Distr.

GENERALE

CRC/C/SR.172
17 octobre 1994


Original: FRANCAIS
Compte rendu analytique de la 172ème séance : Spain. 17/10/94.
CRC/C/SR.172. (Summary Record)

Convention Abbreviation: CRC
COMITE DES DROITS DE L'ENFANT

Septième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 172ème SEANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,
le jeudi 6 octobre 1994, à 15 heures

Président : M. HAMMARBERG



SOMMAIRE

Examen des rapports présentés par les Etats parties

Rapport initial de l'Espagne (suite)






_________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également portées sur un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications éventuelles aux comptes rendus des séances publiques de la présente session seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la clôture de la session.

GE.94-19271 (F)

La séance est ouverte à 15 h 15.

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES (point 4 de l'ordre du jour)

Rapport initial de l'Espagne (CRC/C/8/Add.6) (suite)

1. Sur l'invitation du Président, la délégation espagnole reprend place à la table du Comité.

2. Le PRESIDENT invite la délégation espagnole à répondre aux questions posées le matin par les membres du Comité en rapport avec les points 1 à 7 de la liste CRC/C.7/WP.1.

3. A propos des communautés autonomes, Mme LEAL (Espagne) présente les normes qui régissent les rapports entre l'Etat et ces communautés. Tout d'abord, elle dit que l'article 149 de la Constitution espagnole dispose que l'Etat jouit d'une compétence exclusive dans la réglementation des conditions fondamentales qui garantissent l'égalité de tous les Espagnols dans l'exercice de leurs droits et dans l'accomplissement des devoirs constitutionnels. Par ailleurs, l'article 153 de la Constitution stipule que le contrôle de l'activité des organes des communautés autonomes sera exercé, premièrement par le tribunal constitutionnel en ce qui concerne la constitutionnalité de leurs dispositions normatives ayant force de loi, deuxièmement par le gouvernement central, après avis du Conseil d'Etat, en ce qui concerne l'exercice de fonctions déléguées auxquelles se réfère l'article 150, paragraphe 2, troisièmement par la juridiction du contentieux administratif en ce qui concerne l'administration autonome et ses normes réglementaires, et quatrièmement par la Cour des comptes en ce qui concerne les matières économiques et budgétaires. L'article 155 de la Constitution prévoit des mesures dans les cas où les communautés autonomes ne s'acquittent pas de leurs obligations.

4. L'article 156 de la Constitution précise l'autonomie financière des communautés autonomes. Néanmoins, le budget général de l'Etat prévoit un chapitre budgétaire spécial à l'attention des communautés autonomes pour assurer un niveau minimum des services sur tout le territoire espagnol. Les différents articles de la Constitution sont développés par des lois spécifiques. Mme Leal mentionne tout d'abord la loi sur le financement des communautés autonomes de 1980. En vertu de l'article 3 de cette loi un conseil de politique fiscale et financière, composé du Ministre du budget et de l'économie de l'administration territoriale ainsi que du conseiller fiscal de chaque communauté est institué pour assurer une bonne coordination entre les activités financières des communautés autonomes et celles de l'Etat. Cet organe gère les ressources des communautés autonomes qui sont constituées par les crédits prévus dans le budget général, le transfert des montants du fonds de compensation interterritorial et d'autres ressources (patrimoine, impôts perçus par l'Etat, etc.). La loi qui régit le fonds de compensation interterritorial (1990) stipule que le budget général de l'Etat consacre chaque année un chapitre à ce fonds de compensation. Le montant annuel du fonds est fixé selon un pourcentage qui ne peut être inférieur à 30 % de la base du calcul des investissements publics. La répartition de ce fonds de compensation est la suivante : 87,5 % proportionnellement à la population concernée, 1,6 % proportionnellement au solde migratoire, 1 % proportionnel au chômage, 3 % à la surface de chaque territoire et 6,9 % àla répartition de la population sur le territoire, selon une méthode déterminée. Cette répartition devrait permettre de corriger les inégalités entre les diverses régions du territoire espagnol.

5. Mme Leal précise les modalités de contrôle énoncées dans la loi organique sur le transfert des compétences vers les communautés autonomes (1992). D'une part, les communautés autonomes doivent fournir à l'Etat et à l'administration toutes les informations nécessaires à ce transfert. Par ailleurs, les services transférés doivent maintenir le niveau minimum d'efficacité qu'ils assurent au moment du transfert. Les pouvoirs transférés peuvent être révoqués ou suspendus au bout de trois mois s'ils ne satisfont aux principes susmentionnés. Mme Leal mentionne également la loi d'incitation régionale (1985), qui prévoit que des aides financières soient accordées par l'Etat pour encourager les activités entreprises, corriger les déséquilibres économiques sur le territoire national et renforcer les possibilités de développement endogène des régions. Les mesures d'incitation régionale s'appliquent surtout aux zones dont le développement industriel est faible, selon les directives de la politique régionale.

6. Le PRESIDENT demande si le système mis en place a déjà donné des résultats.

7. Mme LEAL (Espagne) précise que les mécanismes prévus dans les lois mentionnées n'ont pas encore été mis en place, mais font l'objet d'un consensus.

8. Abordant la question de la diffusion de la Convention relative aux droits de l'enfant, M. LOPEZ (Espagne) dit que le rapport donne des informations abondantes sur ce sujet (par. 51 à 62), ainsi que sur les activités menées par l'Espagne depuis qu'elle a ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant en janvier 1991. Il précise que le gouvernement a organisé une exposition itinérante pour que tous les Espagnols, notamment les enfants, aient connaissance du domaine d'application et du contenu de la Convention. Les enfants participent activement aux manifestations ayant pour cadre cette exposition, ainsi qu'à des activités parallèles dans les écoles et les ateliers. Par ailleurs, deux publications présentent le contenu de la Convention et mettent l'accent sur l'intérêt supérieur de l'enfant. M. Lopez signale que l'Espagne a constitué un Comité national de l'enfance qui s'est réuni à Madrid dans le cadre de l'Année internationale de la famille, et que toutes les communautés autonomes y participent. Ce Comité a réalisé de nombreuses activités qui font connaître la situation de la famille et des enfants dans le contexte familial. Le Ministère des affaires sociales a organisé des séminaires sur le rôle des enfants. Il participe également à une conférence organisée par le Conseil de l'Europe du 1er au 3 décembre 1994 sur l'évolution du rôle des enfants dans la famille. Cette conférence regroupe de nombreux comités qui travaillent depuis deux ans sur ce sujet. M. Lopez reconnaît que de nombreux progrès restent encore à accomplir pour mieux diffuser la Convention relative aux droits de l'enfant. A propos de l'orientation et des priorités fixées dans le domaine social axé sur l'enfance, il précise les orientations générales de la politique de coopération de l'Espagne (santé, éducation et politique sociale). Il reconnaît que l'Espagne devrait renforcer son aide au développement. Par ailleurs, il dit que le rapport donne une bonne idée des activités menées par l'Espagne dans ces domaines (par. 63 à 77).

9. Abordant la situation des communautés autonomes en matière d'éducation, Mme MARTIN (Espagne) dit qu'une loi a été adoptée en 1990, en vertu de laquelle l'égalité des chances est garantie à tous les enfants en matière d'enseignement. Cette loi établit trois mécanismes. Il y a d'une part des règles élémentaires édictées par le gouvernement et qui sont contraignantes pour les communautés autonomes. Une proportion de 65 % des programmes scolaires est définie par le gouvernement central, quelles que soient les compétences déléguées aux communautés autonomes. D'autre part, un système d'inspection de haut niveau a pour compétence de transférer à chaque communauté le pouvoir de contrôler l'application des règles. Ce groupe d'inspection a publié un rapport sur le système éducatif dans chaque communauté autonome. Il y a enfin un Institut national pour l'évaluation de l'éducation, institué l'an dernier pour évaluer l'évolution du système éducatif dans l'ensemble du pays. Ce mécanisme est essentiel dans un pays qui entame un processus de décentralisation.

10. Mme Martin précise que sur les 17 communautés autonomes qui existent en Espagne, seules sept sont compétentes en matière d'enseignement; les dix autres relèvent donc encore de la compétence du gouvernement central dans ce domaine. Elle ajoute que des thèmes relatifs à la Convention relative aux droits de l'enfant sont intégrés dans les programmes scolaires et que de nombreux efforts sont déployés pour mieux former les futurs citoyens. En plus du contenu académique, les programmes scolaires comprennent trois thèmes transversaux qui sont importants pour le développement de la personnalité : l'éducation civique, la morale et l'éducation pour la paix.

11. Ces thèmes traversent des domaines tels que la santé, l'environnement, la protection des consommateurs, l'égalité des chances entre les sexes, etc. Mme Martin précise également que les enseignants doivent élaborer un projet pédagogique qui respecte les principes énoncés dans la Convention relative aux droits de l'enfant. Elle souligne qu'en expliquant la Convention dans les établissements scolaires, il faut aussi veiller à ce que les droits des enfants soient réalisés dans la pratique. Les établissements scolaires eux-mêmes doivent élaborer un programme d'études axé sur les droits de l'enfant.

12. Parmi les thèmes interdisciplinaires abordés tout au long du parcours éducatif, il convient de citer les questions liées à l'existence de différentes structures familiales, aux responsabilités et aux droits de tous les membres de la famille, aux conflits qui surgissent au sein des groupes sociaux et aux mécanismes de dialogue qui existent pour résoudre ces conflits, à l'égalité des sexes, au respect et à la valorisation de toutes les différences. En outre, à la fin du cycle secondaire, un cours de morale et de réflexion éthique a été introduit, afin de se pencher sur la légitimité et l'histoire des valeurs véhiculées par la société espagnole. L'enseignement éthique ne doit en effet pas constituer un endoctrinement, mais plutôt pousser les étudiants à réfléchir sur leur société. La formation du corps enseignant àces nouveaux thèmes est un des domaines dans lesquels les plus grands progrès ont été accomplis, à la fois dans le cadre de la formation initiale et dans celui de la formation permanente. Les autorités espagnoles estiment qu'il reste beaucoup à faire dans ce domaine, mais ces nouveaux thèmes ont éveillé un intérêt particulier dans le corps enseignant et des efforts importants sont déployés, à la fois par les autorités, le corps enseignant et les ONG concernées. Il convient, à cet égard, de souligner que les autorités espagnoles collaborent avec un certain nombre d'ONG et subventionnent, notamment, les travaux de ces dernières dans les domaines de l'élaboration de matériel éducatif, de la formation du corps professoral et d'échanges scolaires avec d'autres pays.

13. Par ailleurs, les autorités chargées de l'enseignement, au sein du gouvernement central et des communautés autonomes, ont pris diverses initiatives pour assurer que les chaînes de télévision tiennent compte des droits de l'enfant.

14. Enfin, s'agissant de la coopération, il convient de mentionner qu'outre les mécanismes d'ordre général deux initiatives récentes ont été prises. La première concerne un projet de télévision éducative avec l'Amérique latine dans lequel l'Espagne joue un rôle important. Dans le cadre de la deuxième initiative, il est prévu de collaborer avec divers pays pour que des professeurs originaires de ces pays exercent en Espagne afin de permettre aux minorités ethniques de conserver la connaissance de leur langue maternelle. A l'heure actuelle, dans le cadre de ce projet, seul un accord a été signé avec le Maroc.

15. Le PRESIDENT appelle l'attention sur la section suivante de la liste de points à traiter CRC/C.7/WP.1.
"Principes généraux

(Art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

8. Veuillez indiquer, pour chacun de ces quatres principes, a) les progrès réalisés dans leur mise en oeuvre, b) les difficultés rencontrées et c) les priorités retenues en matière de mise en oeuvre."

16. Mme LEAL (Espagne) indique que l'avant-projet de loi relatif aux droits du mineur reconnaît expressément les droits d'association et de réunion et la liberté d'opinion et d'expression, et consacre un article spécifique au droit de l'enfant à être entendu et à donner son consentement. A cet égard, il convient de préciser qu'en vertu du Code civil les enfants âgés de plus de 12 ans - ainsi que les enfants âgés de moins de 12 ans et dotés d'une maturité suffisante - doivent donner leur consentement avant toute adoption, et doivent être entendus sur toutes les questions qui les concernent, notamment en cas de divorce ou de séparation des parents.

17. S'agissant du principe de non-discrimination, il convient de mentionner que, récemment, en rapport avec l'expulsion de certains étrangers qui étaient en situation irrégulière en Espagne, le Défenseur du peuple a envoyé au Ministère de la justice et de l'intérieur une recommandation rappelant les principes de la non-discrimination et de l'intérêt supérieur de l'enfant, ainsi que les mesures spéciales de protection, que prévoit la Convention. Dans cette recommandation, il est également demandé au Ministère de la justice et de l'intérieur de donner des instructions précises à tous les postes frontière, afin que ces principes soient respectés en toutes circonstances. En outre, le Ministère de la justice et de l'intérieur a édicté une série d'instructions générales concernant les procédures d'octroi de visa dans le cadre du regroupement familial pour les citoyens des Etats membres de l'Union européenne. Dans le domaine de la non-discrimination, il convient également de signaler une loi adoptée en 1994 par la Communauté de Madrid, qui prévoit d'étendre la compétence des services sociaux à tous les résidents de l'Union européenne. Les étrangers qui ne résident pas dans l'Union européenne pourront bénéficier des services sociaux conformément aux traités internationaux, à la loi sur l'asile et aux règlements adoptés par la Communauté de Madrid.

18. Le PRESIDENT souhaite connaître les problèmes rencontrés dans le domaine du respect des principes généraux visés au point 8 par l'Espagne.

19. M. KOLOSOV se demande si l'examen des mesures adoptées par la Communauté de Madrid reflète la situation des droits de l'enfant dans l'ensemble du pays. Qu'en est-il des petites villes et des villages ? Par ailleurs, M. Kolosov souhaite avoir plus de précisions sur les livres et matériels éducatifs qui font état de la Convention. Ces matériels pourraient, le cas échéant, être utiles à de nombreux pays d'Amérique latine. Enfin, dans quelle mesure, d'un point de vue pratique, la société espagnole a-t-elle connaissance de la Convention et des droits de l'enfant ? Mme Martin a parlé à se sujet d'une exposition itinérante sur les droits de l'enfant; M. Kolosov serait heureux de recevoir quelques renseignements sur cette exposition.

20. Mme SANTOS PAIS se félicite tout d'abord que la législation espagnole prévoit qu'un fonctionnaire qui se rend coupable de discrimination commet une infraction pénale. S'agissant du respect des opinions de l'enfant, il peut arriver que ce principe soit en contradiction avec celui de l'intérêt supérieur de l'enfant. En effet, dans le cas d'un divorce, par exemple, les parents peuvent se servir de l'enfant lorsqu'il est question de déterminer qui en aura la garde. Dans ce type de situation, les juges espagnols ont-ils la possibilité de ne pas tenir compte de l'opinion de l'enfant afin d'agir dans l'intérêt supérieur de ce dernier ?

21. S'agissant de l'émancipation, Mme Santos País croit comprendre que lorsqu'un enfant est émancipé la Convention ne s'applique plus. Peut-on imaginer que des parents accélèrent une procédure d'émancipation dans le simple but de ne plus devoir assumer leurs responsabilités vis-à-vis de leurs enfants, ou existe-t-il un mécanisme pour empêcher ce type d'agissements ? D'autre part, la délégation espagnole a mentionné le fait que les enfants étaient représentés par des associations dans leurs écoles. Comment ce mécanisme fonctionne-t-il en pratique ? Enfin, est-il possible que l'on suspende l'expulsion d'une famille de personnes en situation irrégulière dans l'intérêt supérieur de l'enfant ? On pourrait, à cet égard, citer l'exemple d'un couple non marié avec des enfants, susceptible d'être expulsé vers un pays où le statut des enfants nés hors mariage serait précaire.

22. Mme EUFEMIO se félicite du fait que les autorités espagnoles aient décidé de combattre les stéréotypes sexistes présents dans les documents pédagogiques et les programmes d'enseignement. L'intervenante constate cependant qu'il existe un grand nombre de familles dirigées par des femmes et elle aimerait que des statistiques soient communiquées à ce sujet. Quelles sont les conséquences de cet état de fait sur la discrimination fondée sur le sexe ?
23. Mgr BAMBAREN GASTELUMENDI s'inquiète de la résurgence récente de la xénophobie. Dans quelle mesure cette dernière a-t-elle des répercussions sur les enfants ? Les enfants de personnes en situation irrégulière ont-ils accès aux services sociaux et à l'éducation ?

24. Par ailleurs, de nombreux cas de discrimination à l'encontre de la population gitane ont été signalés, particulièrement en 1991 et 1992. Existe-t-il des écoles spéciales et des programmes d'enseignement spéciaux pour les enfants appartenant à cette population ?

25. La télévision espagnole est-elle publique ? Il semble, en effet, que dans les pays où existent des chaînes de télévision privées, il soit difficile de prendre des mesures pour contrôler la qualité des programmes et éviter qu'ils ne comportent trop de violence ou de sexe. Enfin, la Convention est-elle diffusée dans chacune des langues des différentes communautés autonomes ?

26. Mme MARTIN (Espagne), répondant à certaines questions qui portaient sur le système d'éducation, explique que trois livres récents ont été publiés respectivement par l'Université de Barcelone, la ligue pour l'éducation éthique, et le Ministère des affaires sociales en collaboration avec l'Université de Barcelone. Toutefois, elle estime que l'idée d'inclure dans des manuels scolaires portant sur différents domaines les thèmes abordés par le Comité est louable mais difficilement réalisable.

27. Trois mécanismes ont été créés pour favoriser la participation à la vie scolaire : les conseils scolaires, les comités de délégués et les associations d'élèves, qui sont régis par plusieurs décrets royaux basés sur la loi organique relative à l'éducation, la loi organique sur le droit à l'éducation et la loi d'organisation générale du système d'éducation. Les conseils scolaires sont les organes de participation les plus importants, car y sont représentés tous les membres de la communauté éducative (professeurs, élèves, parents d'élèves et administrations locales), sous la présidence des chefs d'établissement. Dans les établissements primaires (jusqu'à 12 ans), les élèves ont un rôle consultatif au sein du conseil. A partir de 13 ans, ils détiennent un tiers des sièges et ont le droit de vote. Les conseils exercent des pouvoirs étendus; ils peuvent, par exemple, nommer ou révoquer le chef d'établissement, adopter le règlement intérieur de l'établissement, définir le projet éducatif et approuver le budget de l'établissement.

28. Les comités de délégués sont composés de représentants élus des élèves. Les associations d'élèves s'occupent surtout des activités périscolaires, notamment des relations avec la communauté. Un projet visant à permettre aux membres de la communauté d'avoir accès aux installations scolaires (bibliothèques, installations sportives) a été mis en application. Il a pour but de rentabiliser les infrastructures scolaires et d'autoriser les élèves àutiliser ces dernières en dehors des heures d'enseignement. Ces associations détiennent donc des pouvoirs importants qui seront très prochainement renforcés par une ordonnance ministérielle autorisant des volontaires àparticiper à leurs activités.

29. Répondant à une question de Mgr Bambaren Gastelumendi, Mme Martin déclare que l'intégration des minorités ethniques, notamment les Gitans, dans le système scolaire, ne se fait pas sans difficultés et qu'elle a même donné lieu, dans le passé, à des affrontements et à des conflits. Bien que la scolarisation des jeunes Gitans se heurte à des résistances, l'Espagne a écarté l'idée de créer des écoles qui leur seraient exclusivement réservées. La politique en vigueur répond à deux impératifs : veiller à ce que les Gitans ne se sentent pas quantitativement et culturellement isolés dans les établissements scolaires et éviter la constitution de clans familiaux dans les écoles. Une trentaine de Gitans au maximum sont admis dans chaque établissement primaire. Par ailleurs, on s'efforce de faire en sorte que les établissements conventionnés (établissements privés subventionnés par l'Etat) accueillent eux aussi des élèves issus des minorités ethniques pour éviter que ces derniers ne fréquentent exclusivement les établissements publics. Un projet de loi, qui a pour but d'assurer l'égalité réelle en matière d'éducation, stipule que les établissements conventionnés devront scolariser un nombre égal d'élèves ayant des besoins spéciaux et d'élèves issus des minorités ethniques ou culturelles. Une autre mesure est envisagée pour subventionner l'éducation préprimaire des enfants issus des minorités. En l'état actuel des choses, cette scolarisation, qui n'est ni obligatoire ni gratuite, est requise pour accéder à l'école primaire : malheureusement cela est actuellement un obstacle pour les Gitans.

30. En matière de télévision, Mme Martin précise à Mgr Bambaren Gastelumendi qu'il existe en Espagne des chaînes publiques et des chaînes privées qui sont régies, les unes et les autres, par un "code d'autoréglementation". Les émissions éducatives sont diffusées par une chaîne de télévision publique.

31. Mme LEAL (Espagne) répond à M. Kolosov que l'exposition dont il a été question est encore ouverte. Elle présente des dessins réalisés par des artistes connus accompagnés de textes destinés aux enfants ainsi que d'autres documents, notamment un livre écrit par un juge pour mineurs à l'intention des enfants. Ces documents sont distribués au cours des visites.

32. En réponse à la question de Mme Santos País concernant la procédure d'audience applicable aux enfants, Mme Leal dit que ces derniers sont entendus par un juge pour les questions relatives à la famille, assisté d'une équipe technique composée d'assistantes sociales et de psychologues. Les enfants sont entendus dans le bureau du juge et non dans la salle des audiences. Quand les circonstances l'exigent, le juge charge un psychologue de recevoir la déposition du mineur, ou une assistante sociale de l'aider au cours des entretiens avec les parents.

33. En ce qui concerne l'émancipation, le mineur peut être habilité à gérer ses biens et à disposer de sa personne comme s'il était majeur sous réserve des dispositions du Code civil qui ne l'autorisent pas à emprunter de l'argent ni à aliéner des biens mobiliers ou immobiliers, des établissements industriels ou commerciaux ou des objets de grande valeur sans l'accord de ses parents ou de ses tuteurs.

34. S'agissant de l'expulsion de mineurs, l'intervenante explique que la politique officielle a changé. La police contacte immédiatement le ministère public, qui peut ordonner une enquête sur le champ, demander des renseignements à la police, recevoir les parents et prendre une mesure de protection en faveur du mineur.

35. Un mineur étranger en situation irrégulière n'est pas soumis aux mêmes dispositions qu'un mineur non accompagné, par exemple s'il est accompagné de sa mère, même si cette dernière est également en situation irrégulière. S'il n'est pas accompagné, le mineur se voit appliquer les dispositions prévues dans la Convention. A ce titre, une mesure de protection est adoptée à son égard (envoi dans un centre de protection pour mineurs) et le ministère public contacte l'ambassade de son pays d'origine pour s'efforcer de retrouver sa famille.

36. En ce qui concerne l'usage de la télévision, Mme Leal ajoute aux précisions fournies par Mme Martin que les directives européennes relatives aux émissions de télévision destinées aux enfants ont été incluses dans la législation. Le Parlement a par exemple fixé les créneaux horaires pendant lesquels les chaînes de télévision peuvent diffuser des annonces publicitaires destinées aux enfants.

37. M. LOPEZ (Espagne) ajoute, en réponse à une question de M. Kolosov qui portait sur les textes qui ont été publiés en Espagne en vue de diffuser la Convention, que le Ministre des affaires sociales produit des documents d'information (fiches, diaporamas) dont certains pourraient être mis à la disposition du Comité.

38. En réponse à une question de Mme Eufemio qui avait trait à des statistiques sur les familles, M. Lopez fait savoir que la délégation espagnole pourra communiquer au Comité un recueil d'informations intitulé "L'enfance en chiffres", qui donne une vue d'ensemble sur la situation de l'enfance en Espagne.

39. Mme MARTIN (Espagne) ajoute, en réponse à la question de Mme Eufemio sur la préservation de l'égalité des chances compte tenu du nombre croissant de ménages dirigés par une femme seule, que l'on s'efforce de diffuser des renseignements sur les différents types d'organisation familiale existants et de décourager les jugements de valeur en la matière.

40. Le PRESIDENT estime que la procédure consistant à contacter l'ambassade du pays d'origine du mineur en situation irrégulière risque, dans certains cas, d'aller à l'encontre de l'intérêt et de l'intention du mineur qui a décidé de fuir son pays pour se réfugier en Espagne.

41. Mme LEAL (Espagne) explique qu'il existe en la matière deux situations fondamentales. Si l'immigré est un mineur âgé de moins de 16 ans cherchant du travail en Espagne, qui se trouve en situation irrégulière, la Convention s'applique et les autorités espagnoles entrent en contact avec les autorités de son pays. Entre-temps, il est confié à un centre pour mineurs et fait l'objet des mesures de protection prévues par la loi. S'il s'agit d'un enfant très jeune qui a été abandonné et dont le lieu de naissance n'est pas connu, le Code civil prévoit que la nationalité espagnole doit être accordée.

42. Le PRESIDENT croit savoir que les mineurs en question sont le plus souvent des personnes désirant se fixer en Espagne pour y travailler, et non des demandeurs d'asile.

43. Mme LEAL (Espagne) déclare que la loi sur les étrangers prévoit l'expulsion des personnes âgées de plus de 18 ans qui se trouvent en Espagne en situation irrégulière. En revanche, les mineurs ne sont pas expulsés, ce qui équivaut à une forme de protection même si leur volonté de ne pas être mis en contact avec leur pays d'origine n'est pas respectée.

44. M. KOLOSOV fait remarquer qu'il est dit au paragraphe 112 du rapport de l'Espagne (CRC/C/8/Add.6) que la loi sur la nationalité stipule qu'un enfant né en Espagne de parents apatrides ou inconnus, ou soumis antérieurement àl'autorité parentale d'une personne de nationalité espagnole, ou placé sous sa garde peut obtenir la nationalité espagnole. Il croit donc pouvoir comprendre qu'un enfant d'origine musulmane remplissant les conditions précitées peut être naturalisé espagnol.

45. Mme LEAL (Espagne) confirme l'exactitude de cette interprétation, qui est conforme aux dispositions du Code civil.

46. M. KOLOSOV demande si l'Espagne applique la lex sanguinis ou la lex sole en matière de nationalité. Le paragraphe 112 lui semble combiner ces deux types de loi, ce qui pourrait causer, à terme, des différends entre Etats au sujet de la nationalité de l'enfant parvenu à l'âge adulte.

47. Mme LEAL (Espagne) déclare que l'Espagne applique effectivement un système mixte, car le Code civil stipule que sont espagnoles les personnes nées de parents espagnols ou nées en Espagne dans certaines conditions, par exemple si l'un des parents est espagnol, si les deux parents sont apatrides, si le pays dont les parents possèdent la nationalité refuse à l'enfant cette nationalité, si la filiation est interrompue par voie d'abandon et si certaines conditions basées sur la durée de résidence en Espagne sont remplies.

48. Mme SANTOS PAIS n'est pas sûre que l'opinion de l'enfant et son droit à la vie privée soient respectés de façon satisfaisante.

49. Le PRESIDENT estime que toute présomption favorable à l'égard de l'enfant immigrant en situation irrégulière n'existe plus lorsque l'Etat décide systématiquement de contacter l'ambassade de son pays d'origine. Il faudrait à son avis que chaque cas soit examiné individuellement.

50. Mme LEAL (Espagne) dit qu'il n'était pas stipulé dans la loi en vigueur jusqu'à 1994 que l'immigrant mineur devait avoir 19 ans révolus pour demander le droit d'asile ou de refuge de telle sorte que des mineurs pouvaient obtenir le bénéfice de ce droit. Les dispositions définies dans la nouvelle loi sur l'asile sont beaucoup plus restrictives et les mineurs qui sont des réfugiés économiques ne trouvent plus aussi facilement asile en Espagne. De plus, les demandeurs d'asile doivent prouver qu'ils sont des réfugiés politiques. L'Espagne est donc devenue moins accueillante à cet égard pour les étrangers.

51. Le PRESIDENT invite la délégation espagnole à répondre aux questions 9 et 10, puis à la question 11 de la section "Libertés et droits civils" de la liste CRC/C.7/WP.1 :
"Libertés et droits civils

(Art. 7 et 8, 13 à 17 et 37 a) de la Convention)

9. Veuillez indiquer les mesures qui sont prises pour protéger les enfants contre la violence et autres influences nocives des médias.

10. Quelles mesures concrètes ont-elles été adoptées pour empêcher que certains enfants - par exemple ceux qui sont victimes de sévices sexuels - ne soient, à leurs dépens, exhibés au grand public par les médias ?

11. Veuillez fournir les données disponibles sur le nombre d'enfants victimes de mauvais traitements. Est-ce que des programmes spéciaux de prévention des mauvais traitements ont été mis au point dans chaque communauté autonome (par. 193 du rapport) ? En ce qui concerne les renseignements contenus dans le paragraphe 143 du rapport, veuillez expliquer la différence entre les "corrections modérées" et la "dureté excessive"."

52. M. LOPEZ (Espagne), se référant à la question 9, rappelle qu'outre la Convention d'autoréglementation ("convenio de autoregulación"), souscrite par le gouvernement et diverses chaînes de télévision afin d'éviter la diffusion d'émissions préjudiciables à l'enfance, le Sénat a créé une commission spéciale qui examine en permanence le contenu des programmes de télévision. De plus, la directive 89/552 de l'Union européenne, qui vise dans son chapitre IV à la protection de l'enfance, a été incorporée à la législation espagnole et concerne les chaînes de télévision publiques et privées. Par ailleurs, le Ministère des affaires sociales a favorisé la création d'un groupe de travail sur le traitement de l'enfance par les médias, auquel participent des représentants des médias et du ministère, destiné àprésenter des propositions concrètes aux autorités compétentes. Entre autres activités, à l'occasion de l'Année internationale de la famille, des journées internationales se sont déroulées en Espagne il y a deux semaines sur l'influence des nouvelles techniques sur les moyens audiovisuels et sur l'enfance. En novembre, d'autres journées internationales, intitulées "Moyens de communication et famille", analyseront le rôle que jouent les médias au sein de la famille. Le groupe de travail susmentionné y présentera un exposé àcet égard. Enfin, lors de la Conférence du Conseil de l'Europe, qui se tiendra à Madrid du 1er au 3 décembre de cette année, deux groupes de travail formés il y a deux ans au sein du Conseil de l'Europe se référeront spécialement aux médias et à leurs incidences sur l'enfance. Ces journées devraient déboucher sur des mesures importantes.

53. A propose de la question 10, l'orateur évoque l'instruction 2/1993 du ministère public ("Fiscalía General del Estado") concernant le droit àl'intimité de mineurs victimes d'un délit. Cette instruction visait des programmes de grande diffusion, au contenu discutable, qui, rendaient compte de faits délictueux, nommaient les enfants qui en avaient été victimes. Il y a deux semaines, à Madrid, des journées se sont tenues sur la protection du droit au respect de la vie privée, énoncé dans la Convention.

54. Le PRESIDENT demande si l'instruction mentionnée visait bien à protéger l'intégrité et l'identité de ces enfants en ne révélant pas leur nom au cours de ces programmes.

55. Mme LEAL (Espagne) le confirme et précise que cette instruction du ministère public a été prise à la suite de la diffusion de programmes de télévision dits "reality shows", et de cas de mineurs victimes de sévices sexuels qui ont alarmé l'opinion publique, les organisations non gouvernementales et le Défenseur du peuple ("Defensora del pueblo"). Ainsi, le cas célèbre d'un duc espagnol mêlé à des trafics de drogue et coupable de sévices sexuels à l'encontre de fillettes a amené des organisations non gouvernementales à rencontrer le Directeur général de la Protection juridique du mineur au Ministère des affaires sociales qui s'est alors entretenu avec le Procureur général de l'Etat. En effet, lorsque le coupable de ces délits a été arrêté, les chaînes de télévision ont montré les mineurs qui en avaient été victimes. Le Procureur général a donc donné des instructions pour que tous les procureurs du pays puissent appliquer plus facilement la loi organique de protection du droit à l'honneur, à l'intimité personnelle et familiale et àl'image de soi et solliciter auprès des juges des mesures de précaution ou interdire la diffusion de certains programmes.

56. M. LOPEZ (Espagne), répondant sur la question 11, précise que les enfants dans la détresse bénéficient d'un régime de tutelle des autorités. Par ailleurs, 13 programmes expérimentaux contre les mauvais traitements infligés à des mineurs ont été mis en place dans le pays. Certains sont préventifs, d'autres prévoient une assistance; deux sont liés aux sévices sexuels. Ces programmes sont financés par le Ministère des affaires sociales et par 13 communautés autonomes. L'orateur renvoie les membres du Comité aux réponses écrites de l'Espagne à ces questions pour plus d'informations. L'orateur espère être en mesure de fournir le lendemain au Comité des données quantitatives à cet égard. Si toutes les communautés autonomes ne participent pas à ces programmes, il existe dans chacune d'entre elles un système de protection sociale de l'enfance, mis en place par la communauté autonome et l'administration centrale ainsi que des services de soins primaires et des services sociaux pour détecter et évaluer ces cas.

57. Mme LEAL (Espagne), en réponse à la dernière partie de la question 11, précise que le législateur s'est délibérément abstenu de définir les concepts des "corrections modérées" et "dureté excessive" de la part des parents pour laisser au juge le soin de les distinguer. L'oratrice rappelle par ailleurs que le Code pénal sanctionne la violence physique, en particulier au sein de la famille, et les paroles blessantes à l'encontre des enfants.

58. Mme SANTOS PAIS craint que cette interprétation, laissée au juge, ne soit subjective. Le principe de protection de la vie privée de la famille n'empêche-t-il pas une tierce personne d'intervenir en cas de mauvais traitements au sein d'une famille ? Comment peut-on mettre un terme à la tradition selon laquelle les enfants appartiennent à leurs parents ? Mme Santos País demande s'il existe des structures pour aider un enfant àporter plainte contre ses parents. Elle estime que la législation espagnole protège mieux les enfants des mauvais traitements à l'école que dans la famille. En effet, selon le paragraphe 144 du rapport, un décret royal établit que tous les élèves ont droit à ce que leur intégrité physique et morale et leur dignité personnelle soient respectées. De plus, à l'école, un professeur peut constater qu'un élève est victime de mauvais traitements et les dénoncer; cela semble plus difficile au sein d'une famille. L'oratrice rappelle que, si les mauvais traitements énumérés à l'article 19 de la Convention ne constituent pas une liste exhaustive, c'est bien pour interdire quelque mauvais traitement que ce soit. Dans plusieurs législations nationales, il a été possible d'inclure des dispositions qui interdisent les châtiments corporels au sein et à l'extérieur de la famille. En Espagne, la législation pourrait être modifiée afin de refléter pleinement l'article 19 de la Convention, même si la Convention a été ratifiée dans ce pays et prime sur la législation nationale.

59. L'oratrice rappelle que le lundi 10 octobre le Comité débattra du régime de la famille. Il convient, au sein de la famille, d'avoir une attitude fondée sur le respect mutuel. L'oratrice souhaite que le système mis en place en Espagne pour les écoliers, qui leur permet d'exprimer leurs opinions, puisse être appliqué à la famille. S'agissant de la situation pénale des enfants, exposée au paragraphe 145 du rapport, Mme Santos País souhaiterait savoir si les enfants de plus de 16 ans bénéficient des mesures applicables aux mineurs de 12 à 16 ans, qui interdisent à leur égard l'application de châtiments physiques ou de traitements inhumains ou dégradants d'aucune sorte.

60. Mme EUFEMIO, se référant aux mauvais traitements dont sont victimes des enfants au sein de familles monoparentales, souligne que, souvent, les parents qui maltraitent leurs enfants ont été eux-mêmes des enfants maltraités. Mène-t-on aujourd'hui en Espagne des recherches à cet égard ? Existe-t-il des programmes préventifs ou des stratégies destinées à mettre en oeuvre le droit des enfants à ne pas être soumis à des tortures ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants, au sein ou à l'extérieur de la famille ?

61. Le PRESIDENT estime que les points qui viennent d'être soulever renvoient à la question 13. S'agissant de la question 11, le Comité est préoccupé par la formulation "corrections modérées" dans le Code civil. Elle devrait être revue et alignée sur l'article 19 de la Convention.

62. Mme LEAL (Espagne) précise que dans son pays le Code civil établit que l'autorité parentale est un ensemble d'obligations et de devoirs des parents à l'égard des enfants et comporte la faculté pour les parents de corriger modérément leurs enfants. Cela ne laisse pas pour autant supposer que l'on autorise des mauvais traitements ou des violences psychiques ou physiques, délits sanctionnés dans le Code pénal. Il appartient au juge de déterminer ce que signifie "correction modérée". Certes, ces juges peuvent se montrer subjectifs mais, en Espagne, il existe auprès des tribunaux de famille ("juzgados de familia") des équipes d'assistance formées de psychologues et d'assistants sociaux qui élaborent des rapports avant que le juge ne se prononce. Si, du point de vue juridique, il n'existe pas de concept selon lequel l'enfant appartiendrait à ses parents, il se peut que cela soit perçu ainsi dans certains secteurs de la société. Dans ce cas, un voisin n'osera pas dénoncer les parents qui maltraitent leurs enfants. Toutefois, les pouvoirs publics, en cas de mauvais traitements, assurent la tutelle, en dernier ressort, de l'enfant.

63. Les particuliers témoins de ces mauvais traitements peuvent les dénoncer dans un commissariat de police ou une municipalité. Pour les personnes de 18 ans et plus un projet de réforme du Code pénal, qui prévoit de porter la majorité pénale à 18 ans, est en cours. Quant au mécanisme de protection à cet égard, l'article 65 du Code pénal autorise le juge à diminuer la sentence de un ou deux degrés, selon les circonstances, ou de la remplacer par le placement du mineur dans un centre de réadaptation ("Centro de reforma"). De plus, la loi générale pénitentiaire ("Ley general penitenciaria") interdit les traitements inhumains dégradants et prévoit des mesures spéciales pour les mineurs de 16 à 21 ans. Enfin, s'agissant de mauvais traitements au sein d'une famille, monoparentale ou non, les autorités s'efforcent avant tout d'aider cette famille.

64. M. LOPEZ (Espagne) précise que les pouvoirs publics sont conscients de ce que les juges sont seuls à prendre la responsabilité de distinguer entre mauvais traitements et corrections mesurées. Ainsi, la Direction générale des mineurs ("Dirección General del Menor") a procédé à une enquête qui fait apparaître trois types de familles en Espagne : la famille autoritaire, la famille "laissez-faire" et la famille "d'appui démocratique" (de apoyo democrático), qui est majoritaire et ou prédomine le dialogue entre parents et enfants. Selon cette enquête auprès des parents, rares sont ceux qui auraient, le cas échéant, recours aux châtiments corporels. L'orateur estime que ces données auraient été différentes il y a 15 ans. Il y a donc évolution et il ne semble donc pas si nécessaire de légiférer afin de déterminer ce que l'on entend par correction sévère ou modérée.

65. S'agissant des programmes contre les mauvais traitements, les 13 programmes expérimentaux susmentionnés suscitent un grand intérêt de la part des professionnels de l'aide à l'enfance. Par ailleurs, le Ministère des affaires sociales a procédé à diverses recherches. Une recherche qui porte le numéro 4, menée avec l'Université du pays basque, évoque l'élaboration d'un système d'instruments de détection et d'intervention en cas de mauvais traitements qui permettrait de créer des instruments afin que les professionnels de la santé, les personnels de police et les services sociaux puissent détecter les cas de mauvais traitements afin d'intervenir. Un accord a été souscrit avec trois communautés autonomes qui se sont engagées à mettre en oeuvre ce système de détection, d'enregistrement, d'évaluation et d'intervention. La recherche numéro 8, relative aux sévices sexuels perpétrés à l'encontre de mineurs, comporte à une étude rétrospective de sévices sexuels, fondée sur les témoignages de majeurs qui en ont été victimes. La recherche numéro 12 est une étude rétrospective de cas de mauvais traitements en Espagne, menée à partir de l'analyse de dossiers constitués dans toutes les communautés autonomes, concernant des garçons et des filles victimes de mauvais traitements. L'orateur espère disposer, avant la fin de l'année, des résultats de cette recherche qui permettra de savoir de quelle manière fonctionne le système de protection de l'enfance dans les communautés autonomes et comment les services sociaux primaires de toutes les communautés autonomes s'occupent des cas de mauvais traitements.

66. Le PRESIDENT indique que l'examen du rapport initial de l'Espagne se poursuivra à la prochaine séance avec les sections "Milieu familial et protection de remplacement", "Santé et bien-être" et "Mesures spéciales de protection de l'enfance" de la liste de points CRC/C.7/WP.1.

La séance est levée à 17 h 55.

-----

©1996-2001
Office of the United Nations High Commissioner for Human Rights
Geneva, Switzerland