Distr.

GENERALE

CRC/C/SR.241
7 novembre 1995


Original: FRANCAIS
Comptre rendu analytique de la 241ème séance : Ukraine. 07/11/95.
CRC/C/SR.241. (Summary Record)

Convention Abbreviation: CRC
COMITE DES DROITS DE L'ENFANT
Dixième session
COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 241ème SEANCE
tenue au Palais des Nations, à Genève,
le vendredi 3 novembre 1995, à 10 heures.

Présidente : Mme EUFEMIO

SOMMAIRE

Examen des rapports présentés par les Etats parties

Rapport initial de l'Ukraine (suite)








__________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également portées sur un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications éventuelles aux comptes rendus des séances publiques de la présente session seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la clôture de la session.


GE.95-19363 (F)
La séance est ouverte à 10 h 15.

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES (point 4 de l'ordre du jour) (suite)

Rapport initial de l'Ukraine (suite) (CRC/C/8/Add.10/Rev.1; CRC/C.10/WP.3)

1. La PRESIDENTE invite la délégation ukrainienne à continuer de répondre aux questions de la section concernant la santé et au bien-être de la liste des points à traiter.

2. Mme GRYGOROVYTCH (Ukraine) fait tout d'abord observer qu'il est difficile d'établir une comparaison entre le régime antérieur et le système actuel, puisque le premier a duré plus de 70 ans et que le second ne fonctionne que depuis 4 ans. Les autorités ukrainiennes déploient des efforts considérables pour maintenir l'infrastructure sociale et médicale à un niveau satisfaisant et, comme la délégation ukrainienne l'a indiqué précédemment, de nombreux programmes ont été définis à cet égard au cours des quatre années écoulées. C'est ainsi, par exemple, que les autorités ukrainiennes ont décidé la création à Kiev, d'un hôpital pour enfants qui devrait être opérationnel en 1996.

3. Des campagnes d'information ont été mises sur pied pour dissuader les jeunes femmes d'abandonner leurs enfants en leur expliquant qu'un abandon est un traumatisme à la fois pour l'enfant et pour la mère. Cependant, la situation économique générale et le fait que les jeunes ne soient pas toujours préparés à élever des enfants sont des facteurs aggravants. Il faut espérer que l'amélioration de la situation économique et sociale générale du pays permettra d'aboutir à une diminution du nombre d'abandons d'enfants. Quant aux travailleurs sociaux, Mme Grygorovytch déplore le nombre peu élevé de bénévoles disposés à oeuvrer dans ce domaine.

4. S'agissant de l'approvisionnement en médicaments, il convient de préciser que l'industrie pharmaceutique ukrainienne ne satisfait qu'à 28 % environ les besoins du pays. Si l'on trouve assez facilement certains produits tels que les antibiotiques, les sulfamides ou les vitamines, il est en revanche plus difficile de trouver certaines préparations hormonales et l'insuline, par exemple, dont on vient à peine de commencer la production en Ukraine. Par conséquent, le reste des médicaments nécessaires à la population ukrainienne est importé. Par ailleurs, Mme Grygorovytch confirme qu'il existe un programme mis en oeuvre par le Ministère de la santé pour envoyer certains enfants à l'étranger afin qu'ils puissent bénéficier d'un traitement médical. C'est notamment le cas pour des enfants qui souffrent de leucémie et qui doivent subir une greffe de moelle. En 1995, 300 enfants ont pu être traités à l'étranger. En ce qui concerne les enfants handicapés, il convient de préciser qu'ils ont la possibilité de rester à la maison en bénéficiant d'une prestation sociale jusqu'à l'âge de 16 ans. Si un des parents doit rester au foyer pour s'occuper d'un enfant handicapé, une prestation complémentaire est versée à la famille. Cela étant, compte tenu de l'inflation qui sévit en Ukraine, il est probable que ces prestations ne soient pas suffisantes pour couvrir les besoins des familles concernées.

5. L'Ukraine bénéficie dans une certaine mesure de l'aide humanitaire internationale, particulièrement depuis la catastrophe de Tchernobyl. Les premiers établissements à bénéficier de ces fonds sont les hôpitaux pour enfants et des montants importants sont également alloués aux troisième et quatrième zones de Tchernobyl et aux autres zones contaminées lors de la catastrophe.

6. Certains membres du Comité se sont étonnés du taux élevé de mortalité infantile enregistré dans certaines régions et notamment celle d'Ivano-Frankovsk. Il convient d'une part de préciser que la catastrophe de Tchernobyl n'a pas seulement touché les régions situées dans le voisinage immédiat de la centrale. D'autre part, la région d'Ivano-Frankovsk est une zone industrielle spécialisée notamment dans la production du chlore, ce qui joue certainement un rôle important dans la pollution atmosphérique. Enfin, cette région est plutôt montagneuse, ce qui constitue un obstacle à l'arrivée rapide des secours en cas de maladie ou d'accident.

7. Par ailleurs, même si les autorités ukrainiennes ne sont pas en mesure d'effectuer une étude épidémiologique concernant le Sida, faute de moyens suffisants, il semble que l'infection par le virus VIH se répande dans le pays. Enfin, s'agissant de l'avortement, Mme Grygorovytch précise qu'en 1994, 22 avortements sur 1 000 concernaient des jeunes filles de moins de 18 ans.

8. S'agissant du chômage des femmes, il convient de souligner que le Code du travail ukrainien n'a jamais admis la moindre discrimination à l'égard des femmes en ce qui concerne le salaire. Cela étant, les femmes représentent 51 % de la population ukrainienne et il est donc normal qu'il y ait plus de chômeuses que de chômeurs. A cet égard, conformément à un décret adopté en été 1995, les femmes ayant des enfants et qui sont au chômage se voient accorder une subvention pendant la durée de leur chômage pour autant qu'elles fournissent des renseignements sur leurs revenus, sur les revenus de leur mari et sur les dépenses de leur ménage. Ces données doivent être réévaluées tous les trois ou quatre mois et la subvention prend fin lorsque la femme concernée retrouve un emploi.

9. M. KOLOSOV fait observer qu'une des réussites du système socialiste avait été de faire en sorte qu'il n'y ait pas de discrimination entre les hommes et les femmes. Mais le phénomène de la discrimination à l'égard des femmes se répand dans les sociétés en transition et les propriétaires d'entreprises privées ne se conforment pas tous à la législation et préfèrent souvent ne pas embaucher de femmes, ou leur verser des salaires inférieurs à ceux des hommes. Ce problème n'existait pas il y cinq ans et il n'était à l'époque pas nécessaire d'adopter une législation spéciale pour protéger les femmes. Désormais la situation a changé et il est nécessaire, dans ces nouvelles sociétés de l'est de l'Europe, d'adopter une législation spéciale fondée sur les dispositions des conventions pertinentes de l'OIT pour garantir l'égalité de traitement entre les hommes et les femmes.

10. M. MOMBESHORA souhaite savoir quels sont les personnels chargés de promouvoir la planification familiale parallèlement aux membres des professions médicales. Est-il prévu en la matière de mettre en place un système basé sur la participation de la collectivité ? Par ailleurs, il serait intéressant de savoir si les autorités ukrainiennes ont défini une politique bien précise en matière d'allaitement maternel, tenant compte notamment des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl. A cet égard, il serait utile de savoir si une étude a été entreprise par les autorités ukrainiennes concernant les effets à moyen et à long terme des radiations dues à la catastrophe de Tchernobyl. A la lumière des informations récemment diffusées dans les médias, M. Mombeshora souhaite savoir si les autorités ukrainiennes estiment nécessaires de fermer les installations de Tchernobyl et si ces dernières présentent encore un danger.

11. Mme SARDENBERG souhaite obtenir des informations plus détaillées sur la situation de la fillette à l'école et au sein de la famille, dans les différentes régions du pays, dans les zones rurales et dans les zones urbaines.

12. Mme KARP souhaite avoir des précisions sur les programmes permettant à des enfants malades d'être traités à l'étranger. Par ailleurs, il serait intéressant de connaître l'âge à partir duquel les enfants peuvent obtenir un traitement médical sans l'aval de leurs parents.

13. Mlle MASON a cru comprendre que la situation des enfants était meilleure à tous points de vue sous l'ancien régime politique. A l'heure actuelle, divers facteurs dus à la phase de transition, à l'instauration de mécanismes du marché et de certains mécanismes démocratiques, sans parler de la catastrophe de Tchernobyl, ont, semble-t-il, des conséquences négatives sur le bien-être des enfants ukrainiens. C'est pourquoi Mlle Mason aimerait savoir si une étude a été effectuée sur ce que ressent la population ukrainienne, et notamment les enfants. Il serait en effet intéressant de savoir si les Ukrainiens sont tentés de revenir au système antérieur pour des raisons liées notamment à l'intérêt supérieur de leurs enfants.

14. Mme GRYGOROVYTCH (Ukraine) précise que le prochain code du travail interdit toute discrimination à l'encontre des femmes, comme c'était le cas à l'époque soviétique. A propos de la scolarisation des filles, 95 % des écoles ukrainiennes sont mixtes et les statistiques montrent un taux de fréquentation semblable parmi les garçons et les filles. Quant au programme de planification familiale, les parents, les enseignants et les infirmières y participent.

15. En ce qui concerne l'allaitement des enfants, 60 % des enfants d'un mois et 40 % des enfants de trois mois sont allaités par leur mère. Ces faibles proportions sont dues à la contamination du lait maternel. Il existe un programme de contrôle immunologique qui a fait apparaître que de 1986 à 1991 le nombre de cas de leucémie s'était accru mais qu'il a diminué depuis. A ce sujet, un programme de lutte contre la leucémie a été mis en place. Les cas de déficience du système immunitaire restent fréquents. Mme Grygorovytch souligne que l'Ukraine, en proie à de graves difficultés économiques, n'est pas en mesure de fermer la centrale nucléaire de Tchernobyl sans l'aide internationale.

16. Lorsqu'un enfant a besoin d'un traitement médical, les parents s'adressent au Ministère de la santé qui se charge alors de l'enfant, et lorsque cela est nécessaire, il met tout en oeuvre pour que des enfants suivent un traitement à l'étranger. En 1995, 300 enfants ont été ainsi soignés à l'étranger.
17. Mme Grygorovytch estime que les enfants vivent mieux que par le passé. Elle rappelle qu'en 1930 la famine sévissait en Ukraine, qu'au lendemain de la deuxième guerre mondiale la situation était difficile et que ce n'est qu'à partir de 1964 qu'elle s'est stabilisée. Toutefois, au moment de la perestroïka, de graves difficultés d'approvisionnement en denrées alimentaires et en vêtements étaient réapparues. Il est vrai qu'en 1995, l'inflation, la crise et la réforme monétaire ont eu des effets préjudiciables sur le montant des pensions de retraites, mais le potentiel économique de l'Ukraine permettra de redresser la situation actuelle en quelques années. Mme Grygorovytch rappelle qu'en 1946 la population des régions qui avaient été le théâtre de la guerre avait été soumise à des radiations; dix ans après, cette situation avait été résolue. Enfin, elle est certaine que la population ukrainienne veut vivre au pays, quelles que soient ces conditions actuelles.

18. M. MOMBESHORA, au sujet des mesures préventives prises à propos des aliments contaminés, souhaiterait savoir si certains aliments sont importés et, si c'est le cas, s'ils sont onéreux.

19. M. KOLOSOV souhaiterait des précisions sur les travailleurs sociaux bénévoles. Ces volontaires ont-ils reçu une formation professionnelle suffisante ?

20. Il semble que l'Ukraine dispose d'un bon système juridique, mais il serait utile de savoir si l'on veille dûment à l'application de la loi. M. Kolosov estime que dans l'ancienne Union soviétique, ce n'était pas le cas, sauf à Moscou. Or le bien-être des enfants en dépend. Par ailleurs, le système judiciaire présentait des faiblesses à l'époque soviétique. En effet, les juges étaient mal payés. Le plus souvent, il s'agissait de femmes que des obligations familiales empêchaient de s'acquitter de leurs fonctions autant qu'il l'aurait fallu. Les particuliers n'avaient guère recours aux procédures d'appel. Veiller à l'application de la loi est encore plus nécessaire aujourd'hui où, dans les pays de l'ancienne Union soviétique, les entrepreneurs privés ne se montrent guère enclins à la respecter.

21. La PRESIDENTE souhaiterait des éclaircissements sur la fourniture de médicaments et d'antibiotiques dans certaines régions difficiles d'accès, en particulier dans les régions montagneuses, et sur les mesures éventuellement prises pour y remédier.

22. Mme GRYGOROVYTCH (Ukraine), au sujet de la contamination de certaines denrées alimentaires, précise qu'il existe suffisamment de régions écologiquement propres pour alimenter sainement les enfants. Cette production est soumise à des examens bactériologiques. Il n'en reste pas moins que le quart des terres destinées à la production alimentaire est contaminé. Toutefois, diverses mesures préventives ont été prises et il existe un programme de distribution d'eau potable qui, en 1996, devrait bénéficier à toutes les femmes enceintes et à tous les enfants des régions contaminées. Par ailleurs, Mme Grygorovytch signale que les pouvoirs publics mettent tout en oeuvre pour limiter l'importation de produits alimentaires, afin d'assurer aux producteurs nationaux des débouchés dans le pays.

23. En réponse à M. Kolosov, Mme Grygorovytch confirme que les travailleurs sociaux reçoivent une formation universitaire et précise que le Parlement ukrainien, outre sa fonction législative, veille au contrôle de l'application des lois en créant à cette fin des commissions comme celles dont l'oratrice fait partie.

24. Au sujet des services de planification familiale, elle souligne le rôle essentiel des enseignants, des médecins - des médecins scolaires notamment - et des parents.

25. A propos de la production d'antibiotiques et de vitamines, elle rappelle que l'industrie pharmaceutique ukrainienne couvre seulement 28 % des besoins nationaux. Certains produits sont donc importés; les besoins en vitamines sont couverts pour moitié.

26. M. KOLOSOV indique que le Centre pour les droits de l'homme vient de publier un document sur les travailleurs sociaux et leur formation. Il demandera au Secrétariat de le transmettre à la délégation ukrainienne.

27. La PRESIDENTE, qui a une expérience de travailleur social, appuie cette remarque de M. Kolosov. En ce qui concerne la planification familiale, elle estime que les travailleurs sociaux y ont un rôle important à jouer, à condition qu'ils aient reçu une formation professionnelle appropriée pour sensibiliser les personnes à l'importance que revêt la planification familiale.

28. M. MOMBESHORA, à propos du rôle essentiel des travailleurs sociaux dans la planification familiale, se range à l'avis de M. Kolosov et de la Présidente. Au sujet des malades du Sida et des porteurs du virus VIH, il serait utile de disposer de statistiques sur le nombre de personnes touchées afin d'évaluer les progrès accomplis lors de la présentation du prochain rapport dans cinq ans.

29. Mme GRYGOROVYTCH (Ukraine) souligne qu'en Ukraine les travailleurs sociaux ont une formation appropriée et elle remercie le Comité de son intention de lui faire parvenir le document publié par le Centre pour les droits de l'homme sur les travailleurs sociaux. A propos des malades du Sida et des porteurs du VIH, elle rappelle que, depuis trois ans, un comité qui dépend de la Présidence de la République étudie ces questions, notamment le type de transmission du virus et le nombre de malades, et rend régulièrement compte à la Présidence de ses travaux. Il s'agit d'un comité national, ce qui montre combien la lutte contre le Sida est primordiale aux yeux des autorités. Toutefois, on ne dispose pas en Ukraine d'assez de réactifs pour procéder aux analyses médicales nécessaires.

30. La PRESIDENTE invite les membres du Comité à poser des questions concernant la section suivante de la liste des points à traiter (CRC/C.10/WP.3) :
"Education et loisirs
(Articles 28, 29 et 31 de la Convention)

31. M. MOMBESHORA, se référant au paragraphe 100 du rapport, demande si la scolarité est véritablement gratuite en Ukraine. Par ailleurs, les étudiants ukrainiens ont-ils la possibilité de voyager à l'étranger et de rencontrer des jeunes d'autres pays ? Enfin, M. Mombeshora souhaiterait connaître le taux d'analphabétisme en Ukraine.

32. Melle MASON note que selon les statistiques disponibles, l'analphabétisme était pratiquement inexistant en Ukraine avant l'indépendance. Est-ce que le bilan en la matière est toujours aussi positif ?

33. Quelle est la situation des enseignants dans le pays ? Les personnes qui optent pour la profession d'enseignant le font-elles par vocation ou simplement parce qu'elles n'ont pas trouvé mieux ? Comment est rémunéré le corps enseignant par rapport à d'autres catégories de fonctionnaires ?

34. La PRESIDENTE, notant que les statistiques fournies au sujet des taux de scolarisation ne sont pas ventilées par sexe, demande quel est le pourcentage des filles et des garçons qui fréquentent l'école ? Dans quelle mesure les matériels didactiques et les manuels scolaires utilisés dans l'enseignement primaire et secondaire contribuent-ils à l'amélioration de l'image de la fillette ? Les méthodes d'enseignement utilisées favorisent-elles l'exercice du droit à la liberté d'expression à l'école ?

35. Mme GRYGOROVYTCH (Ukraine), répondant aux questions posées par les membres du Comité, signale que l'éducation tant aux niveaux primaire que secondaire est gratuite. Bien sûr, si les parents veulent envoyer leurs enfants dans des écoles de musique ou leur faire suivre des cours intensifs de langues, les frais sont à leur charge.

36. En quatre années d'indépendance le taux d'alphabétisation n'a pas diminué. Les enfants vont à l'école dès l'âge de sept ans et ceux qui ne peuvent pas se déplacer parce qu'ils sont handicapés reçoivent une instruction à domicile. Dans certaines facultés l'enseignement est payant, mais ceux qui fréquentent ce type d'établissement ne sont plus des enfants étant pour la plupart âgés de 19 ans et plus. Cela dit, le cas des étudiants qui viennent de familles nombreuses ou qui sont handicapés est examiné par les autorités compétentes qui peuvent au besoin allouer des subventions.

37. Les échanges internationaux d'étudiants, qui permettent aux jeunes d'élargir leurs horizons et d'enrichir leurs connaissances, et qui favorisent le développement des relations entre les peuples, sont vivement encouragés.

38. L'enseignement a toujours été l'une des professions les plus respectées eu égard à la contribution des enseignants au développement de la personnalité des enfants. Chaque année, les instituts pédagogiques reçoivent un nombre considérable de candidatures, qui témoignent de l'attrait qu'exerce la profession. Les enseignants perçoivent en général un salaire équivalent à celui des autres fonctionnaires de l'Etat. Répondant à une question sur le taux de scolarisation, l'oratrice affirme que rien dans les statistiques n'indique que le pourcentage des filles qui fréquentent l'école est inférieur à celui des garçons.

39. Dans le cadre des mesures visant à éduquer le grand public, 1995 a été proclamé année de la justice. Différentes activités de sensibilisation ont été organisées par le Ministère de la justice et d'autres instances. L'égalité entre les hommes et les femmes a été solennellement proclamée.

40. S'agissant des efforts visant à diffuser les principes de la Convention, force est de reconnaître que la population ne les connaît pas encore suffisamment. Avec l'aide du Centre pour les droits de l'homme, les services compétents font tout ce qui est en leur pouvoir pour remédier à cette situation. A cet égard, des dispositions ont été prises pour inscrire au programme d'enseignement des écoles secondaires des cours sur les fondements du droit, l'objectif étant, entre autres, de familiariser les élèves avec les principes des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme dont la Convention. A propos des efforts destinés à promouvoir le rôle des filles dans la société, il y a lieu de signaler la création de six lycées qui accueilleront des étudiantes les plus douées. Les économistes, les juristes et les autres cadres qui seront formés par ces centres d'excellence occuperont des positions clés dans l'industrie et la fonction publique et feront partie de l'élite de demain.

41. Répondant à des questions posées par M. Mombeshora, Mme Grygorovytch fait observer que l'analphabétisme n'existe que chez les adultes. Il s'agit en général de personnes très âgées. En revanche, il n'y a pas d'analphabètes parmi les jeunes. Tous les garçons et les filles vont à l'école. Il est vrai que les difficultés économiques que vit le pays ont des répercussions dans le domaine de l'enseignement, mais les autorités font tout pour que ce secteur prioritaire dispose des ressources dont il a besoin. Les écoles du soir sont généralement gratuites et il en va de même pour les cours par correspondance. Ce secteur est considéré comme stratégique compte tenu de sa contribution à l'amélioration des qualifications professionnelles des travailleurs et, partant aux résultats de l'économie.

42. Répondant à une question de Mme Karp, la représentante de l'Etat partie dit que les nouveaux manuels scolaires qu'il est envisagé d'élaborer, notamment ceux qui sont destinés aux classes supérieures, feront une large place aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

43. La PRESIDENTE, notant les gros problèmes que rencontrent la presse écrite et l'édition en Ukraine, se demande dans quelle mesure les difficultés actuelles pourraient entraver la publication des manuels scolaires envisagés.

44. Mme GRYGOROVYTCH (Ukraine) reconnaît que son pays passe par une période difficile et que de nombreux journaux ne paraissent plus régulièrement. L'édition connaît les mêmes problèmes et les auteurs n'arrivent plus à faire publier leurs livres. Cela dit, ces difficultés ne sont que passagères et la situation s'améliorera dès que l'économie se sera stabilisée. Quoiqu'il en soit, durant l'année en cours, tous les écoliers ont reçu des livres. Pour ce qui est des nouveaux manuels scolaires qu'il est envisagé de lancer, les autorités feront tout ce qui est en leur pouvoir pour qu'ils soient disponibles en temps voulu.

45. La PRESIDENTE invite les membres du Comité à poser leurs questions au sujet des mesures spéciales de protection de l'enfance.
"Mesures spéciales de protection de l'enfance
(Articles 22, 30, 32, à 40 de la Convention)

46. Mme SANTOS PAIS, abordant la question de la justice pour mineurs, rend hommage à l'esprit critique des auteurs du rapport CRC/C/8/Add.10/Rev.1 qui n'ont pas caché que le système existant ne correspondait pas encore aux normes. Ce constat est la preuve que les autorités sont conscientes des problèmes et qu'elles n'épargneront aucun effort pour trouver des solutions appropriées. Au paragraphe 157 du rapport, il est question d'un projet de loi sur les organismes et services appelés à s'occuper des mineurs et les institutions spéciales pour mineurs. A-t-il déjà été adopté ? Existe-t-il une administration de la justice pour mineurs distincte de l'appareil judiciaire pour adultes ? Il est certes question dans le rapport de tribunaux pour mineurs, mais il ne s'agit pas semble-t-il d'une structure couvrant l'ensemble du territoire. Là où existent de tels tribunaux les juges qui y siègent sont-ils indépendants et impartiaux ?

47. Un des principes fondamentaux de la Convention est qu'un mineur ne doit être privé de sa liberté qu'en tout dernier ressort; et qu'en cas de recours à une telle peine, la privation de liberté doit durer le moins longtemps possible. Or, il est question dans le rapport d'une détention préventive pouvant durer jusqu'à 18 mois. Une telle mesure est contraire à l'article 37 b) de la Convention. La question qui se pose alors est celle de savoir si un mineur qui fait l'objet d'une mesure de privation de liberté de la part de la police peut contester une telle mesure devant les tribunaux ou une autre instance indépendante et impartiale. Dans le cas contraire, l'experte encourage le représentant de l'Etat partie à faire en sorte qu'une disposition allant dans ce sens soit incorporée dans la législation ukrainienne.

48. Il ressort du rapport que même s'il n'y a pas de responsabilité pénale avant l'âge de 18 ans les jeunes gens dont le comportement est considéré comme contraire aux lois pénales peuvent être placés dans des écoles spéciales. De quelles garanties bénéficient-ils ? Sont-ils aidés par un avocat ? Peuvent-ils, en cas d'abus déposer une plainte et, le cas échéant, cette plainte est-elle examinée par un organe indépendant ?

49. Au paragraphe 145 du rapport, il est indiqué qu'en cas de surpeuplement des centres de détention, il est possible de placer des adultes dans la même cellule que les mineurs. Cette pratique est de toute évidence incompatible avec l'article 37 c) de la Convention qui stipule qu'un enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que son intérêt ne l'exige.

50. Mme SARDENBERG pense que, compte tenu des mutations que connaît la société ukrainienne, il est peut-être temps d'aborder le problème de l'exploitation sexuelle des enfants et de la prostitution enfantine. Il est dit aux paragraphes 161 et 162 du rapport que les enfants sont protégés par l'Etat contre l'exploitation et la violence sexuelles mais le Code pénal ne comporte actuellement aucune disposition visant les crimes et délits liés au fait que des enfants sont exploités à des fins de prostitution ou d'autres pratiques sexuelles illégales. Selon des informations disponibles, l'exploitation sexuelle des enfants ne cesse de prendre de l'ampleur en Ukraine sans que les services de protection sociale puissent y remédier. Y a-t-il eu des enquêtes approfondies sur ce phénomène ? Dans le cadre du programme national en faveur des enfants, quelles sont les dispositions qui ont été prises pour lutter contre ce fléau. Un des objectifs de l'Etat étant de développer la vie associative en Ukraine, les autorités ont-elles essayé de mobiliser des organisations non gouvernementales pour lutter contre ces abus ?

51. Au paragraphe 162 du rapport, il est question d'un projet de loi visant à inclure dans le Code pénal des dispositions pour la protection de l'enfant contre ce type d'exploitation. A quel stade est arrivé ce projet de loi ?

52. M. KOLOSOV, se référant aux paragraphes 135 et 136 du rapport de l'Ukraine (CRC/C/8/Add.10/Rev.1), relève que, selon les autorités ukrainiennes, le pays n'a pas ratifié la Convention relative au statut des réfugiés faute de l'infrastructure requise pour en appliquer les dispositions. Or, le gouvernement a bien trouvé moyen de fournir aux réfugiés de la République de Moldova et à leurs enfants tout ce dont ils pouvaient avoir besoin. Puisque, en outre, le Cabinet ministériel a approuvé en 1983 un règlement temporaire de la détermination du statut de réfugié, le gouvernement ne pourrait-il pas envisager aujourd'hui de ratifier la Convention en question ? L'expert demande également comment le Gouvernement ukrainien peut affirmer (par. 137) que le pays n'a pas eu à faire face au problème de la réinsertion sociale des enfants touchés par des conflits armés, dès lors qu'il a accueilli des enfants fuyant avec leurs parents les hostilités qui faisaient rage dans la République de Moldova (l'obligation énoncée à l'article 39 de la Convention couvre tous les enfants placés sous la juridiction de l'Etat partie).

53. En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs et notamment à la réforme du système pénitentiaire, M. Kolosov recommande vivement que soient pris en considération, aux fins de cette réforme, l'ensemble de règles minima des Nations Unies dites Règles de Beijing, les principes directeurs pour la prévention de la délinquance juvénile, adoptés par l'ONU en 1990, ainsi que l'ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement.

54. Mme KARP souhaite savoir quelles modifications il est prévu d'apporter au Code de procédure pénale ukrainien en vue d'instituer des règles qui s'appliqueraient spécialement aux mineurs. Il a été question de recommandations que le Procureur général aurait faites au sujet de l'administration de la justice pour mineurs - qu'en est-il ? Enfin, est-il prévu d'introduire, ou existe-t-il déjà, un service dans le cadre duquel des agents de l'Etat seraient appelés à s'occuper directement de jeunes délinquants bénéficiant d'un sursis probatoire ?

55. Mlle MASON demande s'il existe un système d'aide judiciaire dans le cadre duquel un avocat peut être commis d'office lorsque les parents d'un mineur traduit en justice n'ont pas les moyens de payer les frais de sa défense. Par ailleurs, a-t-on pris des mesures pour prévenir la délinquance juvénile voire la récidive, notamment par le biais de services de conseil aux jeunes par des psychologues ou des assistants sociaux ? S'agissant des enfants des rues, le gouvernement a-t-il envisagé de prendre un ensemble de mesures concrètes pour lutter contre ce phénomène qui ne cesse de s'amplifier en Ukraine ?

56. La délégation ukrainienne a évoqué un programme de subventions et d'allocations en faveur des mères et des enfants : d'autres dispositions ont-elles été prises ou sont-elles envisagées, notamment sur le plan des possibilités d'emploi, en vue d'aider les familles démunies à assurer à leurs enfants un niveau de vie suffisant pour que ceux-ci évitent le piège de la prostitution et de l'exploitation sexuelle ? S'agissant des violences sexuelles et de l'inceste, l'expert souhaite savoir si l'on dispose de données sur l'ampleur du phénomène et sur les poursuites engagées contre ceux qui ont commis de telles violences. Les enfants victimes d'inceste sont-ils automatiquement retirés de leur milieu familial et sont-il pris en charge, en même temps que les membres de leur famille par des conseillers ? D'ailleurs, toutes les personnes qui s'occupent de ces enfants et ont affaire à leurs parents - qu'il s'agisse des agents de police, des magistrats ou des assistants sociaux - devraient suivre une formation spéciale à cette fin. En ce qui concerne la procédure pénale et l'application des peines, Mlle Mason demande si les audiences ont lieu à huis clos dans les affaires de violences sexuelles commises des enfants et si les peines sont les mêmes, que les victimes soient des filles ou des garçons. Enfin, quel est l'âge minimum du consentement à des rapports sexuels ? Quelle est l'attitude générale à l'égard de l'homosexualité des hommes en Ukraine et quelle est l'extension de ce phénomène ?
57. La séance est suspendue à 12 h 30; elle est reprise à 12 h 40.

58. Mme GRYGOROVYTCH (Ukraine) reconnaît que l'administration de la justice et en particulier pour les mineurs laissait beaucoup à désirer dans le passé - c'est bien la raison pour laquelle les autorités ukrainiennes ont entrepris de réformer la procédure judiciaire et de refondre le Code pénal. A l'avenir, il sera établi à tous les échelons administratifs - régional, local et des districts - des services chargés de la surveillance des mineurs et de la prévention de la délinquance. Les services de protection des mineurs du Ministère de l'intérieur, duquel dépendent les colonies de travail, auront des antennes tant dans les services de réinsertion sociale et les centres médico-sociaux du Ministère de la santé que dans les établissements d'enseignement général et de formation professionnelle. En ce qui concerne le fait de placer des adultes dans la même cellule que les mineurs détenus avant jugement, la représentante de l'Ukraine rappelle que cette mesure n'est prise que dans des conditions bien précises et à titre tout à fait exceptionnel, lorsque les locaux sont surpeuplés. Une disposition tout à fait novatrice a été intégrée au Code de procédure pénale, puisqu'il est possible de faire appel des décisions prises par le procureur touchant l'arrestation et la détention. Il existe bien un système d'assistance judiciaire grâce auquel la défense d'un mineur traduit en justice peut être assurée gratuitement, au besoin. Mme Grygorovytch confirme que les magistrats évitent, autant que faire se peut, de prononcer des peines privatives de liberté à l'encontre de mineurs et optent, s'ils y sont réduits, pour la peine minimale en l'occurrence. Il existe effectivement la possibilité de faire recours après condamnation. D'ailleurs, une fois purgée la moitié de la peine d'emprisonnement, les condamnés peuvent être graciés par le Président sur requête. Quant aux violences et à l'exploitation sexuelles, les peines applicables en la matière sont les mêmes, que la victime soit une fille ou un garçon. Le nouveau code pénal soumis à l'examen du Parlement comportera à cet égard des dispositions plus amples et plus détaillées qui satisferont plus étroitement aux exigences énoncées dans la Convention. Il en ira de même de la vente et de la traite d'enfants.

59. En ce qui concerne la question des réfugiés, Mme Grygorovytch précise que l'Ukraine s'est attachée à satisfaire les besoins essentiels des réfugiés de la République de Moldova, mais n'aurait pas les moyens de faire face à des afflux plus importants de réfugiés, raison pour laquelle l'Ukraine ne peut pas encore ratifier la Convention relative au statut des réfugiés.

60. S'agissant du phénomène des enfants des rues, Mme Grygorovytch signale que des enquêtes directes sont faites sous les auspices de la Commission chargée des questions relatives aux femmes, à la maternité et à l'enfance auprès du Président de l'Ukraine, d'où il ressort que la majorité de ces enfants sont en fait des garçons qui s'efforcent de gagner quelque argent en vendant des journaux ou en lavant des voitures; exception faite des enfants tsiganes se livrant à la mendicité et qui n'ont pas toujours de domicile fixe, les enfants des rues ont en règle générale un foyer, encore que celui-ci soit peu stable. Le Gouvernement ukrainien entend lutter contre ce phénomène - et plus précisément contre la délinquance juvénile et l'exploitation sexuelle qu'il entraîne - par le biais du grand projet national "Enfants d'Ukraine" et de son programme d'enseignement à long terme. Il est indéniable que le succès de ces mesures de prévention dépendra de l'aboutissement des réformes économiques.

61. En ce qui concerne plus particulièrement l'exploitation sexuelle, il faudra entreprendre une campagne d'information auprès des jeunes pour leur éviter les pièges de la prostitution. La Commission créée près le Président il y a quelques mois y travaillera et s'attachera à recommander des mesures législatives et autres en la matière, selon que de besoin. La représentante de l'Ukraine indique que les écoles ont commencé à dispenser des cours d'éducation sexuelle à l'intention des jeunes et que les services de planification familiale en font autant. Mme Grygorovytch signale enfin que l'Ukraine a été un des premiers pays de l'ex-URSS à dépénaliser l'homosexualité.

62. M. KOLOSOV souhaite que la délégation ukrainienne apporte les précisions qu'il a demandées au sujet de la réinsertion sociale des enfants venus de la République de Moldova et qui, sans aucun doute, ont été touchés par le conflit armé sévissant dans leur pays d'origine. Il voudrait aussi savoir ce que pense la délégation de l'idée d'intégrer dans le droit interne les règles et principes directeurs dont il a fait état concernant l'administration de la justice pour mineurs. Enfin, en ce qui concerne les colonies de travail accueillant des délinquants mineurs, il demande si les autorités ukrainiennes n'envisageraient pas la possibilité d'attribuer la compétence pour ces colonies au Ministère de l'éducation et non plus au Ministère de l'intérieur, qui n'a sans doute pas les connaissances spécialisées requises à cet effet.

63. Mme KARP constate que la délégation ukrainienne n'a pas répondu à ses questions concernant les services de probation et demande à Mme Grygorovytch de bien vouloir combler cette lacune.
La séance est levée à 13 heures.

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