E

 

Conseil économique
et social

 

 

Distr.

GÉNÉRALE

 

E/C.12/2002/SR.35

10 janvier 2003

 

Original: ANGLAIS

 

 

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Vingt-neuvième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA DEUXIÈME PARTIE (PUBLIQUE)*

DE LA 35e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le jeudi 14 novembre 2002, à 15 heures

Présidente: Mme BONOAN-DANDAN

SOMMAIRE

 

EXAMEN DES RAPPORTS:

 

a)       RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (suite)       

         

Deuxième rapport périodique de la Géorgie

 

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          *        Il n'a pas été établi de compte rendu analytique pour la première partie (privée) de la séance.
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          Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

          Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

          Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

La deuxième partie (publique) de la séance commence à 15 h 40.

EXAMEN DES RAPPORTS :

RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 6 de l'ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de la Géorgie [(E/1990/6/Add.31); document de base (HRI/CORE/1/Add.90/Rev.1); observations finales du Comité sur le rapport initial (E/C.12/1/Add.42); liste des points à traiter (E/C.12/Q/GEO/2); réponses écrites du Gouvernement géorgien (HR/CESCR/NONE/2002/4); profil de pays (E/C.12/CA/GEO/2)]

1.       Sur l'invitation de la Présidente, la délégation géorgienne prend place à la table du Comité.

2.       La PRÉSIDENTE souhaite la bienvenue à la délégation géorgienne et l'invite à présenter le deuxième rapport périodique de l'État partie.

3.       Mme BERIDZE (Géorgie) dit qu'au 1er janvier 2002, la Géorgie comptait environ 4 400 000 habitants, soit un million de moins qu'en 1999. Cette forte diminution est essentiellement due à l'émigration, un grand nombre de personnes étant parties à l'étranger pour échapper aux difficultés économiques. Les recettes fiscales, qui constituent un élément important du budget de l'État, représentent 14 % du produit intérieur brut (PIB). Le Gouvernement souhaite améliorer l'efficacité du système de recouvrement des impôts, qui laisse à désirer. Le taux de chômage était de 11 % en 2001. Il est plus élevé chez les hommes. La faible rémunération du travail fait que le salaire a perdu sa fonction incitative et s'apparente à une sorte d'aide sociale dont le montant n'est pas lié à la quantité ou à la qualité du travail fourni. Pour ce qui est de la protection sociale, on constate une nette augmentation du niveau des prestations et du nombre de bénéficiaires.

4.       Après la grave crise des années 90, la relance économique de 2001 s'est notamment traduite par une augmentation sensible du PIB (de 25 % entre janvier 2001 et juin 2002). Le Gouvernement s'est résolument attaqué au problème de la corruption, qui aggrave considérablement les difficultés auxquelles se heurte le pays. Les perspectives de la Géorgie semblent s'améliorer, même si une grande partie de la population demeure en dessous du seuil de pauvreté.

5.       La PRÉSIDENTE remercie la délégation géorgienne.

Articles 1er à 5 du Pacte

6.       M. MALINVERNI, rappelant la question no 2 de la liste des points à traiter sur le statut des personnes déplacées à l'intérieur du pays, dit que la réponse du Gouvernement géorgien, selon laquelle ces personnes ne pourront exercer tous leurs droits en vertu du Pacte qu'une fois rentrées chez elles, manque quelque peu de réalisme. Étant donné que le conflit entre les autorités géorgiennes et les séparatistes abkhazes dure depuis une dizaine d'années, qu'aucune solution politique ne pointe à l'horizon et que, dans l'intervalle, de très nombreux enfants abkhazes sont nés sur le territoire géorgien, il serait temps d'accorder à ces déplacés un statut équivalant à celui des autres citoyens.

7.       M. MARCHAN ROMERO juge préoccupant que le Service de protection des droits de l'homme soit placé sous l'autorité du Conseil de sécurité nationale et rappelle que les États parties sont tenus de créer des organes de protection des droits de l'homme strictement indépendants.

8.       M. TEXIER demande ce qui est fait concrètement pour lutter contre la corruption et améliorer l'efficacité du système de recouvrement des impôts, afin d'assurer une répartition des ressources plus équitable.

9.       M. SADI souhaite savoir si la corruption entrave également les efforts accomplis par la Géorgie en vue de développer l'économie de marché. Il s'inquiète par ailleurs du non‑respect patent de plusieurs engagements relatifs à la protection des droits de l'homme. Les autorités géorgiennes ayant reconnu publiquement que les normes européennes en la matière n'étaient pas pleinement appliquées, il se demande si les dispositions du Pacte ont plus de chances d'être traduites dans les faits.

10.     M. CEAUSU demande des précisions sur les pouvoirs conférés au Médiateur national élu par le Parlement. Le Médiateur a le droit de dénoncer les faits constituant une violation des droits et libertés de la personne, mais est-il habilité à convoquer les plaignants et les représentants de l'autorité contre laquelle la plainte est dirigée? Combien de plaintes sont-elles déposées chaque année et quelle suite leur est-elle donnée?

11.     M. HUNT demande pourquoi la Géorgie n'a pas encore adopté de plan national de protection des droits de l'homme, comme le Comité le lui avait recommandé dans ses observations finales à propos du rapport initial.

12.     M. AHMED rappelle qu'après avoir séjourné dans le pays, en juillet 2000, le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe a indiqué que le Gouvernement géorgien ne respectait pas les engagements qui avaient été pris un an auparavant, lors de l'adhésion au Conseil. Il se demande dans quelle mesure le Gouvernement tient compte des recommandations et des sujets de préoccupation figurant dans les observations finales du Comité sur le rapport initial, en particulier au sujet du non-paiement des salaires, de l'accès des handicapés au marché du travail, des inégalités et de la violence dont sont victimes les femmes et du nombre croissant d'enfants qui mendient dans les rues et sont enrôlés dans des réseaux criminels.

13.     M. WIMER ZAMBRANO souhaiterait savoir quelles sont les conséquences économiques, sociales et politiques des mouvements de population dont la Géorgie est le théâtre, notamment du fait de la guerre en Tchétchénie.

14.     M. KOLOSOV demande quelles mesures prend le Gouvernement pour prévenir les conséquences négatives que pourraient avoir les privatisations dans le domaine social.

15.     Mme BERIDZE (Géorgie) dit qu'environ 270 000 personnes sont, depuis une dizaine d'années, déplacées à l'intérieur du pays à cause des activités séparatistes menées par les dirigeants autoproclamés des Républiques d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud. Ces personnes n'avaient pas été autorisées à participer aux élections locales de 1998 au motif qu'elles ne résidaient pas de façon permanente là où elles vivaient puisqu'elles attendaient de pouvoir regagner leurs foyers. Face aux protestations qu'avait soulevées cette interdiction, ces personnes ont été autorisées à participer aux élections locales qui ont eu lieu en juin 2002. L'État verse à chaque personne déplacée une allocation d'un montant moyen de huit dollars des États‑Unis par mois afin de les aider à subvenir à leurs besoins. S'il s'agit là d'une somme modique, cela ne représente pas moins un lourd fardeau pour l'État qui ne dispose que de maigres ressources. Le processus de retour des personnes déplacées est bloqué à cause de l'attitude non constructive adoptée par les dirigeants séparatistes dans les négociations sur un règlement politique du conflit.

16.     Dans sa résolution 1393 (2002) du 31 janvier 2002, le Conseil de sécurité de l'ONU a réaffirmé le principe de l'intégrité territoriale de la Géorgie et a souligné que le statut politique de l'Abkhazie ne peut être défini qu'au sein de l'État géorgien. Dans sa résolution 1427 (2002) du 29 juillet 2002, il appuie résolument les efforts faits par le Secrétaire général et son Représentant spécial, avec l'aide que leur apportent la Fédération de Russie ainsi que le Groupe des Amis du Secrétaire général et l'OSCE pour favoriser la stabilisation de la situation et parvenir à un règlement politique d'ensemble qui doit porter notamment sur le statut politique de l'Abkhazie au sein de l'État géorgien. Il regrette que le lancement de négociations sur le statut politique n'ait pas progressé et souligne à nouveau que le processus de négociation qui doit aboutir à un règlement politique durable, acceptable par les deux parties, exigera des concessions de la part de l'une et de l'autre. Le Gouvernement géorgien espère que cette résolution aura des conséquences positives. Il est pour sa part prêt à négocier et à octroyer à l'Abkhazie une large autonomie à l'intérieur de la Géorgie, dans le respect de l'intégrité territoriale du pays. Un tel règlement permettrait aux personnes déplacées de regagner leurs foyers.

17.     M. NALBANDOV (Géorgie) dit que le Défenseur du peuple (Médiateur) ne dispose pas d'un pouvoir directif, mais que ses recommandations sont en règle générale suivies d'effet. Dans le cas contraire, le Médiateur cite, dans le rapport qu'il remet au Parlement, le nom des responsables ou des organes qui ont refusé de mettre en œuvre ses recommandations et le Parlement prend alors des mesures à leur encontre. En cas d'urgence, le Médiateur peut saisir directement le Président, qui prend sans délai les mesures qui s'imposent pour rétablir les droits qui ont été violés.

18.     Parmi les autres organes chargés de protéger les droits de l'homme, il convient de citer la Commission parlementaire de protection des droits de l'homme, qui est chargée d'examiner les requêtes émanant de particuliers, la Commission parlementaire de l'intégration civile, qui traite plus particulièrement les questions relatives aux minorités nationales ou religieuses, ainsi que l'assistant du Président chargé des questions concernant les minorités.

19.     Mme BERIDZE (Géorgie) dit que le Gouvernement géorgien élabore actuellement différents plans nationaux visant à protéger les droits de l'enfant, à améliorer la situation des femmes, à combattre la violence, à lutter contre la traite des êtres humains et à éliminer la discrimination raciale. Il est envisagé de regrouper tous ces plans d'action dans un plan d'action unifié de défense des droits de l'homme.

20.     M. NALBANDOV (Géorgie) dit que les instruments internationaux ratifiés par la Géorgie font partie intégrante du droit interne et que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels peut être directement invoqué devant les tribunaux, ce qui ne s'est jamais encore produit. Il convient d'indiquer à ce propos que les magistrats doivent, dans le cadre de leurs études, passer un examen qui porte sur les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Le Gouvernement entend mener des campagnes d'information visant à mieux faire connaître ces instruments, notamment le Pacte, aux citoyens.

21.     Mme BERIDZE (Géorgie) précise à ce propos que les recommandations formulées par le Comité à l'issue de l'examen du rapport initial de la Géorgie ont été publiées dans la presse et qu'il en a été rendu compte à la radio et à la télévision. Nombre de ces recommandations sont appliquées. C'est ainsi, par exemple, que les salaires et les pensions sont désormais versés en temps voulu et que les intéressés reçoivent peu à peu les pensions et les salaires qu'ils n'avaient pas perçus entre 1998 et 2000.

22.     Environ 7 000 personnes, des femmes, des enfants et des hommes blessés, se sont réfugiés en Géorgie à la suite du déclenchement de la deuxième guerre de Tchétchénie. Bien qu'elle compte déjà quelque 280 000 personnes déplacées à l'intérieur du pays, la Géorgie les a accueillis et les a installés dans la vallée de Pankisi. La situation s'étant peu à peu dégradée à cause notamment du trafic de stupéfiants et des enlèvements, les autorités ont dû y mener des opérations afin de rétablir l'ordre. Il reste aujourd'hui quelque 2 500 réfugiés tchétchènes dans les gorges de Pankisi, principalement des enfants, des femmes et des hommes âgés, qui espèrent pouvoir regagner leur foyer dès que la situation le permettra. Malgré les maigres ressources dont elle dispose, la Géorgie les aide de son mieux.

23.     Mme BARAHONA RIERA demande ce qui est prévu dans le Plan d'action national pour améliorer le statut de la femme et quels sont les obstacles qui en entravent sa mise en œuvre. Ce plan inclut-il une réforme juridique en faveur de l'égalité entre hommes et femmes?

24.     M. SADI souhaite savoir ce que sont devenus les réfugiés qui ont quitté le territoire de la Géorgie et, en particulier, s'ils ont été expulsés. Il demande en outre si les réfugiés qui sont restés en Géorgie jouissent de droits économiques, sociaux et culturels, s'ils ont notamment accès aux soins de santé et exercent leur droit au travail, et si leurs enfants sont scolarisés.

25.     Mme BERIDZE (Géorgie) dit que le principe de l'égalité entre hommes et femmes est appliqué dans tous les domaines - éducation, travail, prestations sociales, droits et obligations. Le 22 septembre 1994, la Géorgie a adhéré à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Le 20 février 1998 a été instituée une Commission nationale chargée d'élaborer une politique nationale de promotion de la femme, sous l'égide du Président. Composée de membres du Parlement, de ministres, de vice-ministres et de représentants d'organisations non gouvernementales (ONG), la Commission est le principal organe de coordination de la politique du Gouvernement. Après les dernières élections présidentielles, sa composition a été considérablement modifiée, mais elle n'en a pas moins poursuivi ses activités pour atteindre les objectifs fixés par le Président dans son décret. L'instrument clef de la mise en œuvre du programme du Gouvernement pour la promotion de la femme est le Plan d'action national, approuvé par décret présidentiel en 1998 et prorogé en 2002 et 2004.

26.     Si les efforts du Gouvernement tendant à instaurer une société égalitaire semblent porter leurs fruits, les femmes ne sont pas toujours suffisamment présentes dans le processus de prise de décisions. Elles sont bien représentées dans l'exécutif et dans le législatif, mais moins présentes dans les collectivités locales - 13,5 % en 2002 contre 25 % en 1998. Dans la perspective des élections qui se tiendront en 2003, certains partis se sont engagés à prendre des mesures pour que les femmes soient mieux représentées au Parlement. Si des dispositions ont été prises pour améliorer la mise en œuvre du Plan d'action national, des difficultés financières, ainsi que la persistance de stéréotypes, nuisent à sa mise en œuvre. De nombreuses ONG s'occupent de la protection des droits de la femme, mais il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine.

27.     Les réfugiés tchétchènes qui ont quitté la Géorgie l'ont fait de leur plein gré et n'ont en aucun cas été expulsés. Parmi eux, certains individus armés ont quitté eux aussi volontairement la Géorgie, car ils s'étaient rendus coupables de détention illégale d'armes, notamment dans la vallée de Pankisi. Les enfants tchétchènes vont à l'école russe et reçoivent une aide économique de la part des organisations internationales. Les droits économiques, sociaux et culturels de ces personnes sont protégés, ainsi que leurs droits civils et politiques.

Articles 6 à 9 du Pacte

28.     M. CEAUSU, au sujet du droit au travail, estime que les informations données par le Gouvernement géorgien donnent une image satisfaisante de la situation, mais les chiffres concernant le chômage sont alarmants. Certes, le Gouvernement géorgien a consenti des efforts louables pour mesurer l'ampleur du problème, trouver des solutions, stimuler la recherche d'un emploi ou d'une formation professionnelle. Néanmoins, la manière d'évaluer l'ampleur du chômage et les critères utilisés dans ce but sont peu éloquents. Pour mieux connaître la situation dans ce domaine, il faudrait disposer de plus d'informations sur l'économie et, notamment, sur les facteurs susceptibles d'entraver l'application du Pacte. À quel stade se trouvent la réforme économique et la restructuration de l'industrie héritées de l'ère communiste? Quels sont les effets de la privatisation? Quelle est l'ampleur des investissements étrangers dans le pays? De quelle manière l'épargne et les investissements productifs sont-ils encouragés? Y a-t-il des projets financés par la Banque mondiale et par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement? A-t-il été mis fin aux monopoles et aux privilèges hérités de l'État communiste, source de corruption et d'obstacles qui empêchent le pays de réaliser les réformes économiques essentielles à son développement?

29.     Concernant le droit au travail, l'on constate qu'en Géorgie, l'agriculture offre encore des moyens de subsistance et permet d'accroître le PIB et de créer des emplois. Quelle est la structure de la propriété agricole et comment est-elle organisée? Envisage-t-on de moderniser le secteur pour accroître la production et les revenus et pour absorber une partie de la main‑d'œuvre disponible? Qu'est-il advenu des terres qui appartenaient aux entreprises d'État? Sont-elles exploitées au bénéfice de la société et de la création d'emplois?

30.     M. TEXIER demande quel est le mode de calcul du chômage utilisé dans le rapport de l'État partie, qui ne semble pas correspondre au mode de calcul du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Il est en outre surprenant d'entendre que le taux de chômage est plus élevé chez les hommes que chez les femmes, alors que, d'après les informations du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, l'on déplore une augmentation de la pauvreté et du chômage pénalisant surtout les femmes, due aux effets différents pour les femmes de la restructuration et de la privatisation de l'économie, à leur confinement dans des secteurs d'emplois et à la persistance de stéréotypes sexistes. Par ailleurs, le PNUD constate une augmentation du nombre des travailleurs «découragés», c'est-à-dire de ceux qui ont abandonné tout espoir de trouver un emploi. Envisage-t-on de tout mettre en œuvre pour éviter que ces personnes n'aillent grossir les rangs de la population se trouvant en dessous du seuil de pauvreté?

31.     Au chapitre des conditions de travail justes et favorables, le montant du salaire minimum ne permet pas à un salarié de vivre décemment. De même, il subsiste une inégalité de salaires entre hommes et femmes. Enfin, la liberté syndicale semble garantie dans les textes de loi. Selon les informations d'ONG toutefois, des défenseurs des droits de l'homme ou des syndicalistes auraient été molestés en 2002. Une attaque a notamment été menée contre les locaux du Liberty Institute. Que fait le Gouvernement pour prévenir ces agressions ainsi que pour poursuivre et sanctionner les coupables?

32.     M. MARTYNOV rappelle que les exigences concernant le salaire minimum doivent s'appliquer au secteur public comme au secteur privé, et que le contrôle de leur mise en œuvre doit être effectué par le fisc et l'inspection du travail. Ces inspections permettent-elles de garantir le respect de ces exigences? Quel est le nombre d'inspecteurs du travail et quelles sont leurs attributions? Peuvent-ils saisir les autorités en cas de non-respect de ces exigences?

33.     Par ailleurs, l'on constate une baisse en 1999, par rapport à 1998, des dépenses sociales de l'État, en termes absolus et comparés, qui se répercute sur le volume des pensions de retraite. Est-elle due à une mauvaise collecte de l'impôt ou à une politique délibérée du Gouvernement pour réduire le rôle de l'État dans ce domaine? En outre, le rapport de l'État partie signale qu'une forme de soutien est fournie depuis 1997 à des catégories de la population défavorisées, dans le cadre d'un programme du Gouvernement, alors que, dans le même temps, le financement de l'État ne cesse de diminuer depuis l'adoption de ce programme. Enfin, constatant que la moyenne mensuelle des pensions de retraite semble suivre la baisse des prestations versées aux personnes sans travail, M. Martynov aimerait en connaître les raisons.

34.     M. WIMER ZAMBRANO souhaiterait que la délégation réponde de manière plus précise à la question no 19 de la liste des points à traiter et en particulier indique quelles sont les conditions requises pour l'exercice du droit de grève et comment concrètement s'organise une grève. Notant que, dans les réponses écrites, le Gouvernement géorgien dit que les citoyens géorgiens ont exercé leur droit de faire grève à plusieurs reprises. M. Wimer Zambrano aimerait avoir une idée du nombre de grèves qui ont eu lieu.

35.     M. CEAUSU note qu'il ressort de la réponse à la question no 17 de la liste des points à traiter que l'Inspection nationale du travail rencontre des difficultés pour accéder aux entreprises afin de contrôler les conditions de travail et que la loi sur le contrôle de l'activité entreprenariale actuellement en vigueur est incompatible avec les dispositions de la Convention no 81 sur l'inspection du travail de l'OIT. Puisque la loi en question est une loi nationale, et donc facilement modifiable par les autorités, et vu que beaucoup de situations difficiles sont résolues par décret présidentiel, les autorités compétentes ne pourraient‑elles pas recommander au Président d'adopter un décret en vue de modifier la loi en question et de remédier à la situation actuelle en matière d'inspection du travail?

36.     Par ailleurs, notant que le montant du salaire minimum est de 20 lari alors que le montant mensuel de l'aide sociale pour une personne ne travaillant pas est de 22 lari, M. Ceausu dit que le montant du salaire minimum n'est pas suffisant pour inciter les personnes qui en ont la capacité à travailler. Il juge louable d'apporter une aide aux personnes en difficulté, mais souligne que si, dans le même temps, le salaire ne constitue pas un stimulant pour travailler, le risque existe de seulement partager la pauvreté et de créer un peuple d'assistés. Les autorités géorgiennes devraient réfléchir attentivement à ce problème et envisager de relever le montant du salaire minimum.

37.     Mme BERIDZE (Géorgie) dit que le droit de constituer des associations et, entre autres, des syndicats est un droit constitutionnel, qui est respecté dans le pays. Le litige lié au droit de propriété des syndicats a été résolu par une décision de justice. Par ailleurs, suite aux graves et déplorables attaques dont a été victime le Liberty Institute, le Président a demandé l'ouverture d'une enquête sur les faits commis et l'engagement de poursuites contre les responsables.

38.     Mme KHACHIDZE (Géorgie), répondant aux questions sur l'assurance sociale, explique que les chiffres donnés varient, car à la fois les catégories et le nombre de bénéficiaires de prestations sociales changent. Par exemple, récemment, on a inclus parmi les bénéficiaires de l'aide sociale les enfants handicapés, les aveugles et les familles ayant plus de sept enfants de moins de 16 ans. Un décret présidentiel a en outre étendu le droit de percevoir une aide sociale aux réfugiés et aux retraités vivant seuls. L'autre élément à prendre en compte est le fait que jusqu'en 1999 l'ensemble des crédits de l'aide sociale provenaient du budget de l'État, tandis qu'en 2000 et 2001, 14 régions ont pris en charge une part des montants des prestations sociales. Les prévisions pour le prochain budget reflètent cette volonté de demander aux collectivités locales de participer davantage à l'effort financier en matière d'aide sociale, et les autorités espèrent qu'à l'avenir un plus grand nombre de régions alloueront des crédits pour le financement des prestations sociales.

39.     M. NALBANDOV (Géorgie) estime que le nombre de grèves ayant lieu par an en Géorgie varie entre 15 et 20. Les motifs des grèves sont indiqués dans les réponses écrites du Gouvernement. Les conditions d'exercice du droit de grève sont régies par la loi. Les textes en vigueur respectent tout à fait les obligations internationales qui incombent à la Géorgie. Les grévistes ne sont pas sanctionnés. En outre, les grèves ont en général un retentissement national, car la presse en rend compte largement. Pour cette raison entre autres, les grévistes obtiennent habituellement gain de cause et le Gouvernement ou l'entreprise privée concernée satisfait leurs revendications.

40.     Mme KHACHIDZE (Géorgie) admet qu'il n'est pas très juste qu'une personne qui travaille et une personne qui n'a jamais travaillé reçoivent toutes deux la même somme mensuelle. Le montant des pensions de retraite va de 14 lari pour les personnes ayant peu ou pas du tout travaillé à environ 40 lari pour les invalides et anciens combattants et même jusqu'à 110 lari pour d'autres catégories. Les autorités géorgiennes sont conscientes que l'ensemble du système des retraites et des aides sociales doit être revu. Avec l'aide d'experts de la Banque mondiale, d'organismes internationaux et d'ONG, le Ministère du travail, de la santé et de la protection sociale travaille à l'élaboration de projets de loi sur les assurances sociales et les pensions. Ces projets de loi devraient être examinés par le Parlement dans les mois qui viennent et les dispositions des nouvelles lois devraient entrer en vigueur en 2004. Par ailleurs, en coopération avec la Banque mondiale, les autorités compétentes étudient un projet de réforme sociale axé sur quatre domaines: les pensions de retraite; la politique de l'emploi; le régime d'assurance sociale et de sécurité sociale; et la protection de l'enfance. L'ensemble des mesures prises devrait permettre d'avoir un service d'aide sociale et de pension complet et cohérent.

41.     Mme BERIDZE (Géorgie) indique, en réponse à la question sur la violence à l'égard des femmes, que l'ordonnance no 64 promulguée par le Président prévoit un ensemble de mesures pour lutter contre la violence à l'égard des femmes, y compris au sein de la famille, parmi lesquelles la collecte d'informations en la matière des programmes d'aide aux victimes. Grâce à ce texte, la question de la violence à l'égard des femmes, qui jusque-là était un sujet dont on parlait peu en Géorgie, a été portée à l'attention de l'ensemble de la société. Selon des informations du Ministère de l'intérieur, 7 200 conflits familiaux auraient été résolus avant d'atteindre une extrême gravité. Ces conflits familiaux ont été signalés par les citoyens mais, en règle générale, les intéressés répugnent à porter plainte devant la police. Traditionnellement, les victimes de violences, plutôt que de se tourner vers les autorités publiques, sollicitent l'aide de proches parents, d'amis ou de voisins. Une ONG a ouvert un foyer pour les accueillir, mais ce type de structure ne semble pas correspondre à la mentalité et aux besoins de la population géorgienne.

42.     La question de la traite des êtres humains est aujourd'hui reconnue comme un problème grave. Dans ce domaine on peut considérer que la Géorgie est à la fois un pays d'origine et un pays de transit. Un plan d'action définit les divers éléments de la traite des êtres humains notamment à des fins d'exploitation sexuelle, prévoit la collecte d'informations sur le sujet, et définit les sanctions qu'il conviendrait d'appliquer aux trafiquants. Dans un décret relatif aux mesures à prendre pour renforcer la protection des droits de l'homme, le Président géorgien a chargé le Ministre de la justice d'élaborer un projet d'amendement au Code pénal en vue de criminaliser la traite des êtres humains. Cet amendement sera prochainement soumis au Parlement. Mme Khachidze signale en outre que, les 6 et 7 novembre 2002, s'est tenu à Tbilissi un important séminaire régional sur la traite des êtres humains auquel participaient des représentants des pays du Caucase du Sud, et qui a émis diverses recommandations.

La séance est levée à 17 h 55.

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