Distr.

GENERALE

E/C.12/1994/SR.5
11 mai 1994


Original: FRANCAIS
Compte rendu analytique de la 5ème seance : Romania. 11/05/94.
E/C.12/1994/SR.5. (Summary Record)

Convention Abbreviation: CESCR
COMITE DES DROITS ECONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS


Dixième session


COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 5ème SEANCE


tenue au Palais des Nations, à Genève,
le mercredi 4 mai 1994, à 10 heures


Président : M. ALSTON


SOMMAIRE

Examen des rapports :

a) Rapports présentés par les Etats parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte

(suite) :

Deuxième rapport périodique de la Roumanie concernant les articles 13 à 15 du Pacte

SOMMAIRE (suite)

Organisation des travaux (suite)

Questions diverses

La séance est ouverte à 10 h 20.

EXAMEN DES RAPPORTS :

a) RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES CONFORMEMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 4 de l'ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de la Roumanie, concernant les articles 13 à 15 du Pacte (E/1990/7/Add.14)

1. Sur l'invitation du Président la délégation roumaine composée de MM. Romulus Neagu, Ambassadeur, Représentant permanent de la Roumanie auprès de l'Office des Nations Unies à Genève et chef de la délégation, Alexandru Farcas, Directeur de la Division des droits de l'homme au Ministère des affaires étrangères et Nicolaus Kleininger, Directeur de la Direction de l'enseignement dans des langues des minorités nationales au Ministère de l'enseignement, prend place à la table du Comité.

2. M. NEAGU (Roumanie) appelle l'attention du Comité sur les récents changements survenus en Roumanie dans les domaines économique, social et culturel, dus à l'instauration de la démocratie et à la transition vers une économie de marché.

3. La nouvelle organisation de l'éducation est fondée sur la Constitution, en particulier les articles 30, 31 et 32 dont les dispositions pertinentes figurent dans le deuxième rapport périodique présenté par la Roumanie (E/1990/7/Add.14). Il convient de noter que jusqu'à l'adoption de la loi sur la réforme de l'éducation, qui est actuellement examinée par le Parlement, l'organisation et le fonctionnement de l'éducation pendant l'année scolaire en cours sont réglementés par des décrets. Par ailleurs, la protection des enfants handicapés, y compris l'éducation à domicile, est régie par une loi spéciale adoptée en 1992. S'agissant de la coopération internationale dans le domaine de l'éducation, M. Neagu souligne l'importance des services consultatifs et de l'assistance technique fournis à la Roumanie par le Centre pour les droits de l'homme.

4. En outre, il évoque les activités de recherche et de développement, les programmes scientifiques prioritaires, ainsi que la libre circulation des produits culturels.

5. Il précise que depuis la communication du deuxième rapport périodique, des mesures ont été prises pour réformer l'éducation, tant publique que privée, et pour lutter contre l'analphabétisme. Les renseignements présentés dans ce rapport doivent être complétés avec ceux contenus dans le document de base sur la Roumanie, élaboré conformément à la résolution 45/85 de l'Assemblée générale des Nations Unies et aux "Directives unifiées relatives à la première partie des rapports des Etats Membres" (HRI/CORE/1/Add.13).

6. Le PRESIDENT appelle l'attention sur la liste des questions qui doivent être à l'occasion de l'examen du deuxième rapport périodique de la Roumanie (E/C.12/1994/WP.2) et demande que l'on commence par les sections A et B de cette liste, ainsi conçues :


"I. RENSEIGNEMENTS D'ORDRE GENERAL


A. Territoire et population

1. Prière de fournir quelques renseignements sur le pays et sa population :

a) Structure étatique, organisation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, caractéristiques économiques, sociales et culturelles, compte tenu des réformes mises en oeuvre en Roumanie.

b) Principales caractéristiques ethniques et démographiques de la population, indicateurs socio-économiques tels que le revenu par habitant, les taux de chômage et d'alphabétisation, l'espérance de vie, les taux de mortalité et de fécondité et les pourcentages de la population urbaine et rurale, accompagnés de données statistiques permettant d'évaluer l'évolution de la situation au cours des trois dernières années.


B. Cadre juridique général garantissant la protection

des droits de l'homme


2. Prière de préciser comment le Pacte est incorporé au droit interne. Veuillez indiquer quelles sont les dispositions du Pacte et des divers instruments relatifs aux droits de l'homme auxquels la Roumanie est partie qui peuvent être invoquées devant les instances judiciaires ou les autorités administratives et appliquées directement par celles-ci ?

3. De quels moyens légaux disposent les citoyens roumains pour faire valoir leurs droits, en particulier les droits économiques, sociaux et culturels ?

4. Prière d'indiquer s'il existe des mécanismes chargés de veiller au libre exercice des droits de l'homme, en particulier de ceux énoncés aux articles 13 à 15 du Pacte."

7. M. FARCAS (Roumanie), répondant aux questions écrites figurant dans le document publié sous la cote E/C.12/1994/WP.2, rappelle tout d'abord que la Roumanie a déjà eu l'occasion de présenter des rapports à différents organes des Nations Unies, notamment au Comité des droits de l'homme et au Comité des droits de l'enfant. Le Gouvernement roumain a accordé une grande attention aux conclusions de ces organes et les a largement diffusées dans le pays.

8. S'agissant de la question 1 a), relative à la structure et aux pouvoirs de l'Etat, une nouvelle Constitution, élaborée avec l'assistance des services compétents de l'Organisation des Nations Unies et du Conseil de l'Europe, a été adoptée par le peuple roumain dans le cadre d'un référendum le 8 décembre 1991. L'article premier stipule que la Roumanie est un Etat unitaire et indivisible et que la forme de gouvernement est la République. Le pouvoir législatif consiste en deux chambres élues au suffrage universel pour un mandat de quatre ans. Le Parlement est l'unique autorité législative du pays. Les deux chambres ont les mêmes compétences.

9. La Constitution roumaine s'inspire de celle de la Cinquième République en France, sans en être une copie. Cependant le régime qui en émane n'est pas présidentiel; c'est le Parlement qui détient les pouvoirs les plus importants. Le Président représente l'Etat, veille au respect de la Constitution et au bon fonctionnement de l'administration. Il a un rôle de médiateur entre les différents pouvoirs de l'Etat et entre l'Etat et la société. Elu au suffrage universel, il ne peut se représenter que pour un seul mandat.

10. Le gouvernement est constitué par le parti qui obtient le plus grand nombre de sièges aux élections législatives, après un vote de confiance du Parlement. Le Président peut dissoudre le Parlement, si ce dernier n'accorde pas le vote de confiance à la constitution du gouvernement dans un délai de 60 jours à compter de la première demande, mais seulement après le rejet de deux demandes d'investiture. Le Parlement ne peut être dissous qu'une seule fois durant la même année et ne peut pas l'être non plus dans les six derniers mois du mandat du Président ou pendant un état de siège ou un état d'urgence. Le premier ministre est désigné par le Président, dont le choix doit être approuvé par un vote de confiance du Parlement.

11. En vertu de l'article 119 de la Constitution et des lois d'application connexes, l'administration publique des collectivités locales est organisée selon le principe de l'autonomie et de la décentralisation des services publics. Dans les communes et les villes, les pouvoirs sont exercés par les conseils locaux et les maires élus.

12. Dans le cadre de la réforme du système judiciaire opérée en 1992, les cours d'appel ont été réinstituées. L'article 121 de la Constitution interdit la création de tribunaux d'exception. Les juges sont nommés par le Président de la République, sur recommandation de la Cour suprême. Ils sont indépendants et inamovibles.

13. Abordant la question 1 b), sur les caractéristiques démographiques et ethniques, M. Farcas indique que selon le recensement de janvier 1992, la population roumaine est de 22 755 000 habitants. Les principaux groupes nationaux sont les Roumains (20 408 000), les Hongrois (1 624 000), les Gitans (401 000), les Allemands (119 000), les Ukrainiens, les Russes, les Serbes, les Tatares, les Slovaques, les Bulgares, les Juifs, les Croates, les Tchèques, les Polonais, les Grecs et les Arméniens.

14. L'espérance de vie de la population est passée de 69,76 ans entre 1989 et 1991 à 69,78 ans entre 1990 et 1992. Le taux de natalité est tombé de 11 ‰ en 1991 à 10,9 ‰ en 1993. Durant la même période, le taux de mortalité passait de 10,9 à 11,6 ‰. Le taux de fécondité est tombé de 48,7 ‰ en 1991 à 44,4 ‰ en 1993. Quant au taux de nuptialité, il a suivi la même évolution, passant de 7,9 à 7,1 ‰ durant la même période. Le nombre des sans-emploi (1 164 000 en 1993) a pratiquement triplé par rapport à 1991. En 1993, la population urbaine était de 12 406 000 et la population rurale de 10 349 000 habitants.

15. Présentant quelques indicateurs sociaux et économiques par habitant, M. Farcas signale une augmentation du produit national brut, qui est passé de 950 000 lei en 1991 à 827 000 lei en 1993, ce dernier chiffre devant être appréhendé dans le contexte d'une inflation de 1 000 % en trois ans. La valeur en monnaie locale des exportations par habitant est passée de 184 dollars en 1991 à 215 dollars en 1993 et celle des importations de 250 à 287 dollars. Il y avait en Roumanie 18,2 médecins pour 10 000 habitants en 1991. Leur nombre est tombé à 17 ‰ en 1993. En revanche, le nombre des étudiants est passé de 93 pour 10 000 habitants en 1991 à 159 en 1993.

16. La Roumanie est dotée d'un système d'enseignement organisé pour les personnes handicapées. Le nombre des écoles desservant cette catégorie de la population est passé de 176 en 1991-1992 à 193 durant l'année scolaire en cours, et le nombre d'élèves inscrits de 43 000 à 46 000.

17. La délégation roumaine a établi une longue liste énumérant les dispositions des pactes relatifs aux droits de l'homme qui ont été incorporées à la Constitution et aux lois nationales que les membres du Comité pourront consulter au besoin. Elle se contentera donc de donner quelques exemples.

18. L'article 11 de la Constitution stipule ce qui suit : "L'Etat roumain s'oblige à remplir intégralement et de bonne foi les obligations qui lui incombent en vertu des traités auxquels il est partie" (par. 1); "Les traités ratifiés par le Parlement ... font partie du droit interne" (par. 2). En outre, aux termes de l'article 20 "Les dispositions constitutionnelles concernant les droits et les libertés des citoyens seront interprétées et appliquées en concordance avec la Déclaration universelle des droits de l'homme, avec les pactes et les autres traités auxquels la Roumanie est partie" (par. 1); "S'il y a des non-concordances entre les pactes et les traités portant sur les droits de l'homme auxquels la Roumanie est partie et les lois internes, la priorité revient aux réglementations internationales" (par. 2). Quant à l'article 148, il stipule qu'"aucune révision ne peut être acceptée si elle a pour résultat la suppression des droits et des libertés fondamentales des citoyens".

19. L'article 11 de la Constitution garantit aux citoyens les moyens légaux de faire valoir leurs droits, droits qu'aucune loi ne peut limiter. A cet égard, le Parlement roumain examine actuellement une loi organique visant à créer un poste de médiateur, ce qui devrait renforcer davantage les garanties dont jouit le citoyen.

20. Deux autres dispositions de la Constitution portant sur les droits fondamentaux de la personne et des minorités méritent d'être mentionnées. Il s'agit du paragraphe 2 de l'article 4 ("La Roumanie est la patrie commune et indivisible de tous ses citoyens, sans distinction de race, nationalité, origine ethnique, langue, religion, sexe, opinion, appartenance politique, condition ou origine sociale") et du paragraphe 1 de l'article 6 ("L'Etat reconnaît et garantit aux personnes appartenant aux minorités nationales le droit de préserver, développer et exprimer leur identité ethnique, culturelle, linguistique et religieuse".)

21. Le PRESIDENT appelle l'attention sur les questions de la section suivante de la liste E/C.12/1994/WP.2 :

"C. Information et publicité

5. Prière d'indiquer comment la question des droits de l'homme est traitée dans les programmes scolaires et quelles mesures sont prises aux échelons gouvernemental et non gouvernemental pour sensibiliser le public aux droits énoncés dans le Pacte. Veuillez notamment préciser si le Pacte a été traduit dans les langues qui sont parlées dans le pays.

6. Prière d'indiquer dans quelle mesure le public a été invité à débattre le contenu du rapport présenté."

22. M. FARCAS (Roumanie), répondant à la question 5, indique que des arrangements ont été conclus avec le Centre pour les droits de l'homme pour la fourniture de services consultatifs et d'une assistance financière pour faire connaître le plus largement possible les instruments relatifs aux droits de l'homme. En juillet 1993 a été créé le Conseil pour les minorités nationales, qui est notamment chargé de conseiller le Conseil des ministres. Une somme représentant une part importante du budget de l'Etat est consacrée chaque année aux minorités nationales. Un pourcentage notable de cette somme a été alloué en 1993 à la traduction des instruments internationaux sur les droits de l'homme dans les langues de minorités nationales.

23. En ce qui concerne la question 6, le projet de rapport de la Roumanie a été mis à la disposition des 15 000 organisations non gouvernementales enregistrées dans le pays. Quelques années après le changement de régime intervenu en 1989, la Roumanie arrive à la fin d'une première phase consistant à créer les institutions nécessaires au fonctionnement d'une démocratie pluraliste. Elle a pleinement conscience des efforts à faire pour appliquer les normes internationales en matière de droits de l'homme. Celles-ci sont intégrées à la législation nationale, mais il faut aussi veiller à leur application dans la vie quotidienne.

24. Le PRESIDENT appelle l'attention sur les questions de la liste écrite concernant les articles 13 et 14 :


"II. QUESTIONS RELATIVES A DES DROITS PRECIS


Articles 13 et 14. Droit à l'éducation

7. Le problème de l'analphabétisme a-t-il été résolu en Roumanie ? Sinon, quelles mesures le gouvernement a-t-il prises pour y remédier ? Prière de fournir des données statistiques sur le niveau d'instruction des diverses catégories de la population (population urbaine, population rurale, hommes, femmes, personnes handicapées, minorités nationales, etc.). Prière de fournir des renseignements sur les programmes gouvernementaux destinés à élever le niveau d'instruction de la population.

8. Prière d'indiquer si les lois roumaines garantissent à tous des possibilités égales en matière d'éducation et de préciser s'il existe dans ce domaine des cas de discrimination, notamment en ce qui concerne les minorités ethniques qui vivent dans le pays.

9. Prière d'indiquer s'il est possible de recevoir un enseignement dans des établissements autres que ceux qui sont gérés par les pouvoirs publics. Veuillez en particulier donner des informations sur les établissements d'enseignement privé, s'il en existe, ainsi que sur la législation en vigueur dans ce domaine.

10. Prière de donner des précisions sur l'évolution des dépenses publiques consacrées à l'éducation au cours des trois dernières années, et sur leur importance relative par rapport aux autres postes budgétaires.

11. Prière de fournir des informations sur les traitements des enseignants du secteur public à tous les échelons, et des données comparatives sur les traitements des enseignants et ceux des autres fonctionnaires. Veuillez indiquer quelles sont les mesures prises pour améliorer les conditions de vie et de travail des enseignants.

12. Prière de préciser les rapports entre l'Etat d'une part et les universités et les autres établissements d'enseignement supérieur d'autre part. Quel est le degré d'autonomie des établissements d'enseignement supérieur ?

13. Prière de préciser quelle est l'incidence sur l'éducation des programmes d'ajustement structurel en cours dans le pays."

25. M. FARCAS (Roumanie) présente des données sur l'analphabétisme tirées du recensement de 1992. On compte alors 591 000 analphabètes (environ 132 000 hommes et 458 000 femmes), dont environ 500 000 Roumains, 14 000 membres de la minorité hongroise, 57 000 membres de la minorité rom, 710 membres de la minorité allemande et 4 000 membres de la minorité ukrainienne par exemple. Il y a environ 4 000 analphabètes parmi les enfants de 12 ans et à peu près le même nombre dans chacune des catégories d'âge suivantes (13 ans, 14 ans, 15 ans, 16 ans, 17 ans et 18 ans). Le nombre d'analphabètes augmente sensiblement à partir du groupe d'âge de 50 à 54 ans (35 000), atteint 86 000 pour le groupe des 65 à 69 ans et 167 000 pour les plus de 75 ans. Dans les rapports présentés dans les années 70 et 80, le régime en place affirmait que l'analphabétisme avait été éliminé. Il est clair que la majorité des analphabètes vivent dans les zones rurales et ont plus de 50 ans. On peut rappeler que l'enseignement était théoriquement obligatoire depuis plus de 50 ans. On peut noter la forte proportion d'analphabètes parmi les Roms; le gouvernement tente d'y remédier par des mesures expérimentales telles que la création d'écoles spéciales. C'est surtout l'absentéisme scolaire qui préoccupe le gouvernement. Une des mesures envisagées pour le réduire consisterait à verser par l'intermédiaire des écoles l'allocation de l'Etat auquel chaque enfant a droit jusqu'à 18 ans.

26. M. KLEININGER (Roumanie), répondant à la question 8, rappelle que selon l'article 32 de la Constitution roumaine, le droit des personnes appartenant aux minorités nationales d'apprendre leur langue maternelle et le droit de pouvoir être instruites dans cette langue sont garantis. Il reprend à ce sujet certains éléments d'information donnés aux paragraphes 35 à 38 du deuxième rapport périodique de la Roumanie (E/1990/7/Add.14) concernant l'emploi des langues des minorités nationales dans l'enseignement. On compte en Roumanie environ 29 000 écoles, dont 9,9 % où l'enseignement est dispensé dans des langues de minorités nationales. Pour l'année scolaire 1993-1994, on compte 4,2 millions d'élèves (18,8 % de la population) dont plus de 230 000 (environ 5,5 %) sont des membres de minorités nationales qui suivent un enseignement dans leur langue maternelle.

27. En 1992-1993, sur 1,2 million d'élèves inscrits en première année d'enseignement, 9 000 n'ont pas fréquenté l'école. Jusqu'en 1989 dix années de scolarisation étaient en principe obligatoires. Il n'y a plus au stade actuel de disposition concernant la scolarisation obligatoire, mais un projet de loi sur l'éducation a été soumis au Parlement, et il est probable que la décision sera prise d'imposer huit années d'enseignement obligatoire. Il faut par ailleurs rappeler que l'enseignement public est gratuit, de même que les manuels scolaires qui y sont utilisés.

28. Répondant à la question 9, M. Kleininger dit qu'il existe des écoles privées à tous les niveaux depuis l'école maternelle jusqu'au niveau universitaire. On compte par exemple 60 établissements d'enseignement supérieur privés qui accueillent 100 000 étudiants, soit à peu près la moitié du total des étudiants. Le pourcentage d'étudiants dans la population était très faible avant 1989. Les familles et les jeunes souhaitent maintenant une formation plus poussée.

29. Un Conseil national pour l'évaluation et l'approbation des établissements d'enseignement supérieur tant privés que publics créés après 1989 a commencé ses activités à la fin du mois d'avril 1994.

30. En ce qui concerne la question 10, la proportion du budget de l'Etat consacrée à l'enseignement était de 14,46 % en 1989, de 12,86 % en 1992 et de 14,67 % (soit plus que la proportion consacrée à l'armée) en 1993.

31. Sur la question 11, on peut indiquer par exemple que le salaire mensuel d'un professeur d'université est compris entre 160 000 et 180 000 lei. A titre de comparaison, le salaire minimum en Roumanie est de 60 000 lei, soit environ 40 dollars des Etats-Unis.

32. A propos de la question 12, les établissements d'enseignement supérieur disposent déjà d'un large degré d'autonomie, conformément à la Constitution. Pour le Ministère de l'éducation, l'essentiel est que l'enseignement dispensé soit de qualité.

33. Le PRESIDENT appelle l'attention sur les questions écrites concernant l'article 15 :

"Article 15. Droit de participer à la vie culturelle et de bénéficier du progrès scientifique et de la protection


des droits d'auteur

34. M. FARCAS (Roumanie) indique qu'en 1993 les dépenses publiques consacrées à la culture, au sens strict du terme, c'est-à-dire à l'exclusion de ce qui concerne les sciences et l'éducation, se sont montées à 4 milliards 195 millions de lei, soit 0,37 % du budget de l'Etat. Il convient de préciser que la Roumanie doit actuellement faire face à des difficultés d'ajustement structurel, que tous ses efforts sont tournés vers la création d'une économie de marché et que, dans ce contexte, les institutions culturelles doivent elles aussi être réorganisées, notamment dans le domaine de la gestion.

35. S'agissant du droit de participer à la vie culturelle et de bénéficier du progrès scientifique et de la protection du droit d'auteur, il convient de souligner que la Roumanie a ratifié la Convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques en 1972, la Convention pour la protection du patrimoine mondial culturel et naturel en 1990 et la Convention culturelle européenne en 1991. En outre, le 18 février 1994, le Sénat a voté en faveur de la ratification de la Convention européenne des droits de l'homme et des protocoles additionnels qui s'y rapportent.

36. S'agissant de la protection des droits d'auteur, le Parlement roumain devrait bientôt étudier un projet de loi destiné à remplacer les lois existantes, qui sont déjà très anciennes. Cela étant, il ne faut pas perdre de vue que la Constitution roumaine donne la priorité aux instruments internationaux sur les textes nationaux dans le domaine des droits de l'homme, et donc également dans celui de la protection des droits d'auteur.

37. En conclusion, M. Farcas espère que le Comité ne s'attachera pas uniquement aux problèmes qui subsistent en Roumanie et attire l'attention des membres du Comité sur le fait que la Roumanie est l'un des pays les plus stables de la région et que les conditions préalables à un démarrage économique sont présentes dans le pays. Les progrès que pourrait accomplir la Roumanie dépendent bien sûr des efforts qu'elle saura déployer mais également de la coopération et de l'assistance internationales.

38. Le PRESIDENT invite les membres du Comité à poser s'ils le désirent des questions orales après les réponses de la délégation roumaine aux questions écrites de la liste E/C.12/1994/WP.2.

39. M. SIMMA se félicite de la franchise et de la transparence dont fait preuve la délégation roumaine. Les membres les plus anciens du Comité se souviennent certainement de la présentation du premier rapport périodique de la Roumanie, en 1988, quelque temps avant la chute du régime Ceaucescu. Les informations communiquées par la délégation roumaine n'étaient alors que demi-vérités, propagande et manoeuvres dilatoires. Le Comité ne peut dès lors que se féliciter des changements intervenus en Roumanie.

40. S'agissant du cadre juridique général garantissant la protection des droits de l'homme, M. Simma déplore le fait qu'à aucun endroit du rapport ni à aucun moment de la présentation orale il ne soit fait mention des droits économiques, sociaux et culturels en tant que tels ou des instruments relatifs à ces droits. S'agit-il d'un revirement par rapport à l'époque où certains pays, alors communistes, étaient passés maîtres dans la propagande relative aux droits économiques, sociaux et culturels ? M. Simma souhaite obtenir des informations sur la manière dont les droits économiques, sociaux et culturels sont garantis par la Constitution, ainsi que sur le statut du Pacte dans le droit national.

41. Selon certaines informations, il semblerait qu'une chaire d'enseignement des droits de l'homme ait été créée à Bucarest. Cette information est-elle exacte ? Le poste a-t-il été pourvu ? Dans l'affirmative, selon quels critères le titulaire de ce poste a-t-il été choisi ?

42. S'agissant des minorités, M. Simma reconnaît que le rapport de la Roumanie contient beaucoup d'informations sur les textes et les procédures qui garantissent les droits des minorités, du moins des minorités hongroise et allemande. Cependant, la Roumanie n'a donné aucune information sur la situation des Tziganes. Or, selon de nombreuses sources, il semblerait que ces derniers soient victimes de discrimination et seraient, en réalité, mis à l'écart du système d'enseignement et du monde du travail. La délégation roumaine peut-elle fournir au Comité des informations sur la situation des Tziganes dans le pays ? A cet égard, selon l'organisation non gouvernementale LADO, affiliée à la Fédération internationale des droits de l'homme, il n'existerait en Roumanie aucune loi sur les droits des minorités. Lors de l'adhésion de la Roumanie au Conseil de l'Europe, ce dernier se serait pourtant préoccupé de la question. Une telle loi existe-t-elle ? Si elle n'existe pas, la Roumanie éprouve-t-elle des difficultés à l'adopter ?

43. M. ALVAREZ VITA ne peut imaginer que le problème des minorités, qui s'est posé de manière aiguë par le passé, ait été résolu par un simple changement de régime ou par le passage d'une économie centralisée à une économie de marché. Il faudra de nombreuses années, voire des générations, pour trouver une solution à ce problème. C'est pourquoi M. Alvarez Vita ne peut qu'exprimer un certain scepticisme vis-à-vis des informations communiquées en la matière par la délégation roumaine. La transition d'une économie centralisée à une économie de libre marché a dû avoir des conséquences économiques importantes, notamment dans le domaine de l'éducation. Les minorités ont-elles eu davantage à souffrir de cette situation que le reste de la population ?

44. Comment la liberté d'enseignement fonctionne-t-elle ? Les professeurs de l'époque communiste ont-ils été licenciés ou peuvent-ils continuer à exercer leur activité ? L'enseignement du marxisme est-il actuellement permis en Roumanie ?

45. L'enseignement des droits de l'homme est-il dispensé dans les langues parlées par les minorités ? Quelle est la proportion de professeurs, de parlementaires, de membres du pouvoir exécutif, de membres du pouvoir judiciaire qui appartiennent aux minorités nationales ?

46. Enfin, selon une accusation grave qui a été portée contre la Roumanie, l'avortement, qui a été légalisé après la chute du régime de Ceaucescu, serait particulièrement encouragé dans les zones peuplées par les minorités nationales et des mesures de contrôle de naissance seraient imposées aux Tziganes. Cette information est-elle exacte ?

47. M. GRISSA croit comprendre que la Roumanie est un pays indivisible. Pourtant, lorsque la délégation roumaine évoque la répartition de la population dans le pays, elle utilise les termes de "Roumains, Hongrois, Allemands". Cette formulation pourrait laisser croire que les Hongrois et les Allemands ne sont pas des Roumains, puisque le mot "Roumains" se rapporte au pays lui-même. Il y a là une connotation de discrimination. Ces personnes ont-elles les mêmes droits en matière d'enseignement et d'accès au travail ? Les personnes appartenant aux minorités nationales sont-elles aussi bien représentées dans l'enseignement supérieur qu'au niveau primaire ? M. Grissa souhaiterait, à cet égard, obtenir plus de précisions quant à la répartition de la population scolaire. Enfin, les personnes appartenant à des minorités nationales ont-elles le droit d'utiliser leur langue dans des communications officielles ?

48. Mme VYSOKAJOVA demande à la délégation roumaine des explications plus détaillées en rapport avec la question 11 qui concerne les traitements des enseignants, ainsi que des éléments de comparaison entre les traitements en question et ceux des autres agents de la fonction publique. Elle demande en outre d'indiquer quelles mesures le Gouvernement roumain a prises pour améliorer les conditions de vie et de travail des enseignants.

49. M. TEXIER fait observer que le deuxième rapport périodique de la Roumanie décrit longuement les changements qui se produisent depuis quelque temps, mais reste assez laconique sur les difficultés, forcément nombreuses et de tous ordres, qui surgissent pendant la période de transition. A propos de la première partie du rapport, qui insiste beaucoup sur le fait que l'administration de la justice a subi des changements profonds en 1992, il demande si les juridictions militaires ont conservé le pouvoir de juger des civils pour une vaste gamme de délits qui peuvent aller d'infractions mineures à l'atteinte à la sûreté de l'Etat et aux crimes contre l'humanité. Il demande en outre un complément d'informations sur le rôle de l'"avocat du peuple" et aimerait savoir si ce dernier a pris ses fonctions.

50. En matière de non-discrimination, M. Texier, comme d'autres membres du Comité avant lui, s'étonne de la parcimonie des renseignements fournis sur la minorité tzigane. Selon la délégation roumaine, il n'y en aurait que 401 000 alors que, d'après les chiffres fournis par le secrétariat du Centre, leur nombre estimatif serait de 427 000 selon le recensement de 1992, et de 3 millions selon des Tziganes eux-mêmes.

51. En ce qui concerne l'article 14, M. Texier relève, dans le rapport de la Roumanie, que l'article en question n'est pas applicable à la Roumanie car ce pays n'a jamais administré de territoires autres que son territoire national. Il rappelle que l'article 14 vise à vérifier que la gratuité de l'enseignement primaire est pleinement assurée et prie la délégation roumaine de préciser dans quelle mesure cet impératif est respecté et d'indiquer les niveaux de l'analphabétisme et de l'illettrisme en Roumanie. Citant une ONG roumaine selon laquelle plusieurs projets de loi sur l'enseignement ne sont toujours pas appliqués quatre ans après l'entrée en fonctions du gouvernement actuel, il croit comprendre que les lois de l'ancien régime demeurent en vigueur dans le domaine de l'enseignement. Il semble, en outre, que le matériel scolaire soit très insuffisant.

52. L'intervenant relève avec inquiétude que le rapport de la Roumanie insiste sur le fait que les réformes sont, en quelque sorte, dirigées contre l'ancien régime, ce qui risque de favoriser des excès contraires, à ceux de ce dernier. Il faudrait notamment éviter que le marxisme, en tant que théorie philosophique et instrument d'analyse, ne soit banni des programmes d'enseignement universitaires. Il importe, en la matière, de respecter le principe de pluralisme.

53. Mme JIMENEZ BUTRAGUEÑO demande si la baisse générale du niveau de vie à partir de 1989, dont il est fait état dans le rapport de la Roumanie, touche particulièrement certains groupes, notamment les femmes, les personnes âgées, les retraités, etc. En rapport avec la situation des "enfants de la rue", il serait intéressant de savoir quels sont les effets de cette situation sur la formation scolaire des enfants concernés et, en particulier, de connaître le nombre des enfants non scolarisés. Il serait également intéressant de connaître le contenu des matières d'enseignement mentionnées au paragraphe 3 du rapport de la Roumanie (écologie, relations économiques internationales, management, psychologie et sociologie, etc.) et de savoir à quels niveaux elles sont enseignées et si les membres des forces de sécurité et de la police ont accès à un enseignement de cette nature. En ce qui concerne l'enseignement confessionnel, l'intervenante demande si les agnostiques ont la possibilité de suivre l'enseignement de leur choix. Elle demande en outre s'il existe un corps de magistrats professionnels totalement indépendant des autres pouvoirs, conformément aux normes démocratiques.

54. Le PRESIDENT déclare que s'il n'y a pas d'autres questions, il demandera aux représentants de la Roumanie de répondre aux questions posées le lendemain.

55. Il en est ainsi décidé.

56. La délégation roumaine se retire.

ORGANISATION DES TRAVAUX (point 2 de l'ordre du jour) (suite)

57. Au titre de l'organisation pratique des travaux, le PRESIDENT demande ensuite aux membres du Comité de s'abstenir de citer le rapport rédigé par le secrétariat sur la Roumanie, distribué sans cote, en tant que source car il n'a pas de statut particulier, mais de se référer directement aux sources citées dans ce dernier (UNICEF, ONG, etc.).

58. M. ALVAREZ VITA souligne qu'il importe au plus haut point que les membres du Comité, qui doivent pouvoir jouer pleinement leur rôle d'experts, puissent citer librement toute source d'information à leur disposition, y compris les documents émanant du secrétariat.

59. Le PRESIDENT explique qu'il tenait simplement à préciser que l'on devrait toujours citer directement les sources mentionnées dans le document du secrétariat, et non ce document lui-même, qui ne fait que reproduire les sources en question.

60. Il informe par ailleurs le Comité qu'il a reçu une lettre du représentant permanent de la République dominicaine auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, demandant au Comité de reporter l'examen de la question concernant ce pays à la prochaine session en raison d'élections qui retiendront en République dominicaine le représentant permanent de ce pays. Si sa demande était acceptée, la République dominicaine propose, en contrepartie, d'envoyer devant le Comité un expert particulièrement qualifié de la capitale pour répondre à ses questions. Le Président propose d'accepter l'offre de la République dominicaine à condition qu'elle lui fournisse des renseignements complémentaires et que l'expert mentionné soit effectivement présent.

61. M. SIMMA souhaiterait, compte tenu des craintes exprimées par le Comité à sa session précédente au sujet des expulsions imminentes envisagées par les autorités dominicaines, que le Comité prie instamment le Gouvernement de la République dominicaine de veiller à ce que la situation des personnes menacées d'expulsion ne s'aggrave pas entre-temps.

62. Le PRESIDENT propose de rédiger une lettre en ce sens qu'il soumettra au Comité au plus tard le surlendemain.

63. Il en est ainsi décidé.

QUESTIONS DIVERSES

64. M. WIMER ZAMBRANO fait part au Comité de son inquiétude au sujet de M. Muterahejuru, membre du Comité originaire du Rwanda. Il propose que le Président s'adresse directement, au nom du Comité, au Secrétaire général des Nations Unies si aucune nouvelle n'est reçue dans les prochaines heures.

65. Le PRESIDENT dit qu'il a fait parvenir une lettre au Haut Commissaire aux droits de l'homme demandant des renseignements sur M. Muterahejuru.

66. M. WIMER ZAMBRANO est d'avis que cette affaire a un caractère politique et qu'il convient d'adresser un message au Secrétaire général des Nations Unies pour lui exprimer les préoccupations des membres du Comité concernant les événements qui se déroulent au Rwanda et plus particulièrement le sort de M. Muterahejuru.

67. Le PRESIDENT pensait que le Haut Commissaire aux droits de l'homme, entré en fonctions récemment, accorderait une attention particulière à ce problème, mais il laisse aux membres du Comité le soin de décider s'il convient de faire appel au Secrétaire général.

68. Mme JIMENEZ BUTRAGUEÑO approuve la proposition de M. Wimer Zambrano d'adresser un message directement au Secrétaire général des Nations Unies.

69. M. GRISSA craint que ni le Haut Commissaire aux droits de l'homme, ni le Secrétaire général des Nations Unies ne puissent résoudre ce problème. Il estime que le Comité, en tant qu'organe des Nations Unies oeuvrant dans le domaine des droits de l'homme, doit se préoccuper du sort de l'ensemble du peuple rwandais et pas seulement de celui d'un de ses propres membres. Il propose donc que le Comité fasse part de ses préoccupations au Haut Commissaire aux droits de l'homme et attende sa réponse.

70. Le PRESIDENT précise que les violations des droits civils et politiques n'entrent pas dans le cadre du mandat du Comité, mais qu'il est tout à fait en droit de se préoccuper du sort de l'un de ses membres et de demander, à ce titre, au Secrétaire général des Nations Unies que des mesures soient prises pour le retrouver. En outre, une telle demande pourrait servir de point de départ à des actions humanitaires de plus grande envergure de la part des Nations Unies.

71. M. TEXIER est d'avis qu'il faut alerter à la fois le Haut Commissaire aux droits de l'homme et le Secrétaire général et qu'il s'agit là d'une question de solidarité.

72. Le PRESIDENT précise que le Secrétaire général des Nations Unies se trouve justement au Palais des Nations; il propose de lui faire parvenir un message dans le courant de la journée.

73. Il en est ainsi décidé.


La séance est levée à 13 heures.

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