes qui sont mises en œuvre pour accélérer les progrès dans ce domaine. Comme d'autres membres du Comité, M. Wieruszewski est préoccupé par le taux élevé d'avortements au Danemark.
8. Bien entendu, le Gouvernement danois n'a pas encore une expérience suffisante de l'application de la nouvelle loi sur les étrangers, mais certains éléments du texte lui-même suscitent quelques inquiétudes. C'est le cas du système d'affectation d'un lieu de résidence aux demandeurs d'asile, et on peut se demander ce qui se passe si le demandeur n'accepte pas d'être affecté à telle ou telle région. Il en va de même de l'obligation faite au paragraphe 2 de l'article 34 de la nouvelle loi sur les étrangers de se présenter régulièrement à la police. De telles dispositions requièrent des mécanismes de contrôle et il faudrait savoir si de tels mécanismes ont été mis en place.
9. Enfin, M. Wieruszewski s'associe aux autres membres du Comité qui ont engagé le Gouvernement danois à lever les réserves émises au Pacte; la suppression de ces réserves serait un bon exemple pour les autres pays d'Europe.
10. Mme CHANET dit qu'elle se félicite du dialogue instauré avec la délégation danoise qui est un exemple de ce que le Comité attend des États parties. Sa principale préoccupation concerne la nouvelle loi sur les étrangers, en date du 23 juin 2000, qui comporte plusieurs éléments inquiétants. Ainsi, l'idée d'assurer une "répartition géographique" des étrangers sur le territoire (par. 39 du rapport) est difficilement conciliable avec la liberté de circulation garantie à l'article 12 du Pacte et cette notion de répartition géographique s'applique mal à des individus. Il en va de même du problème de quotas et la délégation a confirmé à la séance précédente que les étrangers sont tenus de demeurer dans la municipalité qui leur a été affectée. Le motif avancé pour justifier un tel système est l'objectif d'intégration, notion qui est en soi dangereuse. Les dispositions faisant obligation de relever les empreintes digitales des étrangers et de procéder à un test ADN sont également contestables. Pour la première, il n'y a pas lieu de s'inquiéter si tout un chacun doit se soumettre au relevé des empreintes digitales mais il faut être sûr que la mesure ne vise pas seulement les délinquants et les demandeurs d'asile. Pour ce qui est des tests ADN en revanche, même si ce n'est pas une obligation, il s'agit d'une incontestable atteinte à l'intégrité de la personne qui constitue en outre une mesure arbitraire parce qu'elle semble imposer un modèle de la famille qui ne reconnaît que les liens du sang et nie les liens affectifs.
11. En ce qui concerne la liberté de religion, Mme Chanet avait demandé lors de l'examen du troisième rapport périodique (CCPR/C/SR.1533) si une contribution au financement de l'Église luthérienne était attendue de tous les citoyens quelle que soit leur religion et elle voudrait savoir si aujourd'hui la situation a évolué et si les athées et les fidèles d'une religion autre que la religion luthérienne peuvent se soustraire au paiement de la partie de l'impôt consacrée au subventionnement de la religion d'État.
12. En ce qui concerne la durée maximale de la détention avant jugement, Mme Chanet croit comprendre qu'une loi récente a abaissé cette durée mais, étant donné qu'il est toujours tenu compte dans la durée de la détention avant jugement de la peine encourue - ce qui est contraire au principe de la présomption d'innocence -, elle souhaite savoir si la loi prévoit toujours une durée indéfinie pour la détention avant jugement dans le cas où la peine encourue est supérieure à 6 ans d'emprisonnement.
13. Enfin, Mme Chanet partage les préoccupations exprimées par d'autres membres du Comité au sujet de l'incorporation du Pacte dans la législation interne et au sujet du maintien des réserves. Il est indiqué dans le rapport que le retrait de la réserve émise à l'article 20 n'était pas d'actualité (par. 202), ce qui n'est pas un argument convaincant. De même, la réserve émise à l'égard du paragraphe 5 de l'article 14, qui garantit le double degré de juridiction, appelle des explications. Il semble que la loi danoise ait été modifiée de façon à prévoir le double degré de juridiction pour certaines infractions, ce qui est un progrès puisque le champ d'application de la réserve s'en trouve restreint, mais il reste encore des cas où le double degré de juridiction ne s'applique pas; Mme Chanet voudrait savoir de quelles infractions il s'agit et quelles sont les juridictions dont les décisions ne peuvent pas être réexaminées par une juridiction supérieure.
14. M. ANDO souhaite lui aussi la bienvenue aux membres de la délégation danoise, dont le nombre atteste le sérieux avec lequel le Gouvernement danois prend ses obligations. Le rapport soumis, qui reprend les observations finales formulées par le Comité à l'issue de l'examen du troisième rapport périodique, est un modèle du genre. C'est donc avec étonnement que M. Ando relève que le Gouvernement danois n'a pas incorporé le Pacte au droit interne alors qu'il l'a fait pour la Convention européenne des droits de l'homme, dont un grand nombre de dispositions sont semblables. Au paragraphe 104 du document de base (HRI/CORE/1/Add.58) il était indiqué que le système dualiste était un facteur qui empêchait d'invoquer des instruments internationaux devant les tribunaux danois, motif que M. Ando comprend mal. Puisqu'il existe une commission chargée d'étudier les avantages et les inconvénients de l'incorporation du Pacte au droit interne, il serait utile de connaître ses conclusions quant aux inconvénients.
15. La nouvelle loi relative aux étrangers pose un certain nombre de problèmes au regard de plusieurs articles du Pacte. L'imposition d'un lieu de résidence peut entraîner une discrimination de fait, discrimination qui est toujours difficile à combattre. Il faudrait savoir quelles mesures concrètes sont prises pour lutter contre une discrimination de fait, ce qui peut également viser les Groenlandais.
16. Au paragraphe 56 du rapport il est question de l'organisation d'une "conférence internationale sur les musiciens dont la liberté d'expression est restreinte par la censure", ce qui ne laisse pas d'étonner; on peut se demander en effet pourquoi il a été jugé nécessaire d'établir une catégorie spéciale pour les musiciens dans le domaine de la liberté d'expression.
17. Enfin, le Comité s'était ému lors de l'examen du troisième rapport périodique de l'utilisation de chiens policiers en tant que mesure de contrainte et les paragraphes 79 et 80 du rapport à l'examen donnent des explications sur ce point. Il reste toutefois à préciser quelle est la nature des "ordres légitimes" pour l'exécution desquels il a été fait usage de chiens policiers dans quatre cas au cours du premier semestre de 1998 (par. 80 du rapport). De même, la façon dont les chiens policiers sont utilisés devrait être exposée.
18. M. BHAGWATI se déclare très satisfait des réponses précises et complètes données par la délégation danoise; le Danemark pourrait à bien des égards être un exemple pour les autres pays. M. Bhagwati s'associe à toutes les préoccupations exprimées par les autres membres du Comité, en particulier au sujet des tests ADN. Il est facile d'affirmer que ces tests ne sont pas obligatoires alors que toute personne qui ne s'y soumet pas sait bien qu'elle risque fort de ne pas être admise dans le pays. De plus, ces tests ne tiennent aucun compte d'autres sortes de relations familiales, qui sont essentielles au regard de l'article 17 du Pacte.
19. La place des instruments internationaux dans le droit interne pose problème. En effet, alors qu'une disposition de la législation nationale incompatible avec le Pacte devrait être abrogée ou frappée d'inconstitutionnalité, il semble que ce ne soit pas le cas au Danemark et que les traités internationaux, dont le Pacte, ne l'emportent pas sur la législation nationale. Deux affaires tranchées par des tribunaux danois illustrent cette anomalie. Dans un cas, il s'agissait d'une convention de l'Organisation internationale du Travail dont le tribunal avait déclaré qu'il n'y avait pas lieu d'en tenir compte vu qu'elle n'était pas incorporée au droit interne, et dans un autre cas il s'agissait du Pacte, écarté par le tribunal pour la même raison. Le fait que la législation nationale prime les dispositions du Pacte représente une violation des obligations contractées par le Danemark lorsqu'il a ratifié le Pacte.
20. En ce qui concerne les demandeurs d'asile, M. Bhagwati voudrait savoir quel est le nombre de demandeurs qui ont reçu le statut de réfugié et de ceux à qui il a été refusé au cours des trois dernières années, de préférence ventilés par race et par nationalité, s'il existe un mécanisme chargé de se prononcer sur les demandes de statut de réfugié et si les décisions sont susceptibles de recours devant une autorité supérieure. Les réponses ne peuvent sans doute pas être apportées à la séance en cours mais pourront l'être par la suite.
21. Au sujet de la violence dans les familles, M. Bhagwati souhaiterait connaître le nombre d'affaires de ce genre qui ont été dénoncées au cours des trois dernières années et quelles mesures le Gouvernement a prises. Enfin, il voudrait des précisions sur l'application concrète de l'article 26 de la loi sur les dommages-intérêts et la responsabilité civile souhaitant connaître le nombre de cas où elle a abouti à l'octroi d'une indemnisation pour violation des droits de l'homme et savoir si elle est applicable aux îles Féroé et au Groenland; si elle ne l'est pas, il faudrait savoir s'il existe des dispositions équivalentes pour les deux territoires.
22. M. LALLAH félicite la délégation danoise d'être venue présenter son rapport moins de cinq ans après l'examen du rapport précédent. Le Danemark devrait servir d'exemple aux pays d'Europe certes mais aussi aux pays du monde entier.
23. En ce qui concerne la loi sur les étrangers, M. Lallah partage les préoccupations des autres membres du Comité. Il comprend certes qu'il est difficile d'assurer l'intégration des étrangers mais si des règles sont imposées dans ce domaine, elles doivent tendre à leur permettre de vivre selon leur mode de vie propre. Or contraindre les étrangers à résider dans une municipalité imposée a pour corollaire inévitable l'application de mesures administratives pour garantir qu'ils y restent et il est nécessaire de savoir quelle forme prennent ces mesures; il peut s'agir par exemple d'un permis. Quoi qu'il en soit, ce genre de dispositions soulève des questions au regard de l'article 12 du Pacte et au regard de l'article 2 car elles risquent d'amoindrir l'exercice de leurs droits par les étrangers.
24. À propos de la liberté de religion, M. Lallah avait déjà soulevé la question du paiement d'un impôt spécial par les fidèles de l'Église luthérienne mais aussi par les fidèles d'autres religions et par les libres penseurs. Il lui avait été répondu que le subventionnement de l'Église luthérienne se justifiait par le fait que cette Église s'acquittait de fonctions d'état civil comme l'enregistrement des naissances, des décès et des mariages. Or ce sont là des activités laïques, qui doivent être accomplies par l'État et il faudrait que le Danemark se dote d'un service public d'état civil.
25. Plusieurs membres du Comité ont souligné le vide juridique dans lequel se trouvent les étrangers qui ont un permis de séjour "toléré". M. Lallah ajoute que cette insécurité juridique s'accompagne sans aucun doute d'une extrême insécurité psychologique et souhaiterait des explications sur les cas dans lesquels l'État décide de "tolérer" ces étrangers, à qui il ne donne pas le statut de réfugié.
26. M. Lallah s'associe aux préoccupations exprimées au sujet de la durée du placement en régime cellulaire et continue de penser que même si la loi l'a ramenée à trois mois, il s'agit d'une mesure difficile à justifier. Enfin, lors de l'examen du troisième rapport périodique, il avait demandé pourquoi les juges des tribunaux de district accomplissaient des fonctions administratives. Il lui a été répondu qu'ils faisaient office de "bailiff" ainsi que d'administrateurs de biens (estate administrators). Ici encore il demande des précisions car il ne voit toujours pas très bien ce que recouvrent ces deux fonctions.
27. M. OLSEN (Danemark) dit en réponse aux préoccupations exprimées par M. Wieruzewski, notamment, que, depuis l'octroi, en 1979, de l'autonomie interne au Groenland, les Groenlandais disposent de la compétence législative pour toutes les affaires les concernant, notamment, mais pas exclusivement, dans les domaines suivants : organisation du système d'autonomie interne, fiscalité, réglementation des échanges et de la chasse, éducation, sécurité sociale, droit du travail, logement, services de police, protection de la nature et environnement, services de santé, fourniture de biens. Le système d'autonomie interne ne vise pas l'assimilation. Il repose sur un parlement au sein duquel les Groenlandais sont largement représentés et un cabinet dont les membres sont tous Groenlandais.
28. M. LEHMANN (Danemark) ajoute que l'affaire des habitants de Thulé est actuellement en cours d'examen devant la Cour suprême et qu'il ne peut pas préjuger de la décision qui sera prise. Il peut cependant donner l'assurance au Comité qu'il sera informé de cette décision une fois que la procédure sera achevée et qu'une aide judiciaire aura été fournie aux habitants de Thulé. Le Premier Ministre en personne a par ailleurs présenté des excuses officielles et en langue groenlandaise, au nom du Danemark, à ces personnes. S'agissant des Iles Féroé, les négociations en vue de la pleine souveraineté sont actuellement en cours entre les défenseurs du système d'autonomie interne des îles et le bureau du Premier Ministre danois. M. Lehmann ne peut personnellement pas en dire plus sur ces négociations très sensibles.
29. M. MIKKELSEN (Danemark) indique que la Commission de réforme du système judiciaire groenlandais a été créée en 1994 avec pour mandat de réviser la totalité du Code pénal, les lois sur l'administration de la justice, la structure des codes et la structure des services de police du Groenland. La Commission a tenu une quinzaine de sessions d'une semaine et elle devrait publier en 2001 un rapport complet de quelque 500 pages, lequel sera traduit en groenlandais et bénéficiera d'une large publicité. Depuis sa création, la Commission a déjà pris un certain nombre d'initiatives pour améliorer la formation des magistrats non professionnels qui assistent, dans les tribunaux locaux, les magistrats professionnels venus du Danemark, faute de personnel qualifié.
30. Mme PUGGAARD (Danemark) a pris note des préoccupations de certains membres du Comité concernant l'incorporation du Pacte dans le droit interne. Elle indique qu'un comité a été créé pour examiner cette question avec attention et que, pour ce faire, il prend notamment en considération les travaux et rapports d'autres pays en la matière. Ce comité a tout naturellement commencé par se pencher sur l'incorporation des instruments régionaux (Convention européenne des droits de l'homme, par exemple) et commence maintenant à envisager l'incorporation d'instruments internationaux. À ce stade, il n'est pas possible de prévoir la décision qui sera prise quant au Pacte, laquelle devrait être rendue publique au printemps 2001.
31. M. LEHMANN fait observer que traditionnellement, le Danemark n'est pas un pays qui bafoue les droits de l'homme. Le fait que les autorités danoises n'aient pas estimé urgent d'incorporer directement les dispositions des instruments internationaux dans la législation interne s'explique en grande partie par le fait qu'elles ont jugé que la législation interne était conforme aux normes internationales. Cependant, les temps changent et c'est ainsi que la Convention européenne des droits de l'homme a été incorporée au droit interne. S'il en est de même pour le Pacte, le Comité ne manquera pas d'en être informé.
32. M. MIKKELSEN (Danemark) dit qu'il faut bien distinguer, s'agissant du régime cellulaire, le régime appliqué aux condamnés exécutant leur peine, qui est imposé pour des raisons de sécurité, du régime appliqué aux personnes en attente de jugement, qui vise à empêcher des suspects d'entraver la recherche de la vérité, notamment en détruisant des preuves ou en influençant des témoins. S'agissant tout d'abord du régime cellulaire appliqué à des personnes en attente de jugement, il indique que de nouvelles dispositions sont entrées en vigueur le 1er juillet 2000 et que celles-ci sont fondées sur la proposition qui avait été faite par le Comité permanent de l'administration de la justice pénale, décrite aux paragraphes 97 à 101 du rapport. Cependant, ces dispositions sont sur certains points plus strictes que la proposition originale du Comité permanent. Ainsi, pour les infractions les plus graves, la durée maximale du régime cellulaire a été fixée à trois mois, et non à quatre, comme suggéré par le Comité permanent. Les possibilités pour les tribunaux de décider d'une prolongation de cette durée maximale ont en outre été réduites. Toute demande d'extension au-delà de trois mois doit ainsi faire l'objet de l'approbation préalable du ministère public. Des règles particulièrement strictes sont par ailleurs applicables pour les moins de 18 ans. Ceux-ci ne peuvent notamment pas être placés en régime cellulaire plus de huit semaines. Quoique cette nouvelle législation soit entrée en vigueur trop récemment pour que les effets puissent en être évalués, les premières statistiques semblent encourageantes. Ainsi, aux mois d'août et septembre 2000, le nombre de personnes en détention avant jugement placées en régime cellulaire a été inférieur de plus de la moitié par rapport à l'année précédente, pour la même période. Depuis le 1er juillet 2000, aucun placement en régime cellulaire de plus de trois mois n'a été enregistré. Le Comité permanent publiera un rapport officiel d'évaluation de cette nouvelle législation après cinq ans de mise en œuvre, c'est-à-dire en 2005. Dès 2001, il présentera en outre des statistiques annuelles au Parlement.
33. M. Mikkelsen précise qu'en ce qui concerne les personnes déjà condamnées, le régime cellulaire est appliqué pour des raisons de sécurité, à titre exceptionnel et dans le respect des principes de la proportionnalité et de l'imposition de la mesure la moins contraignante. En 1999, 733 décisions d'isolement cellulaire ont été prises, généralement pour des durées très courtes (66 % pendant moins de sept jours et moins de 10 % pendant plus d'un mois). Il est néanmoins difficile de fixer une durée maximale étant donné que ce sont des considérations de sécurité qui déterminent l'application d'un tel régime. En ce qui concerne le problème inverse, c'est-à-dire l'impossibilité de s'isoler, la délégation aimerait que le Comité précise sa question.
34. S'agissant de la question relative à la mise en liberté sous caution, la loi sur l'administration de la justice stipule dans son article 765 que les tribunaux doivent, chaque fois que cela est possible, prendre des mesures moins contraignantes que la mise en détention : période de probation, consignes concernant le lieu de séjour ou de travail ou l'utilisation du temps libre, placement dans un établissement spécialisé ou en foyer, obligation de suivre un traitement psychiatrique ou autre, obligation de se présenter périodiquement au poste de police, remise du passeport ou paiement d'une caution, notamment. Par ailleurs, à l'heure actuelle, la loi sur l'administration de la justice ne comprend pas de disposition sur les actions intentées collectivement, mais il est loisible à plusieurs demandeurs de grouper leurs plaintes pour agir ensemble. Si les intéressés bénéficient de l'aide judiciaire, ils sont de fait exemptés des droits de procédure. Le Comité permanent de l'administration de la justice examine la possibilité d'introduire de nouvelles règles concernant l'action collective. En outre, les huissiers, dont les fonctions ne se limitent pas à la signification d'actes judiciaires, sont habilités à faire exécuter les décisions de justice (recouvrement du montant des indemnisations décidées par un tribunal, application des droits de visite, etc.). Les tribunaux chargés des successions et de la liquidation des faillites n'interviennent qu'en cas de litige; c'est à eux qu'il appartient de désigner les administrateurs judiciaires et d'en superviser les activités.
35. M. Mikkelsen indique enfin que les principes énoncés aux paragraphes 19 et 21 du Pacte ont été dûment pris en considération dans l'élaboration des nouvelles dispositions du Code pénal danois concernant l'interdiction d'apparaître entièrement ou partiellement masqué au cours de réunions ou de défilés organisés dans des lieux publics lorsque le but visé est d'empêcher toute possibilité d'identification. Le mémoire explicatif qui accompagne le projet de loi contient des directives très détaillées à l'intention des forces de police et des tribunaux.
36. M. SKIBSTED (Danemark), répondant à la question de M. Ando, rappelle les principes régissant l'utilisation de chiens policiers et indique que la nouvelle série de règles publiées en août 1997 n'exclut pas la possibilité d'utiliser les chiens pour maintenir l'ordre en tant que moyen de ne pas recourir à des mesures plus sévères. En ce qui concerne le traitement des plaintes contre la police, la délégation ne dispose pas d'informations sur les délais d'examen par les procureurs régionaux, mais il ressort des rapports des comités d'examen des plaintes que ces derniers ne prennent généralement pas plus d'un mois pour mener à bien leurs travaux.
37. Mme ANDERSEN (Danemark) dit que l'État partie s'est attaché à examiner toutes les possibilités de lutter contre la traite des personnes. Le Gouvernement danois a notamment organisé plusieurs séminaires et débats publics, qui ont eu un grand retentissement, sur la nécessité d'établir une cartographie du phénomène en vue de renforcer les efforts de la police, de modifier la législation et de venir en aide aux victimes. Par ailleurs, la Ministre chargée des questions de parité entre les sexes, qui est en poste depuis le 1er juillet 1999, a créé une division pour s'occuper des questions d'égalité et un centre d'information a été mis en place. Aucune donnée chiffrée n'est encore disponible sur les problèmes de la violence et de la traite des personnes, mais l'État partie fera rapport de façon détaillée sur ces questions dans un an ou deux.
38. M. MIKKELSEN (Danemark) dit que le Ministère de la justice a demandé en 1999 à tous les commissaires de police de signaler les cas de traite des femmes. À l'heure actuelle, entre vingt et trente affaires ont été jugées ou sont en cours d'examen. Pour lutter plus efficacement au niveau local contre cette forme de criminalité organisée, le Ministère a décidé en consultation avec le Directeur national de la police d'établir un dispositif national de suivi afin d'aider les forces de police dans leurs activités d'enquête, au besoin en autorisant le recours à des mises sur écoute.
39. Mme ANDERSEN (Danemark) dit que le nombre d'interruptions volontaires de grossesse a continué de diminuer depuis 1992 (on est passé à 16 600 avortements en 1998). La même diminution est observée dans le pourcentage de femmes en âge de procréer qui interrompent leur grossesse (12, 9 % en 1998 contre 23,7 % en 1975). Parmi les motifs invoqués pour recourir à cette pratique, l'absence de contraception et l'échec de la méthode suivie reviennent le plus souvent. On constate par ailleurs que les interruptions de grossesse ne sont pas plus répandues chez les adolescentes que chez les femmes adultes. Un groupe d'experts a été chargé de suivre l'application du plan d'action adopté en octobre 1999 pour continuer à faire baisser les chiffres. L'interruption de grossesse est gratuite jusqu'à la douzième semaine. L'avortement médical est également pratiqué. En revanche, l'avortement illégal est très peu répandu.
40. Seuls les couples mariés ainsi que les femmes ou les hommes célibataires agissant en leur nom propre, mais pas en tant que couple vivant en union libre, ont la possibilité d'adopter des enfants. Pour ce qui est de l'accès des femmes aux postes de direction, la situation n'est pas encore très encourageante, même si de façon générale les Danoises ont acquis leur indépendance économique. Plusieurs projets ont été élaborés pour remédier à la situation, notamment par la mise en place de réseaux et de systèmes de parrainage. Le Ministère du travail et le Département chargé des questions de parité entre les sexes s'intéressent à la question. De même, de nombreuses mesures ont été prises pour faciliter l'accès des femmes à l'enseignement supérieur. Des bourses sont spécialement allouées à celles qui poursuivent des travaux de recherche spécialisés. En outre, un comité d'examen des plaintes pour discrimination a été établi pour garantir l'accès à la justice dans le milieu du travail.
41. Par ailleurs, le Danemark s'est inspiré des dispositions relatives à la parité entre les sexes pour élaborer des textes s'appliquant aux minorités ethniques. Une loi sur l'égalité de traitement a ainsi été adoptée. Le principe du partage de la charge de la preuve a été introduit dans la législation concernant aussi bien l'égalité entre les sexes que les minorités. De fait, des mesures sont prises pour lutter contre la discrimination à l'égard des femmes et des minorités non seulement pour faire suite aux directives de l'Union européenne mais aussi parce que tel est le désir du Gouvernement danois.
42. Enfin, Mme Andersen indique que les programmes concernant les formes d'emploi souples sont revus chaque année pour tenir compte de la situation sur le marché du travail. Le Danemark, qui vise le plein emploi, s'efforce d'obtenir le plus grand pourcentage d'actifs.
43. Mme URTH (Danemark) dit que l'Association nationale des municipalités a bien accueilli la décision de transférer de l'État aux autorités locales les responsabilités des mesures d'intégration des étrangers, notamment parce que la loi sur l'intégration s'accompagne d'un ensemble de mesures financières importantes. L'article 45 prévoit en effet que l'État rembourse 75 % des dépenses concernant l'allocation spéciale versée au cours de la période d'insertion, qui peut durer jusqu'à trois ans. Deux études indépendantes ont été réalisées par des cabinets de consultants sur l'application de la nouvelle loi. La première porte sur la perception que les étrangers ont de leur accueil au Danemark et de leur situation du point de vue financier et de celui du logement, notamment, et la seconde contient une analyse de l'organisation des programmes d'insertion. Leurs résultats, qui seront rendus publics en novembre 2000, figureront dans le prochain rapport périodique du Danemark.
44. En 1999, 2 932 réfugiés ont bénéficié des mesures d'intégration (qui relèvent désormais des autorités locales), dont 1 625 ont indiqué précisément dans quelle municipalité ils souhaitaient vivre. Pour la période de janvier à juillet 2000, ces chiffres sont de 1 582 et 848, respectivement. Le Gouvernement considère que les réfugiés doivent rester dans la municipalité à laquelle ils ont été confiés pendant la période d'insertion, si l'on veut assurer le bon déroulement du programme correspondant et faire en sorte que chaque étranger acquière les moyens de participer sur un pied d'égalité à la vie de la société. En ce qui concerne les préoccupations exprimées au sujet de l'article 12 du Pacte, les décisions concernant l'affectation d'étrangers à telle ou telle municipalité sont prises au cas par cas. Lorsque des réfugiés participant à un programme d'insertion demandent à changer de lieu de résidence, la nouvelle municipalité qui les accueille est tenue de poursuivre l'exécution du programme si le changement d'affectation a été décidé pour tenir compte de la situation personnelle des intéressés. En outre, pour faire en sorte que l'application des dispositions concernant le lieu de résidence des étrangers, ainsi que l'octroi, la réduction ou la suppression de l'allocation d'insertion, n'aille pas à l'encontre des droits énoncés dans le Pacte, tant le dispositif de la loi sur les étrangers que le mémoire qui l'accompagne stipulent clairement les règles à respecter afin de proportionner les décisions prises à l'objectif visé, à savoir assurer l'intégration harmonieuse et véritable des intéressés.
45. M. ISENBECKER (Danemark), répondant aux questions qui ont été posées au sujet des demandeurs d'asile, indique que, conformément au paragraphe 1 de l'article 7 de la loi (unifiée) sur les étrangers, un permis de résidence est délivré à un étranger s'il satisfait aux conditions énoncées dans la Convention relative au statut des réfugiés de 1951. Le paragraphe 2 du même article prévoit qu'un permis de résidence peut aussi être délivré à un étranger qui ne satisfait pas à ces conditions mais est considéré comme un réfugié de facto, du fait qu'il est réellement menacé de persécution ou d'un châtiment extrêmement sévère et incompatible avec les traditions danoises s'il retourne dans son pays d'origine. En principe, une personne qui a été victime de tortures peut également obtenir un permis de résidence en qualité de réfugié de facto.
46. Les demandes d'asile sont examinées en premier lieu par le Service danois de l'immigration, qui délivre les permis de résidence si les conditions requises sont remplies. Les cas de refus d'un permis de résidence sont automatiquement portés devant l'Office des réfugiés, qui fonctionne comme une instance d'appel. L'Office est présidé par un juge et comprend des représentants du Ministère de l'intérieur, du Ministère des affaires étrangères, du barreau, ainsi que d'une organisation non gouvernementale (le Conseil danois des réfugiés). Cette composition assure la prise en considération de points de vue très différents. La procédure offre des garanties à peu près identiques à celles d'un organe judiciaire. Par ailleurs, l'Office des réfugiés est une institution indépendante, et le Ministère de l'intérieur ne peut pas intervenir dans les décisions concernant l'asile. Dans la pratique, la loi prévoit que les demandeurs d'asile font des déclarations orales devant l'Office des réfugiés et ont le droit d'être assistés par un avocat. Le nombre des demandes d'asile spontanées qui ont été enregistrées était de 5 893 en 1996, de 5 092 en 1997, de 5 702 en 1998 et de 6 467 en 1999. Les nationalités des requérants sont très diverses, mais les demandes les plus nombreuses, en 1998 et 1999, émanaient de ressortissants de l'Iraq, de la Slovaquie, de la République fédérale de Yougoslavie, de l'Afghanistan et de la Somalie. En 1999, le Service danois de l'immigration a rejeté 2 256 demandes d'asile spontanées; il a accordé le statut de réfugié de facto à 2 360 personnes et a reconnu à 963 autres la qualité de réfugié au sens de la Convention relative au statut des réfugiés de 1951. L'Office des réfugiés a rejeté en deuxième instance 1 244 demandes; il a accordé le statut de réfugié de facto à 258 personnes et a reconnu à 173 autres la qualité de réfugié au sens de la Convention de 1951.
47. En ce qui concerne la question de l'analyse d'ADN à laquelle les étrangers peuvent être soumis, M. Isenbecker précise les cas dans lesquels un permis de résidence peut être délivré à un étranger au titre du regroupement familial, conformément à la loi (unifiée) sur les étrangers. Les paragraphes 1 et 2 de l'article 9 de ladite loi prévoient cette possibilité pour un étranger vivant sous le même toit qu'une personne (époux, concubin du même sexe ou non, etc.), titulaire d'un permis de résidence, pour l'enfant mineur d'une personne résidant au Danemark et, dans certains cas, pour un ascendant direct âgé de plus de 60 ans. Un permis de résidence peut également être délivré à des étrangers ayant des liens de famille étroits avec des personnes qui résident au Danemark. Il peut enfin être délivré à titre exceptionnel. Des membres du Comité ont estimé que les autorités devraient envisager la possibilité d'octroyer un permis de résidence aux étrangers ayant des liens de famille plus lâches avec une personne résidant au Danemark (par exemple, un cousin). En principe, ce type de lien ne donne pas droit à un permis de résidence, sauf si l'étranger vit sous le même toit que son parent éloigné. Dans un cas de ce genre, il n'y a pas lieu d'établir les liens biologiques grâce à une analyse d'ADN, et c'est le critère de la cohabitation qui est retenu. Les conditions dans lesquelles une analyse d'ADN peut être demandée sont énoncées au paragraphe 40 c) de la loi sur les étrangers, et visent à déterminer un lien de famille lorsque ce lien ne peut pas être suffisamment établi par un autre moyen. L'analyse d'ADN constitue, pour l'étranger, une possibilité supplémentaire d'étayer sa requête et d'éviter un refus des autorités chargées des questions d'immigration. M. Isenbecker précise que 12 000 décisions ont été rendues au titre du regroupement familial en 1999, mais une analyse d'ADN n'a été demandée que dans une partie des cas. À titre indicatif, pour la seule année 2000, à la date du 7 octobre une analyse d'ADN avait été réalisée dans 365 cas.
48. En ce qui concerne les questions du non-refoulement et du séjour toléré des étrangers, les paragraphes 1 et 2 de l'article 31 de la loi (unifiée) sur les étrangers prévoient des garanties contre le refoulement d'un étranger lorsque celui-ci risque des persécutions dans son pays d'origine. Par ailleurs, le paragraphe 2 de l'article 10 de la même loi prévoit qu'un étranger qui a été expulsé conformément à la loi et est frappé d'une interdiction d'entrer sur le territoire danois peut toutefois obtenir un permis de résidence en qualité de réfugié à moins que des raisons particulières ne s'y opposent. Ces raisons sont énoncées dans le paragraphe 2 de l'article 31 de la loi. Ainsi, le permis est refusé lorsque l'étranger menace la sécurité nationale ou lorsque, après avoir été condamné pour un crime particulièrement grave, il est considéré comme un danger pour la société. Les cas de refus d'un permis de résidence pour l'une de ces deux raisons sont très peu nombreux, et les garanties contre l'expulsion prévues à l'article 31 de la loi s'appliquent en tout état de cause. La loi prévoit encore que dans le cas où la personne doit quitter le territoire national et où elle ne le fait pas de son plein gré, la police est tenue de prendre des arrangements en vue de son départ. Ainsi, l'étranger auquel un permis a été refusé ne peut pas légaliser son séjour, à moins que son cas ne soit réexaminé par les autorités chargées des questions d'immigration, qui réévaluent la situation de l'intéressé à la lumière du droit interne et des obligations internationales du Danemark en matière de droits de l'homme, et peuvent délivrer le permis de résidence. Les frais du séjour "toléré" pendant la période où cette procédure est en cours sont en principe pris en charge par le Service danois de l'immigration, et le requérant peut résider dans un centre d'hébergement pour étrangers durant cette période. S'il a des liens familiaux au Danemark, il est autorisé à mener une vie de famille.
49. En ce qui concerne les mesures privatives de liberté à l'encontre des demandeurs d'asile, qui font l'objet des articles 35 et suivants de la loi (unifiée) sur les étrangers, elles ne sont utilisées que dans le cas où d'autres mesures moins intrusives ne suffisent pas pour assurer la présence de l'étranger au Danemark durant la période où son cas est examiné par les services de police, qui doivent déterminer son identité et reconstituer son itinéraire. Les étrangers ainsi privés de liberté ont le droit d'être assistés par le Conseil danois des réfugiés. La décision du placement en détention incombe aux forces de police, mais le paragraphe 1 de l'article 37 de la loi (unifiée) sur les étrangers prévoit qu'un étranger privé de liberté doit être présenté à un juge dans un délai de trois jours, lequel juge détermine le caractère nécessaire et proportionné de la mesure. La procédure applicable dans le cadre de ce que l'on appelle les "demandes manifestement injustifiées" prévoit des dispositions similaires. Par ailleurs, conformément au paragraphe 2 de l'article 37 de la loi (unifiée) sur les étrangers, le juge désigne un avocat qui agit au nom de l'étranger privé de liberté.
50. Des membres du Comité se sont interrogés sur les dispositions faisant obligation aux étrangers de se présenter régulièrement à la police. Cette obligation a été introduite en 1997 dans le cadre de la modification de la loi sur les étrangers. Ainsi, un étranger peut être tenu de se présenter à la police à des intervalles spécifiés, entre autres, s'il refuse de collaborer à la collecte des données pertinentes pour son dossier de demande d'asile, s'il a eu un comportement violent ou menaçant dans un centre d'hébergement pour étrangers, ou s'il a l'obligation de quitter le territoire mais refuse de collaborer avec la police qui s'efforce de trouver un arrangement pour son départ. Les autorités ont adopté ces dispositions parce qu'elles considéraient inacceptable le fait qu'un étranger refuse de collaborer à la constitution de son dossier ou de quitter le territoire s'il est tenu de le faire, et pour éviter les actes et menaces de violence dans les centres d'hébergement pour étrangers. La personne soumise à une telle mesure peut circuler librement sur tout le territoire danois, mais cette liberté est quelque peu restreinte dans la pratique par l'obligation de se présenter régulièrement à la police. Toutefois, le caractère contraignant de la mesure est négligeable face à la nécessité de gérer les demandes d'asile dans un climat serein et d'éviter les abus de la procédure établie.
51. M. LEHMANN (Danemark) indique que les autorités danoises feront parvenir ultérieurement au Comité des réponses écrites aux autres questions qui ont été posées concernant, entre autres, les conditions de la naturalisation, le placement des personnes souffrant de troubles mentaux et certains aspects des droits des minorités. Toutes ces questions appellent une réflexion approfondie et des réponses précises, que la délégation danoise n'est pas en mesure de fournir sur-le-champ.
52. La PRÉSIDENTE remercie la délégation danoise des réponses extrêmement détaillées qu'elle a apportées sur bon nombre des points soulevés par les membres du Comité. Les représentants de l'État partie ont présenté par ailleurs avec une très grande compétence un excellent rapport, riche de renseignements.
53. Le Comité a été heureux d'apprendre la mise en place d'un comité d'experts chargé d'examiner la question de l'incorporation du Pacte dans la législation danoise. Outre qu'elle permettrait d'améliorer encore une situation déjà très satisfaisante au regard des droits de l'homme, cette incorporation enrichirait la jurisprudence de l'État partie et permettrait d'étoffer les normes internes qui reflètent déjà un processus fort dynamique. D'une façon générale, le Comité constate donc que la situation des droits de l'homme au Danemark est excellente. Fortes de ce bilan, les autorités danoises pourraient offrir un exemple aux autres États en incorporant le Pacte dans le droit interne et en invoquant régulièrement les dispositions du Pacte dans les décisions judiciaires et administratives. Le Pacte a créé en quelque sorte un ordre public international que tous les États parties doivent contribuer à maintenir et à développer, dans la perspective d'une universalisation des normes relatives aux droits de l'homme. Cela étant, le Comité a aussi exprimé un certain nombre de préoccupations, qui seront dûment reflétées dans le texte des observations finales qu'il adoptera au cours de la session en cours et qui sera ensuite communiqué à l'État partie.
54. M. LEHMANN (Danemark) remercie le Comité pour sa coopération avec les autorités de son pays. La délégation danoise se félicite du dialogue qui a eu lieu à l'occasion de l'examen du quatrième rapport périodique, a pris bonne note de l'appel pressant du Comité en faveur de l'incorporation du Pacte dans le droit interne, et attend avec beaucoup d'intérêt le texte des observations finales du Comité. Comme il l'a indiqué, les autorités danoises ne manqueront pas de répondre par écrit sur tous les points qui n'ont pas pu être éclaircis dans la discussion.
55. La PRÉSIDENTE déclare que le Comité a achevé l'examen du quatrième rapport périodique du Danemark.
56. La délégation danoise se retire.
La première partie (publique) de la séance prend fin à 17 h 20.