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Pacte international

relatif aux droits civils

et politiques

 

 

 

 

                                                                                                         Distr.

                                                                                                         GENERALE

 

                                                                                                         CCPR/C/SR.1419

                                                                                                         18 juillet 1995

 

                                                                                                         Original : FRANCAIS

 

 

 

 

COMITE DES DROITS DE L'HOMME

 

Cinquante-quatrième session

 

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1419ème SEANCE

 

tenue au Palais des Nations, à Genève,

le mardi 11 juillet 1995, à 15 heures.

 

Président : M. M. AGUILAR URBINA

                            puis                              : M. EL SHAFEI

 

 

SOMMAIRE

 

 

Examen des rapports présentés par les Etats parties conformément à l'article 40 du Pacte (suite)

 

          Ukraine (suite)

 

 

 

 

 

 

 

__________

 

          Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

 

          Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également portées sur un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

 

          Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques de la présente session seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la clôture de la session.

 

GE.95-17485 (F)

La séance est ouverte à 15 h 5.

 

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES CONFORMEMENT A L'ARTICLE 40 DU PACTE (point 4 de l'ordre du jour) (suite)

 

Quatrième rapport périodique de l'Ukraine (CCPR/C/95/Add.2; M/CCPR/C/54/LST/UKR/4) (suite)

 

1.       Sur l'invitation du Président, M. Krukov, M. Shamshur et M. Semashko (Ukraine) reprennent place à la table du Comité.

 

2.       Le PRESIDENT remercie la délégation ukrainienne de ses réponses aux questions posées dans la section I de la Liste des points à traiter (M/CCPR/C/54/LST/UKR/4), et il invite les membres du Comité qui souhaitent obtenir des précisions à poser des questions supplémentaires.

 

3.       Mme EVATT remercie le Gouvernement ukrainien de la franchise avec laquelle il a reconnu, dans son quatrième rapport périodique, les problèmes et les difficultés auxquels il faisait face dans la période de transition que connaissait le pays, et la nécessité de mettre en place de nouvelles institutions. Elle félicite également la délégation ukrainienne de la sincérité avec laquelle elle a répondu aux questions écrites posées par le Comité.

 

4.       Le rapport de l'Ukraine ne contient apparemment guère de renseignements sur l'état d'avancement du processus d'élaboration d'une nouvelle Constitution. Néanmoins, Mme Evatt croit savoir que l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a indiqué que la nouvelle Constitution ukrainienne comporterait une liste des droits civils et politiques, ainsi que des droits économiques, sociaux et culturels qui y seraient garantis. A cet égard, elle souhaiterait savoir si la nouvelle Constitution contiendra des dispositions, conformes à celles de l'article 2 du Pacte, prévoyant des moyens de recours pour les particuliers dont les droits auraient été violés. Elle demande en outre si la cour constitutionnelle qu'il est envisagé de créer sera habilitée à invalider les lois qui seraient en contradiction avec les dispositions du Pacte et pourra offrir des recours appropriés. Elle souhaiterait aussi savoir quels progrès ont été réalisés jusqu'à présent dans la réforme et la rationalisation du système judiciaire.

 

5.       En ce qui concerne la situation des étrangers, notamment des réfugiés et des travailleurs migrants, Mme Evatt demande si ces derniers jouissent des mêmes droits et libertés que le reste de la population, par exemple dans le domaine de la circulation et de la participation aux affaires publiques, et quel est leur nombre. Elle se demande s'ils ne constituent pas en réalité des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques au sens de l'article 27 du Pacte et si, à ce titre, ils n'ont pas droit à une protection spéciale. En tout état de cause, il convient dans ce domaine d'adopter une attitude souple et de tenir compte du choix de chaque individu. A ce sujet, le Gouvernement ukrainien pourra utilement se référer à l'Observation générale No 23 (50) du Comité, concernant l'article 27.

 

 

6.       Enfin, Mme Evatt constate, d'après le rapport lui-même, que les femmes en Ukraine sont en situation d'infériorité, notamment dans les domaines de l'emploi, des soins de santé et de la participation à la vie de la société, ce qui ne s'explique probablement pas uniquement par la crise économique. A cet égard, le processus d'élaboration d'une nouvelle Constitution ne pourrait-il pas être l'occasion d'offrir aux femmes la possibilité de participer sur un pied d'égalité à la rédaction d'une nouvelle législation ? Par ailleurs, des mesures ont-elles été prises pour lutter contre la violence dont les femmes sont victimes ?

 

7.       M. El Shafei prend la présidence.

 

8.       M. KLEIN souhaite obtenir des précisions sur la notion de minorités telle qu'elle a cours en Ukraine. En effet, la délégation ukrainienne a indiqué qu'il existait dans le pays une centaine de groupes nationaux, mais il serait intéressant de savoir combien de minorités sont officiellement reconnues ou enregistrées en tant que telles, conformément à la loi ukrainienne sur les minorités nationales et à la Déclaration sur les droits des nationalités de l'Ukraine. Ainsi, la loi sur les minorités nationales donne une définition juridique de la minorité nationale, à savoir un groupe de citoyens ukrainiens qui n'étaient pas citoyens par nationalité et qui ont en commun un sentiment d'auto-identification nationale. Or M. Klein s'interroge sur la façon dont ce sentiment est reconnu : les différents individus de la communauté considérée sont-ils libres d'en décider ou certains organes de l'Etat appliquent-ils des critères objectifs pour en juger ? Par exemple, la minorité allemande ou les Tatars de Crimée sont-ils reconnus comme minorités nationales, alors qu'à leur retour en Ukraine nombre d'entre eux n'ont pas été autorisés à acquérir la citoyenneté ukrainienne ? La délégation ukrainienne pourra aussi utilement fournir davantage de renseignements sur le statut des personnes qui appartiennent à des minorités autres que les minorités nationales telles qu'elles sont reconnues dans la loi ukrainienne.

 

9.       M. BHAGWATI félicite, lui aussi, le Gouvernement ukrainien de la franchise avec laquelle il a exposé dans son rapport les difficultés rencontrées et les lacunes qui persistent dans la gestion économique et politique du pays. Si ces difficultés sont compréhensibles dans la période de transition que connaît l'Ukraine, il reste que certains problèmes de fond font naître légitimement des interrogations. Premièrement, M. Bhagwati souhaiterait être informé de l'état d'avancement du processus de rédaction de la nouvelle Constitution, et savoir quelle est la teneur de l'accord constitutionnel signé entre le Président et le Parlement; de même, il aimerait savoir si la commission Constitutionnelle existe toujours et, dans l'affirmative, quel est son rôle. En outre, il croit comprendre que la cour constitutionnelle qui a été en principe créée n'a pas pu entrer en fonctions car ses magistrats n'ont pas encore été nommés. Il demande si des progrès ont été aussi réalisés à cet égard. Autre question que M. Bhagwati voudrait poser : puisque - comme la délégation ukrainienne l'a indiqué - le Pacte, de même que les autres instruments internationaux auxquels l'Ukraine est partie, a été incorporé dans la législation nationale, quelle est l'instance qui, en l'absence de cour constitutionnelle, est compétente pour trancher en cas de


conflit entre les obligations découlant du Pacte et les dispositions de la Constitution ? En outre, si les dispositions de la Constitution ne sont pas conformes à celles du Pacte, comment les droits énoncés dans ce dernier instrument sont-ils mis en oeuvre ?

 

10.     M. Bhagwati croit comprendre que les magistrats en place n'ont pas changé depuis que l'Ukraine a acquis le statut d'Etat indépendant, et il se demande en conséquence s'ils conservent toujours l'idéologie qui était la leur auparavant ou s'ils ont désormais adopté les valeurs de la démocratie, dans le respect du principe de l'indépendance du pouvoir judiciaire. Il souhaiterait également être informé de l'évolution de la tendance - mentionnée au paragraphe 40 du rapport - qui vise à "étendre la législation relative à la défense des droits et des libertés des citoyens et à réduire l'étendue des pouvoirs de l'administration". A propos de l'état d'urgence, qui fait l'objet du paragraphe 43 du rapport, il demande quelles seraient les incidences de la déclaration d'état d'urgence en vertu de la loi de juin 1992 et, en particulier, si l'exercice de certains des droits énoncés dans le Pacte pourrait être alors suspendu, y compris celui des droits auxquels, conformément à l'article 4, les Etats parties ne peuvent pas déroger.

 

11.     Pour ce qui est de l'enseignement des droits de l'homme, M. Bhagwati fait observer que cet enseignement doit s'adresser non seulement à la population en général, mais également aux fonctionnaires de l'Etat, qui doivent tout particulièrement être familiarisés avec les droits énoncés dans le Pacte. Il reste que l'enseignement des droits de l'homme pourrait être utilement dispensé dans les établissements scolaires et les universités, afin de sensibiliser les jeunes générations. Par ailleurs, étant donné le faible niveau de revenu de la population ukrainienne, le gouvernement envisage-t-il de mettre en place des services d'aide judiciaire pour veiller à ce que tous les particuliers puissent faire valoir leurs droits ? Dans le même ordre d'idée, la nouvelle Constitution contiendra-t-elle des dispositions permettant aux organisations non gouvernementales ou aux organisations de bénévoles de venir en aide aux citoyens qui seraient victimes de violations de leurs droits de la part de l'Etat ou de ses représentants ? Enfin, M. Bhagwati partage les opinions de Mme Evatt et de M. Klein en ce qui concerne la question des minorités nationales.

 

12.     Mme MEDINA QUIROGA félicite le Gouvernement ukrainien de l'excellente qualité de son rapport. Elle s'associe aux questions déjà posées par les membres du Comité en ce qui concerne l'application de la loi sur l'état d'urgence, le mécanisme de mise en oeuvre des droits énoncés dans le Pacte, la question du Protocole facultatif et celle de la place du Pacte dans la législation interne. Par ailleurs, elle retire de la lecture du rapport l'impression qu'en Ukraine les responsables de la protection des droits de l'homme sont essentiellement les autorités politiques ou administratives, et que le rôle du pouvoir judiciaire et des tribunaux dans ce domaine est secondaire. Si tel est le cas, la nouvelle Constitution comportera-t-elle des dispositions prévoyant un pouvoir accru de l'appareil judiciaire dans le domaine considéré ?

 

 


13.     En ce qui concerne l'enseignement, notamment celui des droits de l'homme, les autorités ukrainiennes ont-elles envisagé, pour pouvoir s'adresser efficacement à la population, de recourir plus largement à la diffusion d'ouvrages et de journaux, ainsi que d'émissions de radio et de télévision ?

 

14.     Enfin, il semblerait, d'après la délégation ukrainienne, que la situation inférieure des femmes s'explique par la crise économique. Or cela est à première vue surprenant car il n'existe pas de raisons évidentes pour lesquelles les femmes seraient davantage touchées que les hommes par la situation économique. Sans doute cette infériorité s'explique-t-elle plutôt par le rôle secondaire qui est traditionnellement dévolu aux femmes en Ukraine. Mme Medina Quiroga demande si le Gouvernement ukrainien a l'intention de prendre des mesures pour redresser cette inégalité culturelle.

 

15.     M. ANDO félicite le Gouvernement ukrainien de figurer parmi le petit nombre des gouvernements d'Etats parties qui ont présenté leur rapport périodique dans les délais prescrits.

 

16.     La délégation ayant indiqué que tous les instruments internationaux auxquels l'Ukraine était partie étaient incorporés à la législation nationale, M. Ando souhaiterait savoir si, lorsqu'une décision de justice est contraire aux obligations découlant du Pacte, la législation interne en vertu de laquelle la décision a été rendue est automatiquement annulée ou modifiée ou si la question est portée devant le Parlement.

 

17.     Deuxièmement, M. Ando considère, lui aussi, que la situation économique ne peut pas à elle seule expliquer que les femmes aient un statut inférieur, et il souhaiterait être plus amplement informé des raisons de cette discrimination ainsi que des mesures qui sont prises pour l'éliminer. En troisième lieu, il demande si les ouvrages sur les droits de l'homme et les normes applicables en la matière ont été traduits dans les langues des minorités nationales.

 

18.     M. POCAR s'associe pleinement aux questions qui ont été posées par les autres membres du Comité. Il ajoute, à propos de l'application de l'article 27 du Pacte, qu'il ne s'agit pas des "droits des minorités", mais plutôt des droits des "personnes appartenant à des minorités". Au sujet de la loi ukrainienne sur les minorités nationales et de la Déclaration sur les droits des nationalités de l'Ukraine, il souhaiterait savoir quel est le rang respectif des deux textes dans l'ordre juridique interne : la Déclaration a-t-elle seulement valeur de principes directeurs, alors que la loi énoncerait des droits directement applicables ?

 

19.     Le PRESIDENT invite la délégation ukrainienne à répondre aux questions orales posées par les membres du Comité à propos de la section I de la Liste des points à traiter.

 

20.     M. KRUKOV (Ukraine) déclare qu'il s'efforcera, pour plus de facilité et par souci de concision, de répondre de façon groupée aux nombreuses questions détaillées qui ont été posées par les membres du Comité.

 

21.     En premier lieu, la délégation ukrainienne comprend la préoccupation exprimée par les membres du Comité à propos du processus d'élaboration de la nouvelle Constitution ukrainienne. A ce sujet, il convient de rappeler que la Commission constitutionnelle a été créée alors que l'Ukraine n'était pas encore un Etat indépendant et n'envisageait pas de le devenir. Ceux qui ont été appelés à en faire partie étaient donc des personnes dont l'idéologie et les conceptions en ce qui concerne la société dataient de l'époque antérieure au 30 juin 1991, date des événements qui ont profondément modifié le monde de l'ex-URSS. Certes, ces conceptions ne correspondaient pas aux aspirations de la population d'un Etat indépendant, mais la composition de la Commission constitutionnelle n'a néanmoins pas changé, et M. Krukov a pu constater lui-même que l'incertitude politique régnant en Ukraine continuait d'être reflétée dans le projet de constitution. En effet, outre la crise économique qui a été largement évoquée, l'Ukraine traverse parfois des crises politiques qui sont le reflet d'une crise de conscience parmi les communautés constituant la société. C'est ainsi qu'en Ukraine il faudra sans doute attendre une nouvelle génération pour obtenir une société homogène composée d'individus exerçant pleinement leurs droits civils et politiques, et c'est pourquoi le projet de constitution n'a pas encore pu être adopté.

 

22.     Plusieurs projets ont d'ailleurs été élaborés. Il convient de souligner à cet égard que chacun contenait un chapitre consacré aux droits de l'homme et, de façon générale, à tous les droits énoncés dans les instruments internationaux auxquels l'Ukraine est partie, en particulier le Pacte, et qu'il s'agit de l'un des chapitres qui ont été le moins remaniés, alors que les chapitres concernant, par exemple, l'organisation de l'autorité de l'Etat, certains mécanismes économiques ou encore le système judiciaire ont été largement transformés à plusieurs reprises. Dans l'intervalle et jusqu'à l'adoption de la nouvelle Constitution, l'important est de veiller au bon développement de la société sur la base des lois constitutionnelles déjà en vigueur, c'est-à-dire l'accord constitutionnel et la loi sur les autorités de l'Etat et l'autonomie locale. En outre, la Constitution de 1978 reste en vigueur, mais uniquement en ce qui concerne celles de ses dispositions qui ne sont pas en contradiction avec les lois constitutionnelles ultérieures. Les autorités ukrainiennes estiment qu'il faut éviter de hâter l'adoption d'une nouvelle Constitution, et qu'il importe de prendre son temps pour rédiger un texte excluant toute contradiction avec les instruments internationaux auxquels l'Ukraine est partie.

 

23.     M. Krukov répond ensuite à la question qui portait sur les violations des droits de l'homme commises sous l'ancien régime et sur le point de savoir si des dédommagements étaient prévus pour les victimes. Une loi a effectivement été adoptée qui prévoit le versement de dommages-intérêts aux victimes de la répression politique. Cette loi, qui est en application, stipule les méthodes d'indemnisation, précise quelles sont les victimes qui ont droit à des indemnités ainsi que les conditions dans lesquelles elles seront dédommagées. Il existe même un système d'évaluation des souffrances subies qui est fonction du nombre de mois de détention. Cette loi ne porte pas sur une période déterminée mais s'applique à tous ceux qui ont connu la période du bolchevisme depuis le début jusqu'à une époque récente.

 

 


24.     Au sujet de la discrimination et de l'antisémitisme en particulier, M. Krukov déclare qu'il n'y a pas de tradition antisémite en Ukraine, pays qui a toujours été relativement tolérant et dont la population comptait du reste beaucoup de juifs, puisque certaines grandes villes en comptait même jusqu'à 40 %. Les juifs ont commencé à quitter l'Ukraine avant l'indépendance et ils sont partis non pas tant pour des raisons d'antisémitisme que parce que motivés par le désir d'un niveau de vie meilleur et d'un climat psychologique plus favorable. Il y a eu certes des publications à caractère antisémite, absolument non officielles, et dans un cas particulier l'auteur a été arrêté et poursuivi, tandis que son journal devait présenter des excuses. En Ukraine, ni les autorités officielles ni l'opinion publique, en règle générale, ne font preuve d'antisémitisme.

 

25.     A propos de l'utilisation de la langue ukrainienne devant les tribunaux, la délégation précise qu'il est possible, si l'on ne connaît pas l'ukrainien, de se faire assister d'un interprète tant à l'audience que, dans le cas des personnes en détention, pour communiquer avec les magistrats et le procureur.

 

26.     En réponse aux questions posées au sujet du rétablissement de l'institution de la propriété privée (paragraphe 11 du rapport), la délégation ukrainienne explique que les autorités ont considéré qu'il n'était pas possible de restituer leurs biens aux anciens propriétaires, qu'une telle entreprise aurait plus d'inconvénients que d'avantages, et surtout que les difficultés pratiques seraient insurmontables, après quatre générations de régime communiste.

 

27.     Des questions ont été posées à propos des rapports entre le Pacte et le droit interne ukrainien. En vertu d'une loi adoptée dix jours après le référendum ayant confirmé l'indépendance de l'Ukraine, loi qui concerne la mise en vigueur des accords internationaux sur le territoire ukrainien, les accords internationaux ratifiés par l'Ukraine font partie intégrante de la loi interne ukrainienne et de l'ordre juridique qui régit les activités législatives à l'échelle nationale. Cette loi signifie que, si de l'avis d'un citoyen la législation en vigueur n'est pas assez complète et ne tient pas suffisamment compte de ses droits, ou qu'elle entre en conflit avec ses droits, il peut invoquer les accords internationaux conclus par l'Ukraine et s'adresser à toute instance judiciaire, notamment aux tribunaux, pour demander la protection de ses droits conformément à tel ou tel article d'un accord international, y compris le Pacte. Par ailleurs, il existe dans la législation ukrainienne un principe selon lequel, en cas de divergence entre la loi interne et la norme internationale, c'est la norme internationale qui l'emporte.

 

28.     En réponse aux questions posées au sujet du premier Protocole facultatif et des décisions du Comité, la délégation ukrainienne précise que celles-ci seront examinées en fonction des cas concrets correspondants. Il n'existe pas de mécanisme chargé d'examiner à titre complémentaire les décisions judiciaires en Ukraine. En revanche, il existe des moyens qui permettent d'obtenir rapidement l'application des décisions, soit par les organes judiciaires soit par l'administration de l'Etat, toujours en fonction du cas concret dont il s'agit. Pour ce qui est des réparations ou dommages-intérêts à verser aux personnes qui ont été lésées, mises en détention ou même condamnées


sans motif, il existe une réglementation dont l'entrée en vigueur était fixée au 1er décembre 1994 qui permet de régler toutes les questions de réparation pour préjudice matériel ou moral.

 

29.     A propos des minorités, M. Krukov reconnaît que, dans cette rubrique du rapport (par. 220 à 229), le problème est traité sous le seul angle des minorités nationales car il s'agit d'un phénomène qui préoccupe particulièrement les autorités ukrainiennes et qui est d'une grande actualité. Mais il y a d'autres minorités dans la population, et une loi spéciale a été adoptée au sujet des garanties à apporter aux éléments les plus vulnérables de la société, y compris aux handicapés. Il faut que les personnes souffrant de déficiences physiques puissent exercer les mêmes droits que les autres, grâce notamment à la mise en place d'infrastructures adaptées qui leur permettent de prendre part dans toute la mesure possible à la vie sociale. Le problème des personnes handicapées, qui n'était guère considéré comme important autrefois, a fait l'objet d'une prise de conscience particulière depuis la guerre d'Afghanistan, et on s'emploie aujourd'hui à prendre des mesures à leur intention. Toujours au sujet des minorités, il convient de signaler que depuis le 12 décembre 1991, les relations ou les comportements homosexuels ne constituent plus une infraction punie par le Code pénal (voir paragraphe 129 du rapport).

 

30.     M. Aguilar Urbina reprend la présidence.

 

31.     M. KRUKOV (Ukraine) rappelle qu'on a demandé si des violations commises dans le passé peuvent faire l'objet de poursuites aujourd'hui. Il répond que certaines peuvent l'être mais pas toutes. En effet, la législation en vigueur comprend une disposition sur le délai de prescription relatif à la responsabilité pénale, délai fixé séparément pour chaque infraction en fonction de la peine maximale applicable à celle-ci. Si le Code pénal prévoit une peine de cinq ans pour une infraction, le délai de prescription, qui court à partir du moment où l'infraction est découverte, sera de cinq ans. Cette disposition n'est certes pas conforme aux normes du droit international en ce qui concerne le génocide et les crimes de guerre, où il n'y a pas de prescription. D'ailleurs, il y a peu de temps encore, des personnes ont fait l'objet de poursuites en Ukraine pour des actes commis pendant la première guerre mondiale .

 

32.     Au sujet de la séparation des pouvoirs et du rôle des juges et des tribunaux, il est vrai que le rapport insiste sur le fait que la séparation entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif est insuffisante (par. 17), mais ce document a été rédigé il y a un an. Dans l'intervalle, une loi a été adoptée qui délimite les attributions du pouvoir législatif et celles du pouvoir exécutif. Le Conseil suprême a perdu les fonctions exécutives qu'il avait héritées du passé. Alors qu'auparavant les juges des juridictions supérieures étaient nommés par le Conseil suprême après que leur candidature avait été présentée par le Président, et les juges de rang inférieur par la population, aujourd'hui tous les juges de rang inférieur sont nommés directement par le Président et seuls les juges de la Cour suprême, du tribunal d'arbitrage ou de la Cour constitutionnelle sont nommés par le Conseil suprême et par le Président, conjointement, ce qui garantit une certaine indépendance.

 

33.     Une série de lois consacrées au statut des juges et au déroulement de la procédure judiciaire ont été adoptées (voir paragraphe 110 et suivants du rapport). Pour garantir l'indépendance des juges, il faut un mécanisme propre à assurer leur autonomie et, à cet effet, la loi prévoit la création d'un ordre ou conseil de la magistrature, afin que les juges soient jugés par leurs pairs, ainsi que la formation professionnelle des juges. Ces lois sont récentes, puisque celle qui concerne l'autonomie du pouvoir judiciaire date du 2 février 1994; elles ne sont pas encore appliquées, mais elles existent néanmoins. L'indépendance totale des juges est encore un idéal, un objectif que l'Ukraine a souhaité atteindre en transformant les pratiques staliniennes d'autrefois (comme la "loi du téléphone" mentionnée au paragraphe 109) et en donnant aux juges un statut concret qui garantisse leur indépendance même s'il ne la proclame pas formellement. La loi énonçant ce statut remonte à quelques années déjà et elle a même subi quelques modifications qui permettent d'en contrôler l'application. M. Krukov pense avoir répondu ainsi aux nombreuses questions qui ont été posées au sujet du paragraphe 17 du rapport.

 

34.     A propos de ce qui est dit au paragraphe 19 du rapport, il faut reconnaître que le chiffre de 200 dollars des Etats-Unis indiqué pour le revenu annuel de la très grande majorité de la population n'est pas loin de la vérité. Mais à ce sujet, il faut signaler deux lois qui permettent en quelque sorte d'atténuer les difficultés matérielles de la population en modifiant la structure des revenus. D'une part, à la fin des années 70, l'Ukraine, pays riche en terres, a encouragé la propriété privée du citoyen, et le phénomène a pris une telle ampleur qu'aujourd'hui un grand nombre de villes ukrainiennes se vident le samedi et le dimanche lorsque la saison est venue de planter les pommes de terre ou de semer les céréales. L'autre mesure importante a consisté à annuler pratiquement l'interdiction d'avoir un travail supplémentaire, qui a été en vigueur pendant 70 ans. Une liste précisait quelles étaient les personnes visées par cette interdiction, dont M. Krukov a d'ailleurs fait partie. Cette pratique n'étant plus interdite, nombreuses sont les personnes qui aujourd'hui ne vivent pas d'un seul salaire, ce qui assure un meilleur niveau de vie.

 

35.     En ce qui concerne les communications reçues par le Comité en provenance d'Ukraine puis transmises aux autorités ukrainiennes, M. Krukov précise que le Comité a envoyé cinq communications aux autorités ukrainiennes en indiquant qu'il n'avait pas pu connaître des cas exposés dans ces communications étant donné que les auteurs n'avaient pas épuisé tous les recours internes. Au sujet des plaintes émanant de la population en général, M. Krukov explique qu'il existe en Ukraine des audiences présidentielles qui se tiennent deux fois par semaine, de 10 heures à 18 heures, et au cours desquelles des particuliers viennent présenter des plaintes faisant état de diverses violations de leurs droits. Ces plaintes, qui sont très nombreuses et concernent souvent des problèmes matériels, notamment de logement, sont ensuite examinées par un groupe de collaborateurs, dont M. Krukov fait partie. Il serait évidemment souhaitable que les autorités aient davantage de moyens pour donner satisfaction aux requérants.

 

36.     On a demandé si le fait que certaines dispositions du Pacte ne sont pas respectées s'expliquait par les réformes ou les difficultés économiques. M. Krukov répond que, si les problèmes économiques ne diminuent en rien l'obligation qu'a l'Etat de respecter le Pacte, ils constituent effectivement une tentative d'explication objective. L'Ukraine n'a malheureusement que des moyens très limités, qui ne lui permettent pas d'assumer les mêmes responsabilités que les pays développés. Il s'agit d'un problème intérieur auquel les autorités cherchent activement des solutions.

 

37.     Au chapitre de la diffusion des instruments internationaux auxquels l'Ukraine est partie, le pays peut faire état de certaines réalisations ces dernières années, surtout si l'on compare la situation avec ce qu'elle était du temps de l'ex-URSS, laquelle n'a signé la Déclaration universelle des droits de l'homme que 25 ans après sa proclamation et en a publié le texte en 1981 seulement. Il reste toutefois beaucoup à faire. Des manuels sont en préparation; M. Krukov, pour sa part, préside une commission de juristes qui est chargée notamment d'un programme de réforme de l'enseignement du droit humanitaire en Ukraine et de l'élaboration de manuels sur tous les aspects de l'enseignement des normes humanitaires destinés à l'enseignement primaire, secondaire et universitaire. Une commission s'occupe également de la réforme de l'enseignement du droit. Le matériel didactique destiné à aider les enseignants est élaboré sur la base de situations concrètes et conçu de manière à faire évoluer les mentalités. L'Ukraine se sert aussi beaucoup de ce qu'elle reçoit de ses partenaires étrangers, qui ont d'excellents manuels destinés aux enfants et aux autres groupes d'âge. Il est fait appel à l'initiative privée pour éditer les manuels en question, et M. Krukov cite un programme financé par un particulier, M. G. Soros, qui assure, en liaison avec le Ministère de l'éducation, l'édition d'un manuel très novateur élaboré sur des bases concrètes et non idéologiques. Comme on le voit, il y a dans ce domaine concours d'actions privées et publiques et la délégation ukrainienne a bon espoir que les choses évolueront favorablement en ce qui concerne la diffusion des connaissances relatives aux droits de l'homme.

 

38.     Pour ce qui est de la situation des femmes, l'exposé de la délégation ukrainienne qui, soucieuse de transparence, a mis en évidence les aspects négatifs, a pu donner au Comité l'impression que rien n'était fait en faveur de la population féminine, ce qui n'est pas le cas. Il reste que, dans ce domaine comme dans tous les autres, les difficultés économiques empêchent de progresser autant que les autorités le souhaitent. Le Parlement a entrepris d'étudier les moyens d'améliorer la condition de la femme dans tous les domaines, en particulier pour ce qui est de la réalisation des droits. Ainsi, une attention particulière est portée aux droits des mères, mais il y a une grande différence entre la législation et la pratique, toujours en raison des difficultés économiques. Ainsi, les femmes ont droit à un congé de maternité dont la durée a été allongée, des allocations de maternité sont prévues, et même la femme a le droit de se mettre en disponibilité pendant trois ans pour élever un enfant, tout en ayant l'assurance de retrouver son poste. Toutefois, très peu de femmes peuvent se permettre de se prévaloir de cette dernière possibilité.

 

39.     Si la participation des femmes à la vie politique est insuffisante, surtout dans les organes du pouvoir, il en va autrement dans d'autres domaines, et en particulier dans l'organisation judiciaire, où l'on dénombre une proportion très importante de femmes magistrats.

 

 


40.     Les violences à l'égard des femmes existent en Ukraine comme ailleurs. L'appareil répressif prévoit des peines lourdes, mais il va sans dire que les dispositions pénales ne suffisent pas. Il faut changer les mentalités en vue d'éliminer non seulement les agressions physiques dont les femmes peuvent être victimes, mais aussi les pressions et atteintes d'ordre psychique, ce qui ne peut s'obtenir que par l'éducation. En tout état de cause, la République d'Ukraine a la conviction qu'il est dans l'intérêt de la société dans son ensemble de garantir les droits fondamentaux de l'être humain à tous les groupes de la société sans exception, et elle est par conséquent soucieuse d'améliorer la condition de la femme.

 

41.     En ce qui concerne la hiérarchie des lois, la règle est que les normes constitutionnelles sont d'application directe. Toutefois, dans la pratique, cette règle n'a guère d'utilité, car les dispositions constitutionnelles sont généralement développées et précisées par une législation suffisamment complète pour rendre l'application directe superflue. Il faut bien entendu que la loi ne soit pas contraire à la Constitution. En cas de conflit, c'est évidemment la norme constitutionnelle qui s'applique.

 

42.     Il est vrai qu'à ce jour la cour constitutionnelle, dont la création est dûment prévue, n'a toujours pas été constituée. En trois ans, le Parlement n'a pas réussi à adopter une constitution, ce qui montre bien qu'il existe un certain blocage juridique dû à l'affrontement d'un grand nombre d'opinions divergentes. Pour la cour constitutionnelle un président avait même été désigné, qui est resté à la tête d'un organe qui n'existait pas. On peut regretter cet état de choses mais on peut aussi, étant donné que la modification de la Constitution en est toujours quasiment au point mort, s'interroger sur l'utilité d'une cour constitutionnelle. Le principe est acquis, il n'y a pas lieu de dramatiser car la situation se débloquera en temps voulu.

 

43.     La législation sur l'état d'urgence a fait l'objet d'interrogations de la part de certains membres du Comité. Cette législation est très étendue, et la délégation ukrainienne se limitera à rappeler les motifs qui peuvent être invoqués pour prendre cette mesure d'exception : catastrophes naturelles, interruption grave du fonctionnement des services publics, troubles de l'ordre public, danger grave pour le fonctionnement des organes de l'Etat ou pour les organes locaux, tentatives visant à empêcher les autorités de fonctionner, risques de modification des frontières. L'état d'urgence peut être proclamé sur l'ensemble du territoire ou sur une partie seulement. Il est obligatoire de rendre publique la proclamation de l'état d'urgence en en précisant la durée. Dans les cas d'extrême gravité, l'état d'urgence peut être proclamé avec effet immédiat.

 

44.     Pour ce qui est de la différence entre citoyenneté et nationalité, il faut savoir que le terme de nationalité recouvre une réalité ethnique et non juridique. Le droit à la citoyenneté est garanti mais il n'existe pas un droit à la nationalité. Pour cette raison, les autorités ont éliminé la mention de l'appartenance ethnique ("nationalité") qui figurait sur le passeport de l'URSS. Il n'en reste pas moins que les membres des groupes ethniques ont des droits garantis au même titre que les citoyens d'Ukraine. Soucieux de limiter


le plus possible les cas d'apatridie, le législateur ukrainien a décidé que tout enfant né sur le territoire ukrainien de parents apatrides ou inconnus acquiert automatiquement la citoyenneté.

 

45.     La question se pose de savoir comment on détermine la qualité de membre d'une minorité. D'après la Déclaration sur les droits des nationalités de l'Ukraine (voir paragraphe 220 et suivants du rapport), est membre d'un groupe minoritaire quiconque n'est pas de souche ukrainienne, a un mode de vie particulier et est animé d'un sentiment d'appartenance à sa communauté d'origine. Même un groupe très peu nombreux peut entrer dans cette catégorie s'il répond à ces critères. Certes, une Déclaration n'a pas la force d'une loi, et il reste que les membres des minorités nationales ne sont pas des citoyens, au sens de la loi sur la nationalité ukrainienne de 1991. Il s'agit là d'un point important sur lequel la délégation ukrainienne appellera l'attention des autorités pour qu'elles y consacrent la réflexion nécessaire. Il est certain que la société ukrainienne aurait tout à gagner si, par exemple, les personnes d'origine allemande revenues sur le territoire ukrainien se voyaient accorder la citoyenneté et décidaient par conséquent de demeurer sur le territoire. Une ère nouvelle s'ouvre aujourd'hui pour l'Ukraine et tout porte à croire qu'avec la volonté et la réflexion voulues, la situation évoluera dans le sens d'une amélioration de la loi.

 

46.     Un membre du Comité a demandé s'il existait des mesures de soutien et d'aide aux personnes défavorisées. Des programmes existent effectivement, mais il faut reconnaître que les prestations accordées sont très faibles, en raison du budget limité de l'Etat.

 

47.     En ce qui concerne l'action engagée pour mieux assurer le respect des droits de l'homme, il faut bien voir que le rapport soumis au Comité est non seulement le premier rapport de l'Ukraine indépendante, mais aussi le premier rapport d'une Ukraine démocratique, qui a des défauts dont elle ne cherche pas à se cacher, tout au contraire. Les autorités ukrainiennes ont pleinement conscience de l'effort qui reste à faire pour assurer la défense des droits de l'homme. Tout récemment une séance du Cabinet ministériel a été consacrée à un débat sur les moyens politiques à mettre en oeuvre à cette fin compte tenu des obligations contractées par l'Etat. A cette séance, le Cabinet ministériel a examiné un document contenant divers projets, dont la délégation ukrainienne pourra exposer les grandes lignes aux membres du Comité qui émettront le souhait d'en savoir davantage. Diverses institutions sont prévues ou existent déjà pour assurer la défense des droits de l'homme. La création d'une institution équivalant à celle d'un ombudsman est prévue, et il existe une commission des droits de l'homme au sein du Conseil suprême; d'autre part, divers services du cabinet ministériel s'occupent des questions humanitaires. Il est prévu de prendre des mesures pour assurer une bonne coordination des activités de chacun de ces services et organes.

 

48.     Dans le cadre de la promotion des droits de l'homme, on a entrepris de renforcer considérablement le rôle des tribunaux, et les progrès sont grands par rapport à la situation précédente, puisque quasiment tous les litiges visés par la loi peuvent être tranchés par des tribunaux ordinaires, alors que naguère les citoyens ne pouvaient recourir qu'à la voie administrative. D'une façon générale, le législateur a déjà accompli une tâche immense mais l'incorporation d'une dimension relative au respect des droits de l'homme dans la législation est un travail de très longue haleine. Le développement des organes d'information, de la presse écrite, de la radio et de la télévision, qui est évidemment nécessaire, prendra aussi beaucoup de temps.

 

49.     Le PRESIDENT invite la délégation ukrainienne à répondre aux questions de la section II de la liste des points à traiter (M/CCPR/C/54/LST/UKR/4), qui se lit comme suit :

 

          "II.      Droit à la vie, traitement des prisonniers et autres détenus, liberté et sécurité de la personne et droit à un procès équitable (art. 6, 7, 9, 10 et 14)

 

a)Combien de fois et pour quels délits la peine de mort a-t-elle été imposée et la sentence exécutée depuis la présentation du rapport ? La peine de mort a-t-elle été abolie pour les hommes de plus de 65 ans et pour les femmes comme il est indiqué au paragraphe 47 du rapport ? Le nouveau Code pénal de l'Ukraine a-t-il été adopté et, dans l'affirmative, veuillez préciser pour quels délits la peine de mort reste en vigueur (voir paragraphes 44 à 47 du rapport) ?

 

b)Quels sont les règles et règlements régissant l'utilisation des armes par la police et les forces de sécurité (voir paragraphe 49 du rapport) ?

 

c)Quelles mesures spécifiques ont été prévues pour assurer l'application des dispositions de la loi sur la protection de l'environnement visant à protéger le droit à la vie contre les risques de catastrophes nucléaires, en particulier à la suite de l'accident de la centrale de Tchernobyl (voir paragraphe 53 du rapport) ?

 

d)Veuillez préciser de quelle manière les articles 108-3 et 108-4 du Code pénal ukrainien qui porte sur la responsabilité en cas de contamination par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) sont appliqués dans la pratique et indiquer dans quelle mesure ils sont compatibles avec les articles 17 et 19 du Pacte (voir paragraphe 56 du rapport).

 

e)Quels problèmes ont été constatés comme suite aux informations qui sont parvenues au parquet et aux responsables de l'application des lois concernant les cas de torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et quelles mesures ont été prises comme suite à ces constatations ? Veuillez préciser les mesures concrètes qui ont été prises pour surmonter les difficultés à cet égard et, de manière générale, pour assurer le strict respect de l'article 7 du Pacte (voir paragraphe 66 du rapport).

 

f)Compte tenu de l'abrogation de l'article 214 du Code pénal ukrainien, veuillez préciser quelles mesures administratives peuvent encore être prises à l'encontre des vagabonds (voir paragraphe 76 du rapport).

 

g)Quels progrès ont été réalisés dans le règlement des problèmes mentionnés aux paragraphes 92 à 95 du rapport à la suite de l'adoption, en janvier 1994, d'un arrêté ministériel introduisant des programmes destinés à rendre conformes aux normes internationales les conditions de détention dans les prisons ukrainiennes ?

 

h)Veuillez fournir des renseignements sur les conditions de détention dans les établissements de rééducation par le travail, dont il est question au paragraphe 95 du rapport.

 

i)Veuillez préciser quelle a été l'incidence de la loi sur les mesures organisationnelles et juridiques de lutte contre le crime organisé (30 juin 1993) sur la mise en oeuvre des droits énoncés dans le Pacte (voir paragraphe 50 du rapport).

 

j)Compte tenu de l'adoption récente de la loi sur le ministère public, de la loi sur le statut des juges, de la loi sur l'indépendance du pouvoir judiciaire et de la loi sur la cour constitutionnelle, mentionnées aux paragraphes 110 à 113 du rapport, veuillez indiquer quels ont été les progrès réalisés dans la pratique en vue de la pleine application de l'article 14 du Pacte, et comment l'indépendance et l'impartialité du pouvoir judiciaire sont garanties dans la pratique."

 

50.     M. KRUKOV (Ukraine), répondant à la question de l'alinéa a), fait observer que les chiffres relatifs à 1992 et 1993 figurent dans le rapport (CCPR/C/95/Add.2). En ce qui concerne le nombre des condamnations à mort qui ont été prononcées en 1994, la délégation ukrainienne ne dispose pas de ce chiffre, mais il est sûrement égal ou supérieur à celui de 1993, compte tenu de l'augmentation constante de la criminalité, d'une part, et du nombre des poursuites pénales engagées en 1994, d'autre part. M. Krukov ajoute qu'en vertu de la législation ukrainienne, la peine de mort n'est pas exécutée dans le cas des personnes de plus de 65 ans et des femmes enceintes. Les autorités sont d'ailleurs de plus en plus favorables à la non-exécution de la peine de mort d'une façon générale. En ce qui concerne le nouveau Code pénal, M. Krukov précise qu'il existe actuellement deux projets, qui recouvrent deux conceptions différentes du droit pénal. Pour l'heure, aucun des deux textes n'a été adopté. Cela étant dit, seuls les crimes d'une extrême gravité sont passibles de la peine de mort, et la liste de ces crimes a été sensiblement réduite ces dernières années. En particulier, la peine de mort n'est plus applicable aux délits économiques.

 

51.     En ce qui concerne le deuxième Protocole, M. Krukov indique que l'Ukraine n'a pas adhéré à cet instrument, et rien ne permet de penser qu'elle le fera à brève échéance. La population ukrainienne n'est pas prête, sur le plan psychologique, à accepter l'abolition de la peine de mort. Certes, cette sanction a été abolie à la fin des années 10, mais elle a été ensuite rétablie par les bolcheviques. De l'avis de M. Krukov, la société ukrainienne ne reconnaît pas encore pleinement la valeur de la vie humaine, ce qui explique qu'elle n'est pas favorable à l'abolition de la peine capitale.

 

 


52.     En réponse à la question de l'alinéa b), M. Krukov indique qu'une loi a été adoptée récemment, en vertu de laquelle les membres des forces de police peuvent utiliser des armes à feu chargées pour arrêter un délinquant ou un fauteur de troubles, ou lorsqu'ils soupçonnent qu'un délit va être commis. La police doit toutefois faire les sommations d'usage. D'une façon générale, la procédure relative à cette question est assez complexe, mais elle est régie par des normes juridiques précises. Ces normes s'appliquent également à l'utilisation des armes à feu par les forces de sécurité.

 

53.     En réponse à la question de l'alinéa c), M. Krukov précise qu'il a reçu quelque jours auparavant un document de travail concernant un projet de programme d'Etat pour la protection de l'environnement et l'utilisation rationnelle des ressources naturelles de l'Ukraine. Ce document prévoit une série de mesures concertées d'ordre législatif, financier et autres, et vise à centraliser les efforts qui sont faits pour protéger l'environnement.

 

54.     En réponse à la demande formulée à l'alinéa d), M. Krukov indique que, le problème de la contamination par le VIH ne revêtant pas un caractère aigu en Ukraine, les articles correspondants du Code pénal n'ont guère été appliqués jusqu'ici. Il espère que les autorités ne seront pas amenées à les appliquer davantage à l'avenir. A propos de la compatibilité de ces dispositions avec les articles 17 et 19 du Pacte, M. Krukov relève qu'il y a probablement un conflit d'intérêts. A son sens, certains droits ont un caractère plus fondamental que d'autres, en particulier le droit à la vie, et, en cas de conflit avec des droits moins importants, ce sont les premiers qui doivent primer. Toutefois, lorsque l'exercice de deux droits fondamentaux entraîne un conflit d'intérêts, la question doit faire l'objet d'un examen approfondi et les problèmes doivent être résolus cas par cas.

 

55.     Répondant à l'alinéa e), M. Krukov reconnaît que des problèmes existent dans ce domaine, et il souligne qu'il est très difficile de modifier l'état de choses actuel. En effet, comment transformer la mentalité et le comportement de gens qui ont été formés dans le cadre de l'ancien appareil d'Etat, qui était extrêmement répressif ? Ces fonctionnaires sont la plupart du temps toujours en place, ce qui explique en grande partie les difficultés actuelles. Toutefois, une loi a été adoptée récemment qui détermine les responsabilités dans les cas de torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. On distingue plusieurs types de responsabilité : administrative, civile et pénale. Un critère important à cet égard - étant donné qu'on est pour l'instant forcé de fermer les yeux sur certains faits - est la gravité de l'infraction.

 

56.     M. Krukov donne au Comité l'assurance que les autorités ukrainiennes sont pleinement conscientes des problèmes qui se posent dans ce domaine. Le plénum du Soviet suprême s'est d'ailleurs penché la semaine précédente sur la question des conditions de détention et des garanties nécessaires contre la torture et les mauvais traitements. C'est dire l'importance que les autorités attachent à cet aspect des droits de l'homme. Elles envisagent d'ailleurs de s'aligner sur les normes internationales en matière de détention, en particulier l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus.

 

 


57.     En ce qui concerne l'alinéa f), M. Krukov précise que si, dans le passé, l'article 214 du Code pénal punissait le délit de vagabondage, ce dernier n'est aujourd'hui passible que de sanctions administratives (amende, arrestation ou détention).

 

58.     En réponse à la question de l'alinéa g), M. Krukov déclare qu'il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine et que les autorités se sont engagées dans une entreprise de longue haleine, dont l'issue dépendra en grande partie du financement des programmes envisagés.

 

59.     M. Krukov précise, pour répondre à la demande formulée dans l'alinéa h), que les établissements de rééducation par le travail sont destinés aux toxicomanes et aux alcooliques. Ces personnes y effectuent un travail destiné à favoriser leur réinsertion sociale. En effet, elles ont souvent perdu tout statut dans la société et il convient de les aider à en retrouver un. Ainsi, le placement dans un établissement de ce type ne constitue pas un châtiment mais une mesure de réadaptation.

 

60.     En réponse à l'alinéa i), M. Krukov indique que la situation est difficile, compte tenu en particulier de l'augmentation de la criminalité dans le pays. A son sens, les autorités devraient s'inspirer du principe selon lequel tout délit doit être inéluctablement sanctionné. En ce sens, les procédures d'enquête et d'instruction revêtent un caractère essentiel. Les autorités ukrainiennes ont d'ailleurs réorganisé complètement les services d'enquête. Il est prévu de centraliser les procédures et de créer un service central d'enquête, sur le modèle du FBI des Etats-Unis.

 

61.     Le PRESIDENT invite les membres du Comité à poser oralement des questions à la délégation ukrainienne sur les points évoqués dans la section II de la Liste (M/CCPR/C/54/LST/UKR/4).

 

62.     Mme MEDINA QUIROGA voudrait savoir, à propos de la peine de mort, s'il est exact que les exécutions sont tenues secrètes en Ukraine. Par ailleurs, quel est le rôle de la police dans les enquêtes pénales ? Mme Medina Quiroga croit comprendre que la police dispose de pouvoirs très étendus : arrestation, placement en établissement psychiatrique, perquisition, écoutes téléphoniques, interrogatoire des détenus, etc. Un magistrat peut-il intervenir dans l'une ou l'autre de ces procédures, ou les activités de la police sont-elles placées sous la supervision du seul procureur ?

 

63.     Mme Medina Quiroga relève, au paragraphe 89 du rapport (CCPR/C/95/Add.2), l'existence d'une loi sur la détention provisoire. Est-ce la police qui place en détention provisoire ? Quelle est la durée maximale de la garde à vue et de la détention provisoire ? Des recours judiciaires sont-ils possibles ?

 

64.     Enfin, en ce qui concerne le traitement des enfants en situation difficile (délinquants, enfants des rues ou sans famille, etc.), le rapport (CCPR/C/95/Add.2) ne fournit aucune indication. Les autorités ont-elles pris ou envisagent-elles de prendre des mesures concrètes en faveur de ces enfants, eu égard en particulier aux dispositions de l'article 24 du Pacte ?

 

 


65.     M. KRETZMER remercie tout d'abord la délégation ukrainienne pour sa franchise en ce qui concerne les cas de torture et de mauvais traitements infligés par des éléments de la police. Il aimerait cependant savoir quels mécanismes existent pour enquêter dans les cas de plainte. Des policiers ont-ils déjà été poursuivis et, le cas échéant, comment est garantie l'impartialité de l'enquête ?

 

66.     M. Kretzmer aimerait également savoir quel est le statut exact du ministère public. Il s'agit apparemment d'une institution très importante, et M. Kretzmer aimerait de plus amples informations sur la façon dont l'exercice de ses pouvoirs est contrôlé par les autorités.

 

67.     Par ailleurs, M. Kretzmer aimerait des précisions supplémentaires sur la question évoquée au paragraphe 82 du rapport (CCPR/C/95/Add.2), à savoir les modalités pratiques de la préparation de la défense d'un accusé.

 

68.     Pour ce qui est du vagabondage, la délégation ukrainienne n'a apporté que des réponses très générales aux questions posées. M. Kretzmer voudrait savoir quelles mesures concrètes ont été prises par les autorités dans ce domaine, et ce qu'elles envisagent pour l'avenir.

 

69.     Au sujet des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl, M. Kretzmer aimerait savoir quelles mesures les autorités ont prises pour protéger la santé des victimes. Ces dernières ont-elles eu droit à une réparation quelconque ?

 

70.     Enfin, M. Kretzmer a pris note à la fois de ce qui est dit dans le paragraphe 93 du rapport (CCPR/C/95/Add.2) et des propos tenus par la délégation ukrainienne quant à la nécessité de modifier les comportements et les attitudes des fonctionnaires. Il aimerait savoir quelles mesures d'instruction et d'information ont été prises à l'intention des membres de la police.

 

71.     M. BRUNI CELLI relève au paragraphe 46 du rapport (CCPR/C/95/Add.2) que "l'opinion publique n'est pas prête à accepter l'abolition totale de la peine de mort". Mais les autorités sont-elles tenues de suivre l'opinion publique sur ce point ? M. Bruni Celli se demande si les gouvernements doivent nécessairement consulter l'opinion quand il s'agit d'élargir le champ d'application des droits de l'homme. Par exemple, il ne fait aucun doute que, dans certaines sociétés, les mesures visant à protéger les droits des minorités sont impopulaires; cela ne saurait cependant arrêter les gouvernements dans leurs efforts pour améliorer le sort de ces minorités. M. Bruni Celli constate par ailleurs que la peine de mort a été abolie trois fois en Ukraine, en 1917, 1920 et 1947, avant d'être rétablie. En outre, d'après Amnesty International, la République socialiste soviétique d'Ukraine avait coparrainé le projet de deuxième Protocole en 1989. Que s'est-il passé depuis, compte tenu des informations fournies par M. Krukov selon lesquelles l'Ukraine n'envisagerait pas d'adhérer à ce protocole avant un certain temps ?

 

72.     M. BÁN relève le nombre exceptionnellement élevé des exécutions capitales en Ukraine, nombre qu'il estime inacceptable. Il fait observer que, dans la plupart des Etats voisins d'Europe centrale, la peine de mort a été abolie ou n'est pas exécutée. L'Ukraine pourrait suivre leur exemple.

73.     M. Bán relève ensuite, au paragraphe 44 du rapport (CCPR/C/95/Add.2), que certains crimes ne sont punis de la peine de mort que s'ils ont été commis en temps de guerre ou dans une situation de guerre ou de conflit. Que faut-il entendre par "situation de conflit" ?

 

74.     Pour ce qui est de la question du ministère public, M. Bán aimerait avoir des précisions quant aux attributions exactes de cette institution et à la façon dont est garantie son impartialité. D'après le rapport de l'Ukraine (CCPR/C/95/Add.2), le parquet peut ordonner des arrestations et des détentions. Certes, des recours sont possibles contre ce type de décision, mais la procédure prévue alors paraît longue et, d'une façon générale, ces attributions du ministère public pourraient soulever des problèmes de compatibilité avec les dispositions du paragraphe 3 de l'article 9 du Pacte, dans la mesure où le ministère public n'est apparemment pas une "autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires" au sens de cette disposition du Pacte.

 

75.     Enfin, en ce qui concerne l'application de l'article 14 du Pacte, M. Bán relève que la tendance actuelle, dans les pays de l'ex-bloc socialiste, va dans le sens d'un plus large accès des particuliers aux tribunaux civils. Qu'en est-il exactement en Ukraine ?

 

76.     M. MAVROMMATIS relève, lui aussi, le nombre exceptionnellement élevé des condamnations à la peine capitale, dont 5 % seulement auraient été commuées, alors que, un peu partout dans le monde, les condamnations à mort sont commuées dans la plupart des cas. A cet égard, la vox populi ne saurait justifier la position des autorités ukrainiennes. M. Mavrommatis rappelle qu'en vertu de l'article 6 du Pacte, ces dernières devraient faire en sorte que le nombre des condamnations à mort diminue. En tout état de cause, elles ne sauraient fonder leurs décisions dans ce domaine sur l'opinion publique, et elles doivent au contraire prendre résolument l'initiative. M. Mavrommatis aimerait savoir quels seront les crimes passibles de la peine de mort dans la nouvelle législation, et si les autorités envisagent de revoir les méthodes d'exécution des condamnés. En outre, il aimerait avoir de plus amples renseignements sur l'utilisation des armes à feu par les forces de sécurité. En particulier, les Principes de base sur le recours à la force et l'utilisation des armes à feu par les responsables de l'application des lois, qui ont été adoptés à La Havane en 1990, sont-ils appliqués en Ukraine ?

 

77.     Enfin, M. Mavrommatis souhaiterait de plus amples précisions sur l'indépendance du pouvoir judiciaire, en particulier pour ce qui est de la nomination et de la destitution des magistrats, de la stabilité d'emploi dont ils bénéficient, des conditions de leur rémunération et de l'immunité dont ils jouissent, au civil et au pénal, pour des actes commis dans l'exercice de leurs fonctions.

 

78.     Mme EVATT croit savoir, d'après Amnesty International, que 60 exécutions auraient eu lieu en Ukraine en 1994. Circonstance aggravante, les familles ne seraient pas prévenues du moment de l'exécution, et les corps des victimes ne leur seraient pas restitués. La méthode d'exécution, à savoir la fusillade, soulève également des problèmes. Mme Evatt se joint aux autres membres


du Comité qui ont exprimé leur inquiétude au sujet des problèmes relatifs à la peine de mort. Elle s'associe également aux questions qui ont été posées sur l'indépendance du pouvoir judiciaire et aimerait avoir de plus amples informations sur la formation des juristes et les conditions dans lesquelles ils exercent leur profession.

 

79.     Mme CHANET s'associe aux préoccupations des autres membres du Comité en ce qui concerne la peine de mort en Ukraine. Elle fait observer que, dans aucun pays au monde, il n'y a jamais eu de cas où l'opinion publique ait fait pression sur les autorités pour qu'elles abolissent la peine de mort. On assiste toujours à la situation inverse : les gouvernants doivent convaincre leurs populations de l'inutilité de cette peine, en particulier grâce à une politique de prévention du crime. En outre, il est très important que les sanctions de substitution à la peine capitale soient inéluctables et efficaces.

 

80.     En ce qui concerne la question d'une hiérarchie des droits, qui a été évoquée à propos de la contamination par le VIH, Mme Chanet croit comprendre que les autorités ukrainiennes considèrent qu'en cas de conflit d'intérêts dû à l'application, d'une part, de l'article 6 et, d'autre part, des articles 17 et 19 du Pacte, ce sont les droits prévus à l'article 6 qui l'emportent. Mme Chanet fait observer que le Comité ne reconnaît pas de hiérarchie entre les droits inscrits dans le Pacte. Il n'y a pas de droits en quelque sorte "plus absolus" que d'autres. Il n'existe que des limitations et des dérogations possibles, prévues dans le texte même des articles du Pacte. C'est précisément sur ces restrictions, en particulier celles qui ont trait à la liberté d'expression, autorisées au titre du paragraphe 3 de l'article 19 du Pacte, que le Comité souhaiterait des informations de la part de la délégation ukrainienne.

 

81.     Enfin, Mme Chanet s'associe aux préoccupations de M. Kretzmer concernant la répression du délit de vagabondage en Ukraine. Il semblerait que le vagabondage soit passible de plusieurs sanctions : amende, arrestation ou détention. Si tel est bien le cas, la seule différence par rapport à la situation antérieure est qu'il n'y a plus de garantie judiciaire, ce qui soulève des problèmes au regard de l'application du Pacte.

 

82.     M. BHAGWATI s'associe pleinement aux préoccupations exprimées par Mmes Evatt et Chanet et par M. Mavrommatis en ce qui concerne la peine de mort en Ukraine.

 

83.     Selon Amnesty International, il semblerait qu'un détenu ne peut s'entretenir avec son défenseur qu'en présence du fonctionnaire qui a procédé à son arrestation. Est-ce exact ?

 

84.     En outre, l'obligation de travailler existe-t-elle toujours en Ukraine, et les autorités sont-elles habilitées à prendre des mesures administratives pour obliger quelqu'un à travailler ? Les mineurs en détention bénéficient-ils d'un traitement spécial ? Enfin, existe-t-il en Ukraine une procédure d'internement administratif ?

 

 

85.     M. KLEIN aimerait avoir des précisions sur les accords que l'Ukraine aurait conclus au sujet de l'élimination des armes nucléaires. Eu égard à l'article 6 du Pacte, il aimerait savoir si des armes nucléaires se trouvent toujours sur le territoire ukrainien et, dans l'affirmative, si les autorités ont pris toutes les mesures nécessaires pour empêcher que ces armes soient utilisées dans le cadre d'un chantage ou pour commettre des actes de terrorisme.

 

86.     Le PRESIDENT invite les membres du Comité à poursuivre l'examen du quatrième rapport périodique de l'Ukraine (CCPR/C/95/Add.2) lors d'une prochaine séance.

 

La séance est levée à 18 h 5.

 

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