Distr.

GENERALE

E/C.12/1999/SR.15/Add.1
19 décembre 1999


Original: FRANCAIS
Compte rendu analytique de la deuxième partie de la 15e séance : Ireland. 19/12/99.
E/C.12/1999/SR.15/Add.1. (Summary Record)

Convention Abbreviation: CESCR
COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS


Vingtième session


COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA DEUXIÈME PARTIE (PUBLIQUE)* DE LA 15e SÉANCE


tenue au Palais des Nations, à Genève,
le mercredi 5 mai 1999, à 10 heures.

Président : Mme BONOAN-DANDAN


SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS:

a) RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (suite)

Rapport initial de l'Irlande (suite)

* Le compte rendu analytique de la première partie (privée) de la séance est publié sous la cote E/C.12/1999/SR.15.


La partie publique de la séance commence à 10 h 45.

EXAMEN DES RAPPORTS

a) RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 8 de l'ordre du jour) (suite)

Rapport initial de l'Irlande (suite) [(E/1990/5/Add.34), document de base (HRI/CORE/1/Add.15), liste des points à traiter (E/C12/Q/IRE/1), réponses écrites du Gouvernement irlandais (HR/CESCR/NONE 1999/1)]

1. Sur l'invitation de la Présidente, la délégation irlandaise reprend place à la table du Comité.

2. La PRÉSIDENTE invite les membres du Comité à poser à la délégation irlandaise des questions supplémentaires sur l'application du Pacte en Irlande.

3. M. AHMED demande si le Gouvernement irlandais a donné suite aux recommandations du Comité des droits de l'homme l'invitant à prendre de nouvelles mesures pour assurer l'égalité des sexes en ce qui concerne en particulier la représentation des femmes parmi les responsables de l'application des lois, les membres de la profession juridique et de l'institution judiciaire (CCPR/C/79/Add.21; E/C.12/CA/IRL/1). Il aimerait également savoir de quelle façon le gouvernement s'efforce d'une part d'améliorer la participation des femmes au gouvernement et à la vie politique où elles sont fortement sous-représentées et d'autre part d'éliminer les inégalités dont les 37 % de femmes employées dans le secteur privé continuent de faire l'objet en matière de rémunération et de promotion? Des crèches et d'autres structures d'accueil sont-elles mises en place afin de permettre aux femmes de travailler dans des conditions acceptables?

4. Il serait en outre intéressant de savoir si la situation a évolué depuis que le Comité des droits de l'homme s'est dit préoccupé par le fait que l'impossibilité d'obtenir le divorce en Irlande ne fait qu'aggraver les difficultés que connaissent les nombreux couples mariés qui, dans la situation actuelle, ne peuvent se séparer et refaire leur vie légalement.

5. M. TEXIER, sachant que la législation irlandaise ne prévoit pas expressément le droit de grève et que les dispositions légales protégeant les dirigeants syndicaux sont fort insuffisantes, aimerait savoir si les grévistes qui participent à un mouvement de revendication s'exposent ce faisant à des sanctions professionnelles directes ou indirectes. De quelles voies de recours disposent-ils pour obtenir l'annulation de telles sanctions? Peuvent-ils s'adresser aux juridictions du travail?

6. Sachant que les policiers et les militaires n'ont pas le droit de se mettre en grève, il serait utile de savoir s'ils ont au moins celui d'adhérer à des syndicats et de constituer des associations.

7. M. Texier aimerait en outre obtenir des précisions sur l'évolution de la question des pensions de retraite, compte tenu du vieillissement de la population et de la baisse de la natalité qui frappent l'Irlande comme la plupart des pays d'Europe. Le gouvernement continue-t-il de favoriser les régimes de retraite par répartition ou compte-t-il instituer des régimes par capitalisation ou des régimes mixtes? Enfin, envisage-t-il d'augmenter le nombre d'années de cotisation exigées aux fins des pensions de retraite?

8. M. MANGAN (Irlande), répondant à une question concernant la formation professionnelle en milieu scolaire, explique que l'enseignement fait une place de plus en plus importante à la formation technique et professionnelle. Une partie des élèves âgés de 12 à 15 ans (26,6 %) fréquentent des collèges d'enseignement professionnel ou des collèges communautaires d'enseignement général (14 %) qui leur dispensent une formation fortement axée sur l'apprentissage de différents métiers ou l'étude des technologies modernes. En 1997, 22 000 élèves se sont présentés aux épreuves du certificat de fin d'études professionnelles et 5 300 autres à celles du certificat de fin d'études appliquées qui sanctionnent la formation dispensée dans ces écoles. Dans la période récente, l'éventail des matières inscrites au programme du certificat de fin d'études professionnelles, qui a été considérablement élargi, inclut notamment le génie, les techniques du bâtiment, le dessin industriel, l'agronomie, l'économie ainsi que diverses disciplines scientifiques classiques. En 1998, le gouvernement a lancé un programme intitulé "Schools Information Technologies 2000" qui est administré par un centre national pour l'enseignement technique doté d'un budget de 55 millions de livres.

9. M. McDONAGH (Irlande) dit que seules les personnes qui ne sont pas des ressortissants d'États membres de l'Union européenne doivent obtenir un permis pour travailler en Irlande et leur demande doit être présentée en leur nom par l'employeur. La plupart des détenteurs de permis de travail sont employés par des organisations internationales ou dans le secteur de l'informatique. Ils viennent d'Amérique du Nord, d'Asie, d'Australie et de pays non membres de l'Union européenne.

10. S'agissant de la mise en œuvre de la réforme des établissements pénitentiaires décidée en 1997, M. McDonagh indique qu'un nouveau conseil consultatif des prisons a été nommé en avril 1999 et qu'un directeur des établissements pénitentiaires sera recruté en mai 1999.

11. M. MANGAN (Irlande) dit que la population active de l'Irlande, 1,5 million de personnes, ne comprend que 40 000 travailleurs migrants du fait que l'Irlande n'est pas traditionnellement un pays importateur de main-d'œuvre. Parmi les travailleurs étrangers, 20 000 viennent du Royaume-Uni, 8 800 de l'Union européenne, 6 600 des États-Unis et 9 300 d'autres pays.

12. L'Irlande connaissait traditionnellement un des taux de chômage les plus élevés de l'Union européenne. Grâce au Plan d'action contre le chômage, le nombre des chômeurs est tombé de 12 % en 1995 à 7,8 % en 1998, puis à 6,8 % au premier trimestre 1999, taux qui est inférieur à la moyenne européenne. De même, la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté (NAPS) lancée en 1997 a permis de ramener le chômage de longue durée à 3,9 % dès 1999, soit avec huit ans d'avance sur l'objectif de 6,5 % qu'il était prévu d'atteindre en 2007 seulement. Pour lutter efficacement contre le chômage de longue durée qui est particulièrement préoccupant, la Stratégie comprend un ensemble de mesures de prévention axées principalement sur les tranches de travailleurs les plus jeunes, notamment un programme national de formation des chômeurs de longue durée lié à la création d'emplois sociaux de proximité en faveur des communautés défavorisées, un programme d'allocations familiales payables indépendamment du fait que les parents aient ou non un emploi, un programme de réinsertion professionnelle comportant diverses incitations et un programme spécial de formation professionnelle.

13. M. McDONAGH (Irlande) explique que les commissions paritaires du travail sont des organes statutaires composés de représentants des organisations syndicales et patronales. Elles fixent les salaires minima que perçoivent environ 10 % des salariés, employés dans des secteurs économiques à bas salaires, où les travailleurs étaient auparavant peu organisés pour mener des négociations salariales. Le système de négociations salariales a permis de donner une nouvelle image de l'économie irlandaise et de réduire le chômage.

14. M. MANGAN (Irlande) dit que le gouvernement compte promulguer un texte de loi sur les salaires minima en 2000. Des groupes d'étude gouvernementaux ont été chargés d'étudier les effets prévisibles de cette mesure sur l'économie et l'emploi, en consultation avec les partenaires sociaux. Une commission nationale sur le salaire minimum a déjà soumis au gouvernement ses recommandations, notamment celle de fixer le salaire minimum horaire à 4,40 livres.

15. En ce qui concerne les allocations en faveur des personnes souffrant d'une incapacité, les incapacités temporaires sont couvertes par les régimes ordinaires d'assurance maladie tandis que les incapacités permanentes relèvent surtout du régime des pensions d'invalidité. Des allocations d'invalidité sont en outre prévues en faveur des non-assurés sociaux souffrant d'une incapacité. Environ 10 % de la population active bénéficie de ces différents régimes.

16. M. McDONAGH explique, en ce qui concerne l'exercice du droit des fonctionnaires de faire grève et de se syndiquer, que les syndicats irlandais sont traditionnellement hostiles, pour des raisons historiques et par souci de préserver leur liberté d'action, à toute législation tendant à réglementer l'exercice du droit de grève. Diverses lois régissant le règlement des conflits du travail ont été néanmoins promulguées en 1990. Elles prévoient notamment que les parties à un conflit du travail peuvent s'adresser à des commissions de conciliation ou aux tribunaux du travail qui sont composés de non-juristes spécialisés dans ce type de conflit. Ces tribunaux sont chargés par ailleurs d'enregistrer les conventions collectives conclues entre les employeurs et les syndicats de salariés, et peuvent rejeter celles qui contiennent des dispositions discriminatoires à l'égard de certaines catégories de travailleurs.

17. M. McDonagh indique que le nombre de femmes dans la vie politique augmente lentement mais régulièrement, même si le gouvernement n'a pas pris de mesures spéciales pour que davantage de femmes occupent des fonctions électives. Il reconnaît que sauf dans la fonction publique, le salaire des femmes est inférieur de 20 % en moyenne à celui des hommes, différence qui n'est justifiée que dans la moitié des cas par une différence de niveau d'instruction. Il précise qu'à l'issue d'un référendum et d'une réforme constitutionnelle, le droit de divorcer a été inscrit dans la loi en 1996.

18. M. McDonagh confirme que les membres des forces de police n'ont pas le droit de se mettre en grève. Toutefois, la loi prévoit qu'ils peuvent désigner par catégories de grades des représentants chargés de mener avec les organes compétents de l'État des négociations sur leurs salaires et leurs conditions d'emploi. De même, les officiers et sous-officiers des forces armées désignent leurs représentants respectifs pour défendre leurs intérêts professionnels face à l'administration.

19. M. MANGAN (Irlande) dit que la baisse rapide du taux de fécondité va entraîner un vieillissement de la population irlandaise en un laps de temps relativement court, ce qui pose la question du financement futur du système de sécurité sociale. Pour l'instant, celui-ci repose sur une pension uniforme de base, constituée par cotisations, et un régime d'aide sociale, entièrement financé par les impôts. Le montant des cotisations est fonction du revenu, mais la pension est calculée sur la base d'un taux uniforme. Le système est très généreux, car même les personnes au chômage ou atteintes d'une longue maladie continuent de bénéficier d'une couverture sociale. Il a été récemment décidé que les femmes qui quittent leur emploi pour s'occuper de leurs enfants ne verront pas non plus leur couverture interrompue.

20. En ce qui concerne le mode de financement de la sécurité sociale, la part des impôts tend à baisser au profit des cotisations. Étant donné la conjoncture économique, d'aucuns pensent que des fonds doivent être mis de côté pour financer les retraites des générations futures. Cela dit, bien qu'il y ait tout un débat sur cette question en Irlande, l'éventualité du relèvement de l'âge de la retraite, actuellement de 65 ans pour les hommes comme pour les femmes, n'est pas encore évoquée. Le Gouvernement irlandais n'en reconnaît pas moins qu'en matière de retraite de nombreux problèmes restent à résoudre. En effet, comme dans la plupart des pays qui privilégient les régimes volontaires, de nombreux salariés des petites entreprises ayant de faibles revenus ne sont pas assurés. Cette question a été examinée par le Comité de supervision des pensions, qui a notamment recommandé que des efforts soient faits pour qu'au moins 75 % des travailleurs soient couverts par des régimes complémentaires. Une autre solution consiste à instituer des plans d'épargne-retraite personnels, mais leur gestion pose un problème.

21. M. SADI est préoccupé par les informations selon lesquelles les handicapés mentaux seraient abandonnés à leur triste sort dans des hôpitaux psychiatriques. Existe-t-il une législation visant à protéger les droits économiques et sociaux de ces personnes, dont certaines peuvent prétendre à un emploi salarié?

22. Mme JIMENEZ-BUTRAGUEÑO demande si les employés du secteur privé qui atteignent l'âge de 65 ans sont obligés de partir à la retraite ou s'ils peuvent continuer à travailler avec l'accord de leur employeur. Elle trouve le système de retraite en Irlande particulièrement compliqué. À cet égard, des limites sont-elles imposées à la pension de base constituée par cotisations et, si oui, quelles sont-elles? Par quelles modalités le gouvernement arrive-t-il à concilier les régimes volontaires et les régimes obligatoires?

23. M. WIMER estime que la délégation n'a pas donné de réponses claires sur le droit de grève, qui est fondamental pour la liberté syndicale. Les mécanismes de négociation entre partenaires sociaux en Irlande sont certes très bons, mais le Comité est davantage préoccupé de savoir dans quelles conditions une grève est jugée légale ou illégale par les autorités.

24. M. CEAUSU relève, au paragraphe 195 du rapport, que pour bénéficier d'une allocation de maternité une salariée doit avoir accumulé au moins 39 semaines de cotisations. Que se passe-t-il si cette condition n'est pas remplie et est-il juste de refuser l'allocation de maternité à une salariée qui n'aura par exemple cotisé que 38 semaines? De même, la pension d'invalidité n'est versée qu'aux personnes totalisant au moins 260 semaines de cotisations. Or, les risques d'accident sont de toute évidence présents dès le premier jour de travail et l'employé devrait donc être couvert dès le début. La délégation peut-elle fournir des informations complémentaires sur un système qui, de prime abord, apparaît bien compliqué?

25. M. GRISSA constate que les taux de mortalité infantile varient beaucoup entre les comtés du pays et demande les raisons de cette disparité. Est-ce parce que les services de protection maternelle et infantile dans certains comtés sont plus développés que dans d'autres?

26. M. PILLAY demande si le régime d'allocations sociales complémentaires a été conçu uniquement pour les demandeurs d'asile ou si tous les Irlandais, hommes et femmes, peuvent y prétendre. Il relève, au paragraphe 90 des réponses écrites, que la politique suivie par les pouvoirs publics a surtout visé à augmenter le montant des prestations sociales pour qu'elles atteignent les taux minimaux recommandés par la Commission de la protection sociale. Or, la pauvreté est généralisée parmi les groupes défavorisés (gens du voyage, familles monoparentales, enfants, personnes âgées, etc.) et le pays compte un grand nombre de sans-abri et de personnes dépendant de l'aide alimentaire. On peut donc se demander si les différentes prestations sociales sont suffisantes au regard des besoins des catégories de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté. Le gouvernement envisage-t-il d'augmenter l'aide sociale pour sortir les groupes défavorisés de la pauvreté?

27. M. MANGAN (Irlande), répondant aux questions relatives à la retraite, dit que l'État n'a pas promulgué de loi fixant l'âge du départ à la retraite, sauf pour ses propres employés. D'une manière générale, l'âge du départ à la retraite est stipulé dans le contrat de travail et se situe entre 60 et 65 ans. Cela dit, les salariés du secteur privé comme les travailleurs indépendants peuvent rester actifs au-delà de l'âge de 65 ans. Ce sera d'ailleurs de plus en plus la tendance, en raison notamment de l'évolution de la main-d'œuvre et du vieillissement de la population.

28. Il existe de nombreux régimes de retraite privés, en vertu desquels le retraité perçoit une proportion donnée de son salaire de fin de carrière, amputée de la pension de sécurité sociale qui lui est versée. Cependant, ce système a suscité un tollé en Irlande car on s'est rendu compte que toute augmentation des prestations de sécurité sociale réduit d'autant la retraite. Une loi devrait être prochainement adoptée pour améliorer ce système.

29. En ce qui concerne les allocations de maternité, M. Mangan précise que les salariées qui n'ont pas accumulé 39 semaines de cotisations, notamment parce qu'elles sont employées depuis peu, reçoivent tout de même des prestations complémentaires. Cette question ne constitue pas un grand enjeu en Irlande car, d'une manière ou d'une autre, la grande majorité des salariées remplissent les conditions requises pour bénéficier d'une allocation de maternité. En ce qui concerne les prestations d'invalidité, les conditions ne sont pas non plus aussi draconiennes qu'on le croit. En effet, si l'accident du travail survient au moment où l'intéressé commence à travailler, celui-ci reçoit pendant une période de six mois une prestation dont le montant est fonction du degré d'incapacité. Lorsque cette période de six mois est écoulée, l'assuré perçoit alors des prestations d'aide sociale.

30. Répondant à M. Pillay, M. Mangan dit que le Gouvernement irlandais a adopté une stratégie de lutte contre la pauvreté qui va au-delà du soutien au revenu pour englober des mesures axées sur la santé, l'emploi, etc. En plus des programmes de lutte contre le chômage, un effort particulier est fait en direction des salariés ayant de faibles revenus et des personnes âgées, dont les femmes constituent une forte proportion. À cet égard, suite à la proclamation par l'ONU de l'Année internationale des personnes âgées, le gouvernement a entrepris de relever les pensions vieillesse et d'apporter une assistance multiforme aux personnes du troisième âge.

31. M. McDONAGH (Irlande), répondant aux questions relatives au droit de grève, dit que les syndicalistes irlandais, méfiants à l'égard de toute loi destinée à réglementer l'action syndicale, ne souhaitent aucune ingérence du législateur dans les modalités de règlement des conflits du travail. On ne peut pas pour autant conclure que le droit de grève n'est pas une réalité et que les syndicalistes ne sont pas protégés en cas de grève. En réalité, les syndicats, leurs dirigeants et leurs adhérents qui prennent part à un mouvement de revendication sont exonérés de la responsabilité civile et pénale.

32. Mme FLETCHER (Irlande) dit que l'aide offerte aux handicapés mentaux est analogue à celle proposée aux personnes souffrant d'un handicap physique ou sensoriel dans le cas des personnes vivant au sein de leur famille ou en résidence médicalisée, qui perçoivent une indemnité d'invalidité complète. Dans le cas des personnes placées en centre hospitalier, les coûts sont pris en charge par l'État et l'indemnité est beaucoup moins élevée. Ces personnes peuvent néanmoins demander à bénéficier de l'indemnité d'invalidité désormais pour les périodes qu'elles passent dans leur famille au cours de l'année. Il est en outre envisagé d'étendre le bénéfice de cette mesure aux personnes résidant de manière permanente dans un centre de soins. S'agissant des services autres que médicaux, notamment les possibilités d'emploi, proposés aux handicapés mentaux, ils couvrent une large gamme de prestations: formation générale et spécialisée, programmes d'insertion, emplois protégés ou non protégés, emplois assistés. Un autre programme destiné en particulier aux personnes vivant en établissement psychiatrique vise à réinstaller les personnes dont on a estimé qu'elles devaient être prises en charge différemment et à répondre à leurs autres besoins, y compris en matière d'accès aux services d'emploi susmentionnés. Une base de données nationale sur les handicaps intellectuels a été créée en 1995 en vue d'évaluer le nombre total et la nature des services spécialisés dispensés au cours d'une année donnée. Il est possible, grâce à cet outil, de se faire une idée du niveau actuel de ces prestations, du nombre de personnes relevant de cette catégorie, ainsi que des besoins pour les cinq années à venir.

33. M. GOODMAN (Irlande) fait valoir que certains chiffres concernant la mortalité infantile doivent être interprétés avec prudence, car lorsqu'un comté est faiblement peuplé, un ou deux cas de décès à la naissance rapportés à quelques centaines de naissances par an pèsent automatiquement plus lourd sur les statistiques. Pour se faire une idée plus juste de la situation, il faut se référer au taux de mortalité infantile pour le pays, qui situe l'Irlande dans la bonne moyenne des pays développés.

34. La PRÉSIDENTE invite les membres du Comité à poser plus tard des questions complémentaires pour des raisons de temps et à passer immédiatement à l'examen des articles 10, 11 et 12 du Pacte.

35. M. HUNT demande si le rapport sur l'application des recommandations de l'Équipe spéciale sur la violence contre les femmes, mentionné au paragraphe 130 des réponses écrites à la Liste des points à traiter, a été publié et quelles conclusions contient-il? Le document sur la loi et les délits sexuels dont il est question au paragraphe 134 des réponses a-t-il eu une suite concrète (recommandations, action)?

36. Les résultats de l'étude sur l'application de la loi sur la violence domestique de 1996 ont-ils été publiés et ont-ils donné lieu à une action? L'Irlande pourrait-elle communiquer d'autres données chiffrées sur l'incidence de la violence domestique en général? Enfin, la loi de 1996 a introduit un certain nombre de dispositions nouvelles. L'Irlande pourrait-elle donner des précisions sur l'application de cette loi – par exemple, nombre d'ordonnances d'interdiction ou de protection rendues par les tribunaux – et sur les résultats de sa politique de lutte contre la violence domestique?

37. À propos de l'article 11, M. Hunt souhaite axer son intervention sur la question de la pauvreté. D'un côté, il juge encourageante la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté (NAPS) adoptée deux ans auparavant par l'Irlande suite au Sommet mondial sur le développement social. D'un autre côté, l'Irlande n'indique pas comment cette stratégie a fonctionné depuis sa mise en place. Des signes de progrès sont-ils déjà perceptibles? Comment la procédure dite d'"épreuve de pauvreté" (évaluation de l'impact des politiques proposées sur la pauvreté) a-t-elle été appliquée dans le cadre des deux budgets adoptés depuis lors? M. Hunt souhaite pour finir faire une observation. Il semble que l'idée de droits fondamentaux soit absente de l'intéressante stratégie de lutte contre la pauvreté adoptée par l'Irlande. Une telle conception aurait pourtant l'avantage d'offrir un cadre normatif par rapport à des questions comme l'égalité, la discrimination et la participation, la transparence et la responsabilité, les indicateurs et critères de la pauvreté. Dès lors, la NAPS ne devrait-elle pas faire référence à la Charte internationale des droits de l'homme?

38. M. RIEDEL aurait souhaité revenir sur la question d'une éventuelle inscription dans la Constitution du droit à l'alimentation, du droit à l'intégrité physique et du droit à la vie, mais il se range à l'avis de M. Hunt et ne s'étendra donc pas sur le sujet. À propos de l'article 12, il souhaite savoir ce qui a été fait pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission sur le statut des personnes atteintes d'incapacités. Une Charte des droits des personnes atteintes d'incapacités est-elle envisagée? Par ailleurs, l'Irlande reconnaît que les handicapés mentaux, en particulier les jeunes, sont une catégorie particulièrement désavantagée de la population. S'il faut se féliciter qu'une politique soit appliquée pour remédier à cette situation et que la part des dépenses consacrées à ce groupe ait été augmentée entre 1997 et 1999, on peut néanmoins regretter qu'aucune réforme législative n'ait été entreprise, en cinq ans, depuis le jugement rendu par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire O'Reilly. Pourquoi l'Irlande n'a-t-elle pas modifié sa législation conformément aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 54 de la Convention européenne des droits de l'homme et des articles 12 et 10.2 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Selon certaines ONG, il arrive que les patients atteints d'incapacité mentale soient transférés d'un établissement à un autre, parfois éloigné, sans l'accord préalable de la famille. L'Irlande pourrait-elle commenter ces informations? S'agissant des périodes d'isolement auxquelles seraient soumis dans les hôpitaux les patients de certains services de psychiatrie, quel est le fondement juridique d'une telle pratique? Les parents ou tuteurs sont-ils associés à la décision? Y a-t-il une forme de contrôle et combien de temps durent ces périodes d'isolement? Enfin et surtout, de quel recours disposent les parents ou tuteurs lorsqu'ils n'approuvent pas les mesures qui sont prises ?

39. Enfin, la situation des prisonniers en ce qui concerne l'état de santé et les soins médicaux suscite une vive préoccupation. Est-il prévu d'inscrire dans le texte révisé de la réglementation relative aux prisons des garanties appropriées et complètes sur le droit à la santé des prisonniers? Le Conseil consultatif des prisons joue-t-il un rôle à cet égard? Existe-t-il des études sur les différences de traitements réservés aux personnes atteintes de maladie grave selon l'origine sociale? Combien de personnes sont-elles inscrites sur les listes d'attente des hôpitaux publics, et leur nombre a-t-il augmenté depuis que le document sur la politique de santé intitulé "Shaping a Healthier Future" (Vers une meilleurs santé) a été publié en 1994? Que fait le Gouvernement irlandais pour remédier à ce problème, au demeurant répandu en Europe? Le gouvernement envisage-t-il d'inscrire le droit à la santé dans la Constitution? À défaut d'un amendement constitutionnel, est-il prévu d'améliorer les recours de droit ordinaires? Deux ans après son adoption, quelle incidence a eu la politique nationale relative à l'alcool? Quelles sont les mesures prises en Irlande pour limiter la publicité sur l'alcool?

40. M. AHMED rappelle qu'en 1998, le Comité des droits de l'enfant s'est déclaré vivement préoccupé par le taux de suicide des adolescents irlandais ainsi que par l'absence de programmes de santé adéquats pour eux (en ce qui concerne notamment l'abus de drogues et d'alcool et les grossesses précoces), estimant qu'il pourrait y avoir un lien entre l'incidence des cas de suicide chez les adolescents et l'augmentation de l'alcoolisme et de la toxicomanie.

Selon deux ONG irlandaises, le taux de suicide pour l'ensemble de la population a été multiplié par cinq entre 1945 et 1995. Le suicide est, à l'heure actuelle, la deuxième cause de mortalité des hommes âgés de 15 à 34 ans, et le taux de suicide est quatre fois plus élevé chez les hommes que chez les femmes. Une politique nationale relative à l'alcool assortie d'un plan d'action a été lancée en 1996. Or, à ce jour, aucune étude ni aucun rapport n'ont été publiés sur la suite donnée aux mesures prévues dans le cadre de cette politique.

41. M. CEAUSU souhaite faire des remarques complémentaires sur les réponses qui ont été données à propos de l'article 9. La délégation irlandaise s'est dite préoccupée par la baisse de la fécondité, qui entraîne à son tour une baisse de la natalité. Or les 39 semaines de cotisation nécessaires pour pouvoir bénéficier de l'allocation maternité ne sont pas de nature à encourager les jeunes femmes nouvellement embauchées à avoir un enfant. Une telle exigence est en contradiction avec les besoins de la société irlandaise. Il estime que les conditions d'obtention des prestations sociales pourraient être améliorées afin de mieux répondre aux besoins de la société irlandaise.

42. Mme JIMENEZ BUTRAGUEÑO demande quelles mesures sont prises, notamment pour les transports en commun, pour faciliter les déplacements des personnes âgées. Existe-t-il des lieux où les personnes âgées seules, qui sont souvent des femmes, peuvent se rencontrer? Le problème de l'alcoolisme touche-t-il également les personnes âgées en Irlande?

43. M. ANTANOVICH est surpris qu'aussi peu d'indications aient été données sur l'efficacité de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. Certes, le chômage des jeunes est passé de 11,9 % à 7,8 % en seulement 18 mois, mais l'objectif général de la NAPS n'est-il pas de réduire la pauvreté des ménages? Des mesures spéciales sont-elles prises en faveur des familles monoparentales et, si oui, avec quels résultats?

44. M. GRISSA demande si l'avortement est toujours illégal en Irlande. Les avortements illégaux constituent un danger pour la santé des femmes et il pourrait y avoir un lien entre le taux de suicide élevé des adolescents, le nombre de grossesses précoces et l'interdiction de l'IVG. M. Grissa souhaiterait avoir de plus amples renseignements sur cette question.

45. La délégation irlandaise se retire.


La séance est levée à 13 heures.

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